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[CRITIQUE] : Last Christmas

 

Réalisateur : Paul Feig
Acteurs : Emilia Clarke, Henry Golding, Emma Thompson, Michelle Yeoh,...
Distributeur : Universal Pictures International France
Budget : -
Genre : Comédie, Romance.
Nationalité : Britannique, Américain.
Durée : 1h43min

Synopsis :
Kate traîne derrière elle une série de mauvaises décisions et erre dans Londres au son des grelots accrochés à ses bottes de lutin, seul emploi qu’elle ait réussi à décrocher dans une boutique de Noël. C’est pourquoi elle n’en croit pas ses yeux quand elle rencontre Tom qui semble voir en elle bien plus que ce qu’elle laisse paraître. Alors que la ville se pare de ses plus beaux atours pour les fêtes de fin d’année, rien ne semblait les prédisposer à nouer une relation. Mais parfois, il suffit de laisser opérer la magie de Noël, d’ouvrir son cœur et d’y croire…





Critique :



S'il y a bien quelque chose de proprement exceptionnel et inhérent aux fêtes de fin d'année, c'est bel et bien notre propension à volontairement nous laisser aller aux petits plaisirs coupables de la vie de cinéphile : s'emmitoufler sous une couette bien chaude avec une boisson qui l'est tout autant, et se gaver de films/téléfilms sentant bon la neige et le sapin, mais très rarement la palme d'or du bon goût, et encore moins le minimum syndical de la défense facile.
Le meilleur dans tout cela, c'est que l'on assume - presque tous - pleinement cette régression si séduisante, cette manière totalement nostalgique et mélancolique de nous plonger corps et âme dans la magie de noël, d'épouser une routine ronronnant comme un tube kitsch que l'on apprécie pas forcément, mais que l'on ne peut s'empêcher d'écouter en boucle (hello Mariah, on parle de toi)...
Un peu comme Last Christmas de feu George Michael, qui incarne autant le titre de la péloche que la chanson qui hante le dernier long-métrage de Paul Feig, qui personnifie avec amour sur pellicule, tout ce que l'on peut aimer et/ou détester de tout film de noël.



Véritable ruée vers la familiarité et le sentimentalisme aussi doux et savoureux qu'un chamalow fondant sous la langue, le film peut se voir comme l'album de Noël sur pellicule de son réalisateur Paul Feig, une péloche capitalisant aussi bien toutes nos " démangeaisons " cinématographiques que toutes ces petites choses qui nous réchauffent le coeur et nous mettent la larme à l'oeil, une comédie qui ne sera décemment pas celle à laquelle on pense en premier dans sa filmographie plus ou moins (surtout plus) accomplie, mais que l'on pourrait pourtant revisionner sans rechigner chaque année, au moment ou décembre pointe le bout de son nez.
Un bon et beau repas de fêtes sur grand écran, une dinde au marron dont on a deviné le goût dès la vision de sa bande annonce, certes pas aussi copieuse qu'espérer, mais qui vous en donne sensiblement pour votre argent, si vous ne jouez pas aux palais délicats et exigeants à la dernière minute.
Dès la première bobine, il est plus qu'évident que Kate (Emilie Clarke, craquante) - ou Katerina comme sa mère yougoslave l'appelle - est un désastre sur pattes dont le quotidien est rythmé par l'auto-destruction physique et affectif : elle a des rapports sexuels occasionnels avec des inconnus, boit des pintes à gogo seule dans des pubs, néglige autant son apparence que sa santé (très) fragile dans un passé proche, se rêve chanteuse mais squatte sans ambition un job d'assistante dans une boutique de souvenirs et semble user plus que de raison, de la patience de ses proches.
Mais la vie de Kate commence peu à peu à changer lorsqu'elle rencontre au hasard Tom (Henry Golding, en mode Cary Grant), un homme charmant qui se lance dans une mission presque dickensienne pour la guérir : il est le seul à voir au travers de la façade qu'elle s'est créée, à lui offrir des conseils avisés - au lieu de la juger - et surtout un minimum de compréhension au moment ou elle en a le plus besoin.



À mesure qu'ils se fréquentent et arpentent un Londres lumineux, Kate semble remettre sa vie sur les rails en brisant son cynisme/nihilisme et sa résistance face à la beauté du monde qui l'entoure (tant que la blessure qui l'habite sera vive, elle ne trouvera jamais la paix), alors que Tom lui, se révèle de plus en plus insaisissable en tant que potentiel âme soeur...
Étirant tout du long la crédulité et la crédibilité de l'histoire de Kate, jusqu'à une révélation finale qui en laissera sans doute plus d'un sur le carreau (mais qui incarne au pied de la lettre, les paroles répétés sans cesse par George Michael "Last Christmas, I gave you my heart... "), jouant pleinement de l'alchimie un peu balbutiante au début - mais attachante par la suite -, du couple Clarke/Golding, Last Christmas épouse savoureusement tous les codes du film de noël, tout en cherchant constamment à être plus qu'une simple comédie romantique festive, traitant avec fougue d'une pluie de thèmes rares dans le genre, mais cruellement d'actualité : les conséquences douloureuses du Brexit, la réalité du quotidien des sans-abris, la xénophobie, la peur qui hante le quotidien des communautés de réfugiés, le traumatisme paralysant de la maladie (encore plus quand on parle des maladies cardiaques) et les liens de plus en plus fragiles des relations familiales, à une époque de l'année où ils doivent être pourtant plus solides que jamais.
Tout n'est pas forcément traité avec subtilité certes (et souvent relié au catalogue musical de George Michael, dont l'hommage est ici plus que sincère, même si toutes les chansons ne s'emboîtent pas forcément à chaque situation choisie), mais la volonté louable et admirable de voir plus loin que son simple statut de sucrerie hivernale place de facto le dernier long-métrage de Paul Feig, une bonne coudée au-dessus d'une bonne majorité de ses concurrents.



Dans un Londres fantasmagorique à la Capra, peuplé de guirlandes et de lumières scintillantes aux quatre coins de chaque rue (excellente même si un peu appuyée, photographie de John Schwartzman), la péloche déroule sans faiblir son odyssée romantico-rédemptrice et curative, ou Feig laisse exploser son penchant certain pour les figures féminines complexes et désordonnées (avec une femme qui ne dépend et ne survit pas grâce à l'amour d'un homme, mais littéralement grâce à ce qu'il lui donne), ainsi que celui pour les seconds rôles stellaires et savoureux, ici parfaitement incarnés par les merveilleuses Emma Thompson et Michelle Yeoh, respectivement en tant que mère (difficile et toujours inquiète mais touchante) et patronne de Kate (une obsédée de Noël absolument géniale).
Magique dans ses imperfections, étonnant dans sa volonté d'être plus qu'une simple romance facile et sirupeuse, Last Christmas incarne tout du long ce qu'il s'est toujours promis d'être, et fournit suffisamment de douceur, de chaleur et d'honnêteté pour éclairer une sombre salle obscure d'hiver, mais surtout nos petits coeurs d'artichauts.
Un vrai et bon film de Noël, tout simplement.


Jonathan Chevrier

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