[CRITIQUE] : Blindspotting
Réalisateur : Carlos Lopez Estrada
Acteurs : Daveed Diggs, Rafael Casal, Janina Gavankar, Jasmine Cephas Jones, ...
Distributeur : Metropolitan FilmExport
Budget : -
Genre : Drame
Nationalité : Américain
Durée : 1h35min
Synopsis :
Encore trois jours pour que la liberté conditionnelle de Collin prenne fin. En attendant de retrouver une vie normale, il travaille comme déménageur avec Miles, son meilleur ami, dans un Oakland en pleine mutation.
Mais lorsque Collin est témoin d’une terrible bavure policière, c’est un véritable électrochoc pour le jeune homme. Il n’aura alors plus d’autres choix que de se remettre en question pour prendre un nouveau départ.
Critique :
Pur petit bijou indé aussi fort et drôle qu'il est engagé et méchamment barré,#Blindspotting est un must-see funky qui mélangeles genres avec malice (le buddy movie, la comédie référencée, le drame social,...) et qui mérite (surtout) amplement toutes ses louanges (@CookieTime_LE) pic.twitter.com/ILI0yoBOE0— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) 11 septembre 2018
Il faut parfois se méfier des films de festivals, acclamés de partout comme des petits bijoux. Projeté en ouverture du Festival de Sundance, Blindspotting vient tout juste de gagner le prix de la critique au dernier Festival de Deauville. Décrit comme un film branché, funky et fort, le premier long métrage de Carlos Lopez Estrada tient-il toutes ses promesses ? Oh que oui !
Écrit et produit par le duo d’acteurs Daveed Diggs et Rafael Casal, Blindspotting suit Collin pendant les trois derniers jours de sa liberté conditionnelle (mouvementés vous vous en doutez bien). Si l’histoire de base peut être passe-partout, elle est le point de départ d’une réflexion intense sur la ville d'Oakland, en pleine mutation et les Etats-Unis en général. Une Amérique de nouveaux riches, superficielle, une Amérique où on abat les noirs et où la peur prend le pas. Un projet tenu pendant 10 ans par Diggs et Casal, acteurs, producteurs et aussi rappeurs.
Si le message politique peut paraître lourd, il n’en est rien, grâce notamment à une fluidité impressionnante pour un premier film et une pluralité de ton, entre buddy-movie, comédie et drame social. La mise en scène est efficace et inventive , faisant parfois penser à du clip (ce qui n’est pas étonnant, Lopez Estrada venant de ce milieu), avec une culture hip-hop omniprésente et de long travelling. Mais le film n’est pas un clip, on le voit surtout grâce à son montage. Blindspotting est surtout un film politique, dénonçant à chaque plan, jusqu’à dans son titre. Dérivé du mot “blindspot” (angle mort en français), le film montre deux personnages qui vont devoir aller au delà de leur angle mort, face à des quartiers qualifiés de ghetto à l’époque, qui maintenant s’embourgeoisent et se remplissent de hipsters. Collin et Miles ne peuvent plus fermer les yeux sur ces changements, comme sur la violence policière de plus en plus virulente. Et demande au spectateur d’en faire autant. Cet état de fait est brillamment expliqué dans une scène où Val, l’ex petite amie de Collin lui apprend ce qu’est le blindspot en psychologie.
Ces fameuses images, à illusion d’optique, où on peut voir soit un vase, ou deux visages face à face par exemple. On ne verra jamais les deux images en même temps et une fois que l’on en voit une, notre cerveau verra toujours celle là en premier. Collin prend conscience alors que sa couleur de peau à avoir avec ses problèmes judiciaires et surtout que son meilleur ami, Miles qui a participé à la bagarre lui valant de la prison n’a pas eu de soucis car il est blanc. Et c’est en faisant face à un flic ayant tué un jeune noir récemment, dans une magnifique scène sous fond de slam où Collin prend conscience de sa condition et l’accepte pleinement.
Blindspotting est clairement un petit bijou indé, aussi fort que méchamment barré, aussi marrant que politique. Un film qui ne passera pas inaperçu.
Laura Enjolvy