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[CRITIQUE] : BlackKklansman


Réalisateur : Spike Lee
Acteurs : John David Washington, Adam Driver, Laura Harrier, Topher Grace, Alec Baldwin, Corey Hawkins,...
Distributeur : Universal Pictures International France
Budget : -
Genre : Drame, Romance, Aventure.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h38min.

Synopsis :
Au début des années 70, au plus fort de la lutte pour les droits civiques, plusieurs émeutes raciales éclatent dans les grandes villes des États-Unis. Ron Stallworth devient le premier officier Noir américain du Colorado Springs Police Department, mais son arrivée est accueillie avec scepticisme, voire avec une franche hostilité, par les agents les moins gradés du commissariat. Prenant son courage à deux mains, Stallworth va tenter de faire bouger les lignes et, peut-être, de laisser une trace dans l'histoire. Il se fixe alors une mission des plus périlleuses : infiltrer le Ku Klux Klan pour en dénoncer les exactions.
En se faisant passer pour un extrémiste, Stallworth contacte le groupuscule : il ne tarde pas à se voir convier d'en intégrer la garde rapprochée. Il entretient même un rapport privilégié avec le "Grand Wizard" du Klan, David Duke, enchanté par l'engagement de Ron en faveur d'une Amérique blanche. Tandis que l'enquête progresse et devient de plus en plus complexe, Flip Zimmerman, collègue de Stallworth, se fait passer pour Ron lors des rendez-vous avec les membres du groupe suprémaciste et apprend ainsi qu'une opération meurtrière se prépare. Ensemble, Stallworth et Zimmerman font équipe pour neutraliser le Klan dont le véritable objectif est d'aseptiser son discours ultra-violent pour séduire ainsi le plus grand nombre.



Critique :


Tous ceux qui pensaient, injustement, que ce bon vieux Spike Lee avait perdu son mojo (Chi-raq prouvait pourtant que c'était loin d'être le cas, Old Boy on l'oublie) ont dû gentiment revoir leur copie à la réception plus que positive sur la Croisette, de son BlackKklansman, attendu comme le dessert d'un été des blockbusters particulièrement savoureux sur le papier.
Un dessert logiquement épicé, puisque le bonhomme y aggripe avec force tous ses thèmes chers pour offrir une nouvelle représentation de la communauté afro-américaine au sein de la grande (?) Amérique profondément raciste, entremêlant Black Panthers, Ku Klux Klan et charge engagé/cinglante envers la politique de Trump pour mettre en images une histoire bigger than life (celle de Ron Stallworth, premier afro-américain à intégrer les forces de police de Colorado Springs, et dont le premier fait d'armes est d'avoir infiltré une cellule du KKK), aussi incroyable qu'elle est vraie.



Papa de Do The Right Thing oblige, on achetait les yeux fermés ce potentiel brûlot qui ne dénotait absolument pas au milieu des autres bijoux de sa filmographie.
À l'écran, la claque, certes moins violente et implacable que prévu, n'en est pas moins réelle, en prenant les atours inédits d'un passionnant moment de cinéma aussi volontairement déstabilisant qu'il est risible à souhait.
Car c'est bel et bien par le prisme du buddy movie mâtiné d'un brin de thriller d'infiltration, que Lee concocte son envolée politico-comique à la reconstitution léchée (coucou le kitsch fou mais génial des 70's), une peinture jouissivement caricaturale du KKK - et du racisme tout simplement -, convoquant le passé pour mieux mettre en lumière le présent, alignant les (petits) moments de tensions mais surtout les répliques cinglantes avec une frénésie proprement indécente, le tout sous une bande son d'époque qui n'aura pas de mal à enthousiasmer son auditoire (même le plus réfractaire à la soul).



Et sur ce terrain totalement inédit dans son cinéma (bel hommage à la Blaxploitation, avec laquelle il ne masqué jamais la filiation), le bonhomme nage comme un poisson dans l'eau et transpire la coolitude, dirige ses acteurs d'une main de maître (le trio Driver/Washington/Grace est excellent), mène son intrigue avec fluidité et dynamisme et se paye même quelques effets de mise en scène nous rappelant ses grandes heures derrière la caméra.
Mais c'est la que fan du cinoche engagé du grand Spike, était en passe d'espérer un poil mieux, tant la légèreté assumée du métrage (de son humour souvent potache en passant la caractérisation limitée des personnages, sans compter son discours méchamment manichéen...) malgré quelques ruptures de ton maitrisées (le charme de son cinéma), semble pleinement masquer la force d'un propos qui aurait peut-être mérité plus de hargne, plus d'implication et d'intensité, même son cri de colère prend pleinement son ampleur dansun climax terrifiant.



Vrai-faux retour aux sources symbolique (jusque dans la présence du fils de son acteur fétiche, Denzel Washington, en vedette), dénonciateur (les clins d'oeil à l'actualité sont glaçants), méta (dans sa reconstitution de la représentation des noirs dans le septième art ricain) et vraiment axé sur une volonté de réconciliation par le rire - à défaut d'être pleinement offensif et corrosif -, BlackKklansman, proche des délires au pays des rednecks des frangins Coen, s'avère in fine une belle comédie policière foutraque comme on les aime, bien plus riche et importante qu'elle n'en a l'air de prime abord.
Si Spike Lee est toujours un militant en colère, mais qu'il est définitivement plus relax qu'auparavant caméra au poing, l'Amérique elle, n'a jamais paru aussi malade...


Jonathan Chevrier



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