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[CRITIQUE SÉRIES] : UNE NUIT EN ENFER : Le Titty Twister ouvre de nouveau ses portes !


(Critiques de saisons 1 et 2).


La genèse d'Une Nuit en Enfer nous la connaissons tous ou presque. Peu après le tournage exténuant du délirant L’Armée des Ténèbres de Sam Raimi, le génial Robert Kurtzman (Witchmaster) accouche sur papier d'un traitement qui contient dans les grandes largeurs la trame de From Dusk Till Dawn, trame qu'il confiera à un Quentin Tarantino encore simple employé dans un vidéoclub, pour mettre en forme le tout. Résultat, si Kurtzman n'a finalement pas eu les honneurs de réaliser la chose, c'est le texan fou Robert Rodriguez qui héritera du bébé et signera ni plus ni moins que l'une des plus délirantes séries B horrifique de ses vingt dernières années. Une odyssée crépusculaire vampirique aussi pop, cool et jouissive que profondément poignante, avec son portrait deux familles bien distinctes – les Fuller et les Gecko – mais unies jusque dans la mort.

Un Alamo gore et badass qui résonne encore aujourd'hui comme l’œuvre la plus convaincante de son attachant metteur en scène. Dix-neuf ans plus tard et toujours son chapeau de cowboy vissé sur la tête, Rodriguez annonçait en grande pompe la mise en chantier d'une adaptation pour le petit écran de son fameux film culte, histoire d'assurer un avenir luxueux à sa chaîne de télévision El Rey Network, mais également un rebond salvateur après plusieurs échecs aussi bien en tant que metteur en scène que producteur, sur le grand écran.


L'annonce avait tout autant de quoi surprendre les cinéphiles que de les révolter au plus haut point, tant il est férocement ardu d'imaginer le sommet du Grindhouse qu'est Une Nuit en Enfer, supporter une remaniement télévisé sans la patte de Tarantino au script mais surtout sans ses premiers rôles follement iconiques (George Clooney, Quentin Tarantino, Harvey Keitel et Juliette Lewis) et ses seconds couteaux savoureux (Tom Savini, Fred Williamson, Salma Hayek et Danny Trejo) face caméra.
Conscient du potentiel casse-gueule de son entreprise et du lourd héritage – sujet évident au jeu des comparaisons - qu'elle doit porter sur ses frêles épaules, Rodriguez persiste pourtant et signe une adaptation pour le coup assez étonnante et induisant considérablement en erreur les spectateurs et amateurs du film original et ce dès son habile pilote, recyclant les cinq premières minutes de la cavale infernale des frères Gecko sur un tout petit peu moins d'une heure.

Pas forcément le crash annoncé malgré certaines longueurs et un jeu d'acteur approximatif, la saison 1 qui s’avère imprévisible comme le film de 1996 - mais en moins barré -, se fixe sur la même chronologie (12 heures) mais profite de sa durée plus conséquente pour se démarquer de son modèle et ainsi mieux dilater son intrigue pour explorer plus en détails les zones d'ombres laissées à l'abandon par le script d'un Tarantino visant l'efficacité immédiate et inhérente à toute série B qui se respecte.


La noirceur du ton et la psychologie des personnages s'en trouvent d'ailleurs bien plus riche, les troubles mentaux de Ritchie Gecko (Zane Holtz, mauvais) étant nettement plus prononcés tandis que plusieurs nouveaux personnages font leur apparition pour pimenter le tout, que ce soit le Ranger qui cherche justice Freddie Gonzalez et son mentor (campé par le grand Don Johnson), ou celui d'un meneur vampirique menaçant et charismatique (Wilder « Fez » Valderrama, méconnaissable).

Comme capturée en temps réel et plus axée sur ses personnages, alternant les passages obligés tout en ouvrant sur de nouveaux territoires inexplorés, citant quelques pistes des suites DTV - déjà avec Robert Patrick - et reproduisant certains plans connus de son illustre aîné; cette relecture prend finalement pleinement son ampleur lorsqu'elle se lance dans sa description d'une mythologie vampirique riche et joliment prenante, assimilant les suceurs de sang aux reptiles (Incas oblige) et non plus aux chauves-souris. Inattendue, pleine de qualités et porté par une esthétique assez luxueuse grâce à l'apport de plusieurs cinéastes habitués des B-movies (Rodriguez donc, mais également Eduardo « Le Projet Blair Witch » Sanchez, Dwight H. Little et Fede Alvarez, papa de l'excellent remake d'Evil Dead); Une Nuit en Enfer terminait sa première et honorable salve d'épisodes à l'instant même ou le premier film se clôt.


De quoi laisser présager une seconde saison totalement inédite et surtout complètement imprévisible, qui lui permettrait - peut-être - de définitivement s'affranchir d'une version cinéma à l'ombre écrasante et logiquement bien meilleure. Dite saison 2 qui ne répondra finalement jamais vraiment aux attentes que laissait présager cette « vraie  » suite au métrage originale, puisqu'elle n’exploite que trop peu son immense potentiel. Si elle fait intelligemment table rase du passé en s'attachant aux destins séparés - temporairement - des frangins Gueko et de la famille Fueller (Seth et Kate disparaissent au Mexique tandis que Richard et la bombe Santanico Pandemonium se décident à faire tomber les grands maitres de la nuit), elle se perd en revanche dans une accumulation de sous-intrigues inutiles, bavardes et extrêmement brouillonnes tant on peine clairement a définir aussi bien les motivations de certains personnages que leur intérêt pour l'intrigue; sans compter le jeu toujours aussi limité de la majorité du casting.

Des fragilités il est vrai déjà présentes au cours de la saison 1, mais ici bien plus prégnantes même si les scènes d'actions durs et jouissives, ajoutée à des nouveaux persos bien badass (l'inestimable Danny Trejo is back !) et une esthétique bricolé et faite maison; sauvent une seconde salve dont l'épilogue incarne sans conteste le meilleur épisode de la série, avec du cul, du sang et de la castagne qui tâche.


Un ultime run plein d'espoir pour les fans qui espèrent que la saison 3, également composée de dix épisodes, plongent pleinement dans le bis grindhouse aussi gore que bourrin et bandant à souhait.
 La balle est dans le camp de tonton Rodriguez, car même si la version télévisée de son film le plus culte est constamment coincée le cul entre deux chaises, elle n'en demeure pas moins très plaisante à suivre.


Jonathan Chevrier

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