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[CRITIQUE] : Vie Sauvage


Réalisateur : Cédric Kahn
Acteurs : Matthieu Kassovitz, Céline Sallette, David Gastou, Sofiane Neveu,...
Distributeur : Le Pacte
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Français.
Durée : 1h46min.

Synopsis :
Philippe Fournier, dit Paco, décide de ne pas ramener ses fils de 6 et 7 ans à leur mère qui en avait obtenu la garde.
Enfants puis adolescents, Okyesa et Tsali Fournier vont rester cachés sous différentes identités. Greniers, mas, caravanes, communautés sont autant de refuges qui leur permettront de vivre avec leur père, en communion avec la nature et les animaux.
Traqués par la police et recherchés sans relâche par leur mère, ils découvrent le danger, la peur et le manque mais aussi la solidarité des amis rencontrés sur leur chemin, le bonheur d'une vie hors système : nomades et libres.
Une cavale de onze ans à travers la France qui va forger leur identité.



Critique :

Depuis son très beau mais surtout très fort (puisque ancré dans une réalité sociale méchamment d'actualité) Une Vie Meilleure, l'excellent cinéaste Cédric Kahn (Roberto Succo, Regrets) était foutrement attendu au tournant par chez nous.

Surtout que pour son nouvel essai, le bonhomme s'est lancé dans un défi de taille : offrir une adaptation des plus cohérentes et crédibles de l'un des faits divers les plus incroyable de ces vingt dernières années : l'affaire Xavier Fortin.
Ou l'histoire vraie d'un père de famille condamné à deux ans de prison - dont vingt-deux ans avec sursis - pour avoir récupérer (ou plutôt kidnapper) onze ans plus tôt, ses deux fils âgés de six et sept ans, chez leur mère et sans ne jamais les ramener.

Le récent La Belle Vie de Jean Denizot avait déjà touché du bout de la pellicule ce fait divers, mais ici, Kahn et sa co-scénariste Nathalie Najem - s'inspirant librement aussi bien des livres de Catherine Marin que de Xavier Fortin, Shahi Yena et Okwari Fortin - se consacre entièrement (ou presque) sur la cavale rocambolesque à travers l'hexagone, du trio.


" Comment disparaître de la France avec deux enfants sous le bras, pendant plus de onze ans ? "

Un Cédric Kahn plus en forme que jamais, avec la partition d'une justesse incroyable d'un Matthieu Kassovitz habité et inspiré, y répond avec intelligence et puissance, offrant ni plus ni moins que l'un des meilleurs films français de l'année, ou une parfaite continuité à l'excellente forme du cinéma français en cette rentrée 2014 (pour preuve Maintenant ou Jamais, Hippocrate, Gemma Bovery, Saint Laurent, Samba,...).

Vie Sauvage donc, ou l'histoire de Philippe Fournier, dit Paco, qui décide de ne pas ramener ses fils de six et sept ans à leur mère qui en a obtenu la garde.
Enfants puis adolescents, Okyesa et Tsali Fournier, vont rester cachés sous différentes identités.
Greniers, mas, caravanes, communautés sont autant de refuges qui leur permettront de vivre avec leur père, en parfaite communion avec la nature et les animaux.

Traqués par la police et recherchés sans relâche par leur mère, ils découvrent le danger, la peur et le manque mais aussi la solidarité des amis rencontrés sur leur chemin, le bonheur d'une vie hors système : nomades et libres.
Une cavale de onze années à travers la France qui va forger leur identité.


Magnifique drame familiale doublé d'un film d'aventure sous forme de quête identitaire en mode cavale, l'intrigue de Vie Sauvage, nourrie d'ellipses, d'une mise en scène et d'une direction d'acteur remarquable, est d'une richesse inouïe.

Profondément passionné et politique dans son opposition parfaite entre la rat des villes et rat des champs, Kahn fait de son œuvre un véhicule pertinent à la question de la " normalité " et de la " marginalité " qui nourrit la société depuis toujours, tout autant qu'une interrogation sur l'impossibilité d'une telle utopie dans le monde contemporain.

Citant directement le premier film du cinéaste, Roberto Succo (la cavale à travers la France d'un marginal, certes ici loin d'être un meurtrier schizo) et intelligemment scindée en deux parties bien distinctes, la péloche se pose constamment à la hauteur des enfants, même si la figure paternelle - patriarche devenu marginal par acte de resistance et hors-la-loi par idéal éducatif - parait hautement plus fascinante et forte.

La première, véritable hymne à la liberté et à la nature, s'impose comme une initiation à la découverte de la vie et de la liberté, dans une fuite en avant contemplative dont certaines images et plans,  démontre une forte inspiration au cinéma du précieux Terrence Malick.
La seconde elle, nettement plus dramatique et tendue, axée sur l'adolescence des deux fils, période de doute et de remise en question constante, bascule dans un duel de force entre le patriarche et sa descendance.


Peu à peu, face à ses enfants qui veulent gouter à la supposée normalité que le mode autarcique de leur quotidien jadis cocon de liberté, aujourd'hui carcan sans barreaux, leur interdit, il dévoilera son autre visage, bien plus fort et menaçant, celui d'un père implacable et égoïste.
Dans la peau de Xavier Folin (ici renommé Paco), Matthieu Kassovitz, plus impliqué et habité que jamais, y trouve son meilleur rôle tandis que la jolie Céline Salette est étonnante dans la peau de la mère de famille, que l'on ne voit pourtant que très peu au début et à la fin du métrage.

Si l'on peut regretter un rythme un poil en dent de scie surtout en milieu de film, Vie Sauvage n'en reste pas moins une sublime et radicale fuite en avant face à la normalité imposé par une société consumériste, une bande sur le doute et la clandestinité aussi joliment intime que politique.

De quoi avoir envie de suivre avec un intérêt non-feint, la suite de la carrière de l'excellent Cédric Kahn...


Jonathan Chevrier


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