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[CRITIQUE] : Fastlife


Réalisateur : Thomas Ngijol
Acteurs : Thomas Ngijol, Karole Rocher, Julien Boisselier, Olivier Marchal, Kaaris,...
Distributeur : Europa Corp
Budget : -
Genre : Comédie.
Nationalité : Français.
Durée : 1h31min.

Synopsis :
FASTLIFE : aller toujours plus loin, plus vite, pour briller aux yeux des autres : telle est la devise de Franklin. Franklin est un trentenaire mégalomane obnubilé par l’envie de briller à n’importe quel prix. Il devra choisir entre devenir un homme ou continuer à vivre la Fastlife.



Critique :

On a beau se répéter sans cesse que ce n'est pas un bien de tirer à tue-tête sur l'ambulance de la comédie populaire française, mais force est d'admettre que mis à part quelques fulgurances en 2014 (Les Trois Frères - le retour, Babysitting, Situation Amoureuse : C'est Compliqué, Les Gazelles), cette dernière cherche méchamment à se faire plomber le cul.
Pire, elle aurait même fortement tendance à charger notre mitraillette et à nous la pointer dans sa propre direction, comme une bête agonisante cherchant à ce que sa dernière heure soit la plus courte possible, pour preuve ces succès populaires pas franchement compréhensibles vus leurs qualités assez limitées (Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu passe encore, mais Supercondriaque, really ?).

Et alors que ces dernières semaines, les comédies françaises ont oscillé entre le vraiment sympa (Amour sur place ou à Emporter, Libre et Assoupi) et le très décevant (Sous les Jupes des Filles, L'Ex de ma Vie), la programmation en salles nous offre cette semaine un petit répit venant d'un comique que l'on affectionne tout particulièrement, Thomas Ngijol, avec l'alléchant Fastlife, ou sa première réalisation perso.


Jamais aussi bon que lorsqu'il est associé à Fabrice Éboué, le bonhomme nous revient donc pile poil cinq mois après le certes pas dénué de défauts mais désopilant Le Crocodile du Botswanga (un poil en deçà de l'excellent Case Départ cependant), premier essai solo d’Éboué derrière la caméra, et surtout joli petit succès hexagonal du début d'année dans les salles obscures.
Toujours dans l'optique de creuser un petit peu plus le sillon de la comédie aiguisée et intelligente made in France, il s'attaque cette fois-ci à la chronique d'un sportif, incarnation parfaite du connard prétentieux, qui va devoir arpenter le long chemin de la rédemption pour gouter de nouveau aux joies de la réussite.

Ou l'histoire de Franklin Ébagé, trente-quatre ans, ancien vice-champion olympique du 100 mètres qui ne s'est jamais remis d'être monté une fois sur le podium mondial, et qui est obnubilé par l'envie de briller et ce, à n'importe quel prix.
Mégalomane à la limite de la pathologie, il est resté perché sur son moment de gloire.
Après s'être ridiculisé lors d'une nouvelle compétition et avoir été plaqué par sa compagne qui n'en pouvait plus de ses excentricités, il retourne dans son pays d'origine, le Cameroun.
Là-bas, il tentera de dégonfler un maximum son melon et de se préparer au mieux pour les futurs Jeux Olympiques...


Autant dire que l'on était franchement curieux de voir comment Ngijol se débrouillerait tout seul dans son aventure derrière la caméra, sans Fabrice Éboué, le second ne s'étant pas si mal tiré que cela dans le fond.
Séparé donc mais même constat au final, Fastlife emmagasine beaucoup de lacunes, tout comme Le Crocodile du Botswanga, et souffre pleinement de la comparaison avec Case Départ -quand les deux comiques n'étaient pas l'un sans l'autre -, tout en incarnant une péloche hautement attachante et fédératrice, qui critique l'ego surdimensionné de certains sportifs, mais surtout qui parle à une certaine génération, celle justement, de la " Fastlife ".
Ou la génération actuelle du " tout pour briller ", accro à la célébrité même express et qui cherche par tous les moyens de se mettre en avant, que ce soit à la télévision au sein de diverses télé-réalités ou à travers les réseaux sociaux.

Un nombrilisme effarant que Ngijol personnifie avec Franklin, un narcisse imbu de sa personne et de ses compétences, qui ne jure que par le bling-bling et le cash, quitte à sombrer dans le ridicule le plus absolu.
Une Nabila de l'athlétisme de haut niveau en gros, chez qui le Swagg est plus un mode de vie qu'autre chose.
Ce sprinter loser qu'il campe à la perfection, Thomas Ngijol - auteur du script, réalisateur et acteur principal -, se fait un malin plaisir de ne lui faire aucun cadeau, n'hésitant jamais à le faire tomber très bas, toujours via une autodérision judicieusement maitrisée - tout autant que ses vannes calibrées et référencées -, et son (un brin répétitif) comique de situation.
Ne cherchant jamais à se mettre en valeur, et encore moins à rendre son personnage sympathique (ce qui rend de facto, sa quête de rédemption encore plus ardue), le jeune cinéaste enchaine les scènes grotesques à la pelle et force constamment le trait.


Trop peut-être d'ailleurs, au point de rendre sa médiocre star de supermarché franchement détestable parfois - il trompe, déçoit et ment à ses proches -, tant il est difficile d'avoir la moindre indulgence ni de s'attacher à un personnage aussi antipathique et exaspérant, un antihéros à la lourdeur gênante qui met trop longtemps à réaliser la grosse tache qu'il est devenu.
Un mauvais point (volontaire ?) fortement dommageable, qui permet en revanche de s'arrêter un peu plus sur les seconds couteaux du métrage, tous d'exception (excepté les apparitions évitables du rappeur Kaaris), que ce soit la naturelle Karole Rocher dans le rôle de la petite amie du héros, Olivier Marchal - étonnement convaincant et drôle en sponsor roi des éleveurs de poulets - ou encore Julien Boisselier, excellent dans la peau de son agent.

Aux rayons des défauts, on pourrait même également méchamment reprocher à Fastlife son classicisme et son manque d'originalité profond - on est face à une banale descente aux enfers avant la renaissance prévisible et attendue -, citant clairement (voire abusivement) le Fatal de Michael Youn - ou figurait déjà Éboué - mais également dans une moindre mesure, la franchise Rocky, même si le célèbre boxeur est nettement plus empathique que Franklin.
Un peu brouillon, inégal (le retour aux sources téléphoné entre autres), manquant cruellement de rythme et peinant franchement sur la longueur (la faute à un découpage assez maladroit) mais joliment attachant, honnête, contemporain et drôle dans le fond et bien plus riche qu'il en a l'air, Fastlife n'a évidemment pas la même force que ses deux ainés Case Départ et Croco du Botswanga, mais a le mérite de ne jamais trahir ses intentions et le public qu'il vise de tout son long.


Les spectateurs de comédies exigeantes seront certainement laissés sur le carreau à l'issue de sa vision, les autres trouveront le tout suffisamment divertissant pour passer un très bon moment.
Reste à savoir dans quel camp on se trouve - le cul entre deux chaises est également une possibilité -, mais il est évident qu'ensemble, le duo Éboué/Ngijol vise infiniment plus juste et à tendance à nettement moins s'éparpiller...


Jonathan Chevrier



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