[CRITIQUE] : Tron : Ares
Réalisateur : Joachim Rønning
Acteurs : Jared Leto, Greta Lee, Evan Peters, Gillian Anderson, Jodie Turner-Smith, Jeff Bridges,...
Budget : -
Distributeur : The Walt Disney Company France
Genre : Action, Science-fiction.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h59min
Synopsis :
L'étonnante aventure d’un Programme hautement sophistiqué du nom de Ares, envoyé du monde numérique au monde réel pour une mission dangereuse qui marquera la première rencontre de l'humanité avec des êtres dotés d'une intelligence artificielle…
Suite tardive d'un Tron : Legacy de Joseph Kosinski qui était déjà lui-même, une suite tardive et malade au film original, Tron : Ares du yes man maison Joachim Rønning (Pirates des Caraïbes : La Vengeance de Salazar, Maléfique : Le Pouvoir du Mal et Face à la mer : L'Histoire de Trudy Ederle), partait cela dit du bon pied d'un point de vue thématique, en renversant le paradigme à l'origine de toute la saga, voire même son principe essentiel : c'est désormais au monde numérique - aka la Grille, le royaume virtuel des programmes informatiques conscients de Tron - d'envahir notre monde, et non plus l'humanité qui vient faire mumuse dans le sien.
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Le champ des possibles était alors gentiment ouvert, tant même pour un blockbuster, se troisième film aurait pu incarner une exploration entraînante sur la percussion brutale de deux mondes dissemblables, comme une réflexion pertinente sur une société contemporaine ou l'intelligence artificielle se fait de plus en plus omniprésent - voire, qui sait, celle d'une IA qui s'affranchit des griffes numériques d'un créateur technophile, dans l'ombre de Ex_Machina.
Nous sommes sacrément naïfs (restons poli cher lecteur, s'il te plaît), pas vrai ?
Sans surprise, Joachim Rønning privilégie la voie turbo-débile d'un Jurassic World (entreprises imprudentes + créations rebelles : fatigue absolue), qui s'appuie autant sur les acquis de ses aînés (tout son imaginaire se base sur les deux premiers films) que sur des clichés éculés (coucou Roy Batty) et une morale au manichéisme totalement exacerbé, à travers une narration qui réussit la prouesse d'être encore plus légère que ses aînés, vissée sur une course au McGuffin gentiment absurde qui lance des quelques pistes intéressantes, sans se donner les moyens de les approfondir un minimum.
Sam Flynn hors des radars, ENCOM est désormais dirigée par Eve Kim, une génie de la technologie (une brillante programmeuse qui est également une joueuse extrêmement talentueuse, pour ne rien gâcher à son CV) qui, poussée par la mort de sa sœur, tout aussi brillante et obsédée par la disparition de Kevin Flynn, se lance dans la quête du « code de permanence », un fragment de code inventé par Flynn pour permettre aux éléments de la Grille d'exister de manière stable dans le monde réel, sans limite de temps et via une immense imprimante 3D (true story).
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Son principal concurrent, Julian Dillinger - le petit-fils d'Ed Dillinger, vilain du film original -, est lui aussi à la recherche du code (Ève souhaite partager ce savoir avec le monde entier, Julian concentre son attention uniquement sur la création de matériel militaire et de contrôle de l'IA) et n'hésite pas à recourir à l'espionnage industriel pour l'obtenir, en piratant l'ordinateur central d'ENCOM grâce au programme de sécurité innovant Ares.
Mais ce dernier, catapulté dans le monde réel et pris de compassion pour Eve, à la différence de sa complice Athena, propose de la protéger en échange de l'utilisation du code pour le ramener à la vie...
Méchamment bordélique dans sa manière de reprendre une grosse partie de l'intrigue de Legacy, tout en pensant qu'une esthétique cyberpunk suffit à elle seule à faire oublier une intrigue sans substance et presque blasée (non, catapulter la Grille sur terre ne rend pas la chose plus humaine), Ares est une expérience sensorielle qui repose uniquement sur une action percutante (et lisible, au montage étonnamment précis pour un blockbuster autant chargé en CGI) et un score palpitant de Nine Inch Nails (qui, à l'instar de Daft Punk, vient relever la fadeur ambiante, quand les séquences musclées appuient sur la touche Off), dénué de toute finesse et encore plus d'émotion, dont la morale prévaut de soutenir la propriété intellectuelle du gentil milliardaire face à celle du méchant milliardaire.
Pire, aucun des personnages n'a de réelle profondeur pour donner l'impression de n'être autre chose que des coquilles vides algorithmiques qui débitent des dialogues risibles (qui surexpliquent une intrigue prévisible qui n'en avait absolument pas besoin), même avec une distribution résolument impliquée (si Leto est aussi expressif qu'une huître ouverte en Jésus numérico-codé - ce qui est parfait pour la platitude du personnage, cela dit -, Jodie Turner-Smith en impose via une prestation merveilleusement nuancée qui laisse transparaître comment les émotions d'Athena entrent totalement en conflit avec sa programmation; idem du côté d'une Greta Lee qui fait plutôt bien marché son imagination malgré les limites évidentes de son rôle).
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Techniquement solide mais narrativement - comme émotionnellement - inerte, Tron : Ares a tout d'un bolide rutilant dont on admire la mécanique sans jamais réellement s'emballer pour lui, au coeur d'une course du blockbuster moderne dont il est un énième programme algorithmique qui exécute ses commandes sans inspiration ni (en)vie.
Game Over, comme un bon Terminator des années 2010.
Jonathan Chevrier