[CRITIQUE] : À Feux Doux

Réalisateur : Sarah Friedland
Acteurs : Kathleen Chalfant, Katelyn Nacon, Carolyn Michelle Smith, H. Jon Benjamin,...
Distributeur : Arizona Distribution
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h30min.
Synopsis :
Élégante octogénaire, Ruth Goldman reçoit un homme à déjeuner. Alors qu’elle pense poursuivre le rendez-vous galant vers une destination surprise, elle est menée à une résidence médicalisée.
Portée par un appétit de vivre insatiable et malgré sa mémoire capricieuse, Ruth s’y réapproprie son âge et ses désirs.
Alors que nous tentons d’évoluer dans notre perception du monde pour une meilleure inclusion (quitte à énerver en chemin des petites natures aimant se plaindre du bon vieux temps), la question de l’âgisme reste encore à aborder au vu du regard que l’on peut poser sur nos aînés. Ainsi, la façon de filmer les personnes d’un certain âge peut se trouver par moments dans un pathos jugeant, captant le corps « vieux » dans ses imperfections et dans un jugement qui peut s’avérer contreproductif quand on veut aborder cette période de vie avec une approche plus douce et empathique.
Cet aspect est peut-être l’un des points forts de À Feux Doux : interroger cette perception de la personne âgée sans tomber dans le désespoir commercial qui peut entourer cette figure. Ici, Sarah Friedland nous amène directement un affect envers Ruth Goldman, filmant sa demeure comme un vrai foyer ensoleillé. La discussion qui suit avec un rendez-vous galant apparent amène alors une forme de gêne, l’inconfort de son partenaire étant palpable avant que ne se révèle la vérité sur la situation. Dès lors, le long-métrage essaiera de replacer Ruth dans un autre quotidien, celui d’un foyer d’accueil qui évite de tomber dans le désespoir courant qui peut ressortir de pareil endroit.
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Copyright Arizona Distribution |
Cette réadaptation se fera sans jugement, sans violence et sans appréhension que celle d’une protagoniste qui se rend par moments compte de la situation. Le rapport à la mémoire est bien entendu évident mais c’est surtout un appel à l’empathie qui ressort, sans diminuer la personne malade mais en la valorisant. La mise en scène va accentuer cet état de fait, ainsi qu’une photographie assez douce et chaleureuse pour revoir la question du quotidien à réadapter. On aurait pu craindre un propos boomerisant, notamment dans un plan impliquant des casques de réalité virtuelle, mais le film s’avère plus malin et fin dans son écriture, sans omettre la cruauté d’un temps qui passe.
La grande délicatesse de À Feux Doux est alors ce qui nous convainc de la beauté discrète de pareille œuvre. Pour son premier passage au format long-métrage fictionnel, Sarah Friedland capte la douceur et la beauté sans omettre un seul instant la tristesse qui peut poindre dans cette réadaptation, « coming of old age » comme elle l’a déclaré en promotion avec un affect jamais trop en retenue et tout en sincérité. L’émotion qui ressort durant notre visionnage est alors d’une franchise totale sans que cela ne semble surjoué ou surappuyé. Si toute œuvre parlant de vieillesse pouvait être aussi affable que celle-ci, le monde ne s’en porterait sans doute que mieux.
Liam Debruel