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[CRITIQUE] : Once Upon A Time in Gaza


Réalisateurs : Arab et Tarzan Nasser
Avec : Nader Abd Alhay, Majd Eid, Ramzi Maqdisi, Is’haq Elias,...
Distributeur : Dulac Distribution
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Palestinien, Français, Allemand, Portuguais.
Durée : 1h27min

Synopsis :
Il était une fois, à Gaza en 2007. Yahya, étudiant rêveur, se lie d’amitié avec Osama, dealer charismatique au grand cœur. Ensemble, ils montent un trafic de drogue, caché dans leur modeste échoppe de falafels. Mais ils croisent le chemin d’un flic corrompu venu contrarier leur plan.




Il y a quelque chose de puissant et de profondément déchirant dans l'idée que, même au coeur de l'horreur de la guerre, le désir de créer, de partager des histoires (même lorsqu'ils ne restent plus que cela) demeure, quand bien même l'art et son expression sont presque futiles face aux tourbillons de destructions et de meurtres.

Et la souffrance humaine, comme les destructions, sont absolument incommensurables dans un conflit israélo-palestinien dont les médias (à la vision indiscutablement partiale et révoltante) relativisent et minimisent grandement - pour rester poli - les ravages.

Copyright Dulac Distribution

En ce sens, une œuvre même fictionnelle telle que Once Upon A Time in Gaza du talentueux tandem Arab et Tarzan Nasser (le magnifique et romantique Gaza Mon Amour), adoubé par la dernière Croisette, est un effort au-delà de l'essentiel, gravé dans le marbre de la pellicule et du septième art, l'expression de la résistance d'une culture que l'on cherche à éradiquer et qui voit toute création comme un vrai acte de protestation politique.

Avec cette terreur militaire réelle et oppressante en toile de fond, dans une Gaza instable qui a tout d'un vrai personnage à part entière de l'histoire, les deux frangins cinéastes concoctent une œuvre hybride, volontairement fragmentée, loucher tout autant du côté du néo-noir, de la comédie politicio-sociale consciemment décalée et du western (et ce dès son titre, qui convoque aussi bien le cinéma de Sergio Leone, que l'idée de l'évocation d'un passé d'une ville croulant désormais sous les bombes), flanquant sa narration un temps au cœur de l'année 2007, dans la continuité de la victoire démocratique du Hamas, au plus près de deux amis - Yahya, un étudiant qui rêve de quitter Gaza et Osama, un dealer charismatique et roublard - se lançant dans l'entreprise risquée d'un trafic de contrebande d'analgésiques, caché dans leur modeste échoppe de falafels, mais loin d'être à l'abri des regards.

Notamment celui d'un flic corrompu, incarnation parfaite de la figure d'autorité dans un territoire assiégé, bien décidé à saboter leur business quitte à convoquer le sceau de la Grande Faucheuse.
Dans un second temps, la narration s'évade en 2009 et prend un ton résolument plus métaphorique et sardonique, avec un Yahya catapulté en wannabe star de cinéma, en vedette d'un film d'action palestinien, Rebel, itinéraire artificiel d'un « symbole national » pour laquelle il a été choisi par ressemblance à une figure militante valorisée...

Copyright Dulac Distribution

Sans doute un poil déséquilibré - et définitivement loin d'être subtil - dans sa manière de vouloir conjuguer une exploration de l'existence sous pression et à la violence omniprésente au cœur d'une zone de conflits sans horizon, mais aussi une réflexion sur le cinéma et la nature même de la représentation de la réalité en temps de guerre (où la vérité croule souvent sous l'artifice), mais tirant pleinement sa force dans la dynamique entraînante vivante entre ses personnages nuancés; Once Upon A Time in Gaza se fait une expérience à la fois poignante et désabusée, lucide et ironique, puissant et tragique, qui ne pèche véritablement que dans son rythme décousu.

Pas de quoi cependant, gâcher sa (très) belle découverte.


Jonathan Chevrier