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[CRITIQUE] : Cloud

Réalisateur : Kiyoshi Kurosawa
Acteurs : Masaki Suda, Kotone Furukawa, Daiken Okudaira, Amane Okayama,...
Distributeur : Art House
Budget : -
Genre : Action, Thriller.
Nationalité : Japonais.
Durée : 2h03min.

Synopsis :
Ryosuke plaque tout pour vivre de la revente en ligne. Mais bientôt, certains clients menaçants resserrent l’étau autour de lui sans qu’il en comprenne les raisons. Son rêve d’indépendance vole en éclats. Dans un Japon hyperconnecté, fuir est impossible. Surtout quand on ignore les règles du jeu.




Dans la catégorie des cinéastes prolifique à l'esprit aussi créatif qu'hyperproductif, Kiyoshi Kurosawa se pose là d'une manière assez unique, quel bonheur alors de se dire qu'il hanter nos salles définitivement pas assez obscures, ses prochaines semaines, avec Chime (déjà distribué depuis une bonne semaine, ne traînez pas pour le découvrir) Cloud (fraîchement en salles), mais aussi et surtout avec son auto-remake improbable mais alléchant de La Voie du serpent.

On est férocement gâté donc, et le mot est faible.

Mais revenons-en à nos moutons et à Cloud, peut-être un effort encore plus impressionnant et grisant que le précédent (et librement inspiré d'une histoire vraie, pour ne rien gâcher), œuvre protéiforme qui s'amuse consciemment à brouiller les pistes avant un changement de braquet aussi brutal que génial, laissant volontairement - pour un temps - dans le flou un auditoire ne sachant pas vraiment à quoi s'attendre là ou le film semblait pourtant partir sur une histoire plus que banal... comme un peu tous les efforts du papa de Pulse, en somme.

Copyright Art House

Comme souvent, le cinéaste s'amuse à jongler avec les genres et les ambiances tel un funambule qui n'a jamais peur de trébucher, n'hésitant pas à transformer ce que l'on prenait pour une chronique lancinante et abstraite sous fond de cupidité et d'orgueil, d'un escroc du web (dont le surnom est « Ratel », le serpent à sonnette, qui n'aura aucun mal à se faire des ennemis sur un territoire numérique qu'il pensait arpenter sans encombre) d'où émerge sans effort une critique acerbe des ravages comme de la dangerosité du monde 2.0 (à la violence aveugle, cachée sous le sceau fragile et égoïste de l'anonymat), en un véritable film de thriller psychologique âpre et noir façon western savoureusement surréaliste et creepy dans un Japon hyperconnecté, tout autant riche en tension qu'en action.

Frappé d'une logique sèche et brutale, aussi maléfique qu'algorithmique, où le cinéaste fustige avec une ironie macabre, l'absurdité d'une société contemporaine elle-même de plus en plus grotesque et malade, Cloud se fait une œuvre profondément fataliste et excentrique (notamment dans sa manière de sonder l'anéantissement spirituel et humain du monde où aucune rédemption n'est possible, à travers la relation floue que l'on entretient tous avec la réalité et le virtuel), une énième pépite incontournable pour un cinéaste qui les aligne à la pelle.

L'été ciné 2025 est, définitivement, l'été de Kiyoshi Kurosawa.


Jonathan Chevrier