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[CRITIQUE] : Monk, le retour


Réalisateur : Randy Zisk
Acteurs : Tony Shalhoub, Ted Levine, Traylor Howard, Melora Hardin, Laura Birn, Caitlin McGee, Jason Gray-Stanford, Hector Elizondo, James Purefoy,...
Distributeur/Diffuseur : TF1/Peacock
Budget : -
Genre : Comédie, Policier.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h30min

Synopsis :
Après que la pandémie a aggravé ses phobies et lui a fait perdre son contrat avec son éditeur, l'ancien inspecteur Adrian Monk place tous ses espoirs dans la réussite du mariage de sa belle fille Molly. Natalie Teeger et Randy Disher reviennent à San Francisco pour la cérémonie et les joyeuses retrouvailles tournent rapidement à la tragédie lorsque Griffin, le fiancé de Molly, meurt dans un accident de saut à l'élastique. Molly, qui soupçonne un acte criminel, demande l'aide de Monk et de l'équipe...



Critique :



Quoiqu'on en dise, la merveilleuse (oui) série Monk a toujours été cohérente avec elle-même (quitte à recycler de manière redondante, il est vrai, sa fructueuse formule qui visait à continuellement placer son anti-héros Adrian Monk, dans des situations toujours plus inconfortables pour pimenter l'aspect linéaire de ses enquêtes) et, à la différence de beaucoup d'autres dramédies procédurales des années 2000/2010, elle a su aborder son ultime virage avec autant de sérénité que de justesse et de délicatesse, ce qui n'a fait que renforcer l'amour et la compassion que l'on pouvait ressentir pour le personnage, magistralement incarné par le génial Tony Shalhoub.

À tel point que, même si la nostalgie se fait toujours imposante en ce qui concerne les séries avec lesquelles nous avons plus où moins grandit, l'idée d'un hypothétique retour ne nous titillait pas plus que cela, d'autant plus qu'elle entrerait pleinement en confrontation avec sa conclusion quasi-parfaite.

Copyright Peacock

Mais Hollywood oblige, tout produit un tant soit peu populaire n'est mort que s'il est suffisamment enfoncé dans la terre pour ne pas être déterré, et Monk ne l'était pas assez, loin de là même.
Mr. Monk's Last Case: A Monk Movie aka Monk, le retour par chez nous (pourquoi s'emmerder ?), ramène donc le bonhomme sur le devant de la scène, avec la plupart des personnages phares de la série, pour jeter à la poubelle à la fois sa magnifique conclusion, mais également toute la cohérence du personnage sur pas moins de huit saisons et 125 épisodes... damn.

Flanqué une bonne décennie après les événements du dernier épisode qui voyait Monk enfin retrouver le meurtrier de sa bien-aimée Trudy - tout en se découvrant une belle-fille, Molly -, on retrouve le bonhomme a une période sombre où le monde pré et post-Covid n'a définitivement pas été tendre avec lui - ses mémoires ayant été bazardés par sa maison d'édition, il n'a plus les moyens de payer le mariage de Molly, ce qui l'enfonce encore un peu plus dans la déprime au point qu'il envisage même sérieusement le suicide, à plusieurs reprises, à tel point que le fantôme de Trudy doit intervenir à plusieurs reprises pour l'empêcher de commettre l'irréparable.
Il retarde cependant un temps ses plans lorsqu'il se retrouve impliqué dans la résolution d'une dernière affaire au nom de Molly - l'assassinat de son futur époux, justement.

Copyright Peacock

Et c'est sans doute, assurément même, que toute la fragilité de cet édifice mémoriel pointe douloureusement le bout de son nez, au-delà même d'une tristesse sourde de la situation d'un Monk finalement plus seul et mal que jamais : une enquête prétexte et artificielle, une pâle imitation de ce que le show avait déjà pu offrir par le passé, étirée sur le double de temps d'un simple épisode sans jamais avoir une véritable colonne vertébrale narrative pour la soutenir.
Coincé le fessier entre trois fauteuils, celui d'un au-revoir inutile (c'est sa dernière affaire, qui fait suite à la plus importante de toute son existence), d'une renaissance inespérée et obligée (il est rappelé pour une dernière affaire !) et de rerrouvailles aussi expéditives qu'anecdotiques; le tout dans une reprise opportuniste d'un arc fort de la série : le désespoir profond de Monk dans le bouleversant (et paradoxalement hilarant) épisode de la saison 3, Mr. Monk Takes His Medicine.

Un épisode charnière (peut-être le plus beau de la série) qui voyait l'enquêteur faire réapparaître sa femme, où plutôt l'image qu'il gardait d'elle, le temps d'une conversation où il lui partageait sa peine face à son existence vide de sens et désespérée sans elle, tandis qu'elle lui répondait ce qu'il pensait qu'elle lui donnerait comme réponse en retour.

Copyright Peacock

Tout Mr. Monk's Last Case: A Monk Movie tente, sans jamais y parvenir, de reproduire cette douleur palpable, cette lassitude profonde d'un homme à la sincérité déchirante, plongé dans les abîmes d'une existence qui n'est que survit et attente, quand bien même il se doit de rendre justice à travers des affaires qui ne seraient jamais résolues sans lui et son excentricité.
Un homme loufoque mais attendrissant, motivé par l'idée de déjouer toutes les énigmes - même celle de la vie - qui tombent devant ses yeux, un sacré détective à la rigidité au moins égale à sa droiture et a son penchant maniaque pour la propreté,ais cette ultime épisode ne joue jamais sur cette satisfaction de vouloir prouver qui est le tueur, dévitalisant une part de l'identité même de son anti-héros... et de la série.

Car en rendant caduque sa conclusion pour lui offrir un improbable avenir - et un retour à son statut d'enquêteur -, Last Case lui retire le plus beau cadeau que lui avait offert le final de la série et la découverte de l'existence de Molly : la possibilité d'enfin vivre sa vie, et non plus supporter son fardeau.
Pire qu'un rétropédalage, le téléfilm, qui n'a d'ailleurs aucune ambition cinématographique pour être plus que cela, le ramène dans les limbes (un monde post-Covid qui l'a brisé) sans même proposer quoique ce soit d'original où d'un tant soit peu perspicace, annihilant même toute idée de réconfort nostalgique face au fait de le retrouver une dernière fois (ou pas) à l'écran.

Copyright Peacock

S'il y avait toujours un petit air jazzy et tragique dans Monk (cette idée folle que le plus brillant des détectives, capable de tout résoudre, n'arrivait pourtant pas à trouver le meurtrier de sa propre femme), constamment contrebalancé par un humour complice, Mr. Monk's Last Case: A Monk Movie pousse le merveilleux Adrian au bord du précipice avec pour seul bouée de sauvetage, l'esprit bafoué de l'amour de sa vie, transformée en une Patrick Swayze/Sam Wheat du pauvre avant de devenir un être de lumière à la Charmed, ramenant devant lui toutes les victimes des enquêtes qu'il a pu mener.

Définitivement l'enquête télévisée de trop, et le mot est faible.


Jonathan Chevrier





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