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[CRITIQUE] : Eileen

Réalisateur : William Oldroyd
Avec : Thomasin McKenzie, Anne Hathaway, Shea Whigham, Marin Ireland,...
Distributeur : -
Budget : -
Genre : Drame, Thriller.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h38min

Synopsis :
Dans les années 60, une jeune femme d'une vingtaine d'années travaille dans une prison pour homme aux abords de Boston est impliquée dans un crime étrange.




Critique :



La faute à une bande annonce pas franchement engageante (et une sortie en catimini par la case VOD, après un accueil public assez glacial sur ses terres en fin d'année dernière), Eileen de William Oldroyd avait tout, sur le papier, du total package du thriller/drame psychologique tellement calibré que rien ne dépasse du cadre, pas même une hypothétique excentricité qui aurait tout du risque savamment calculé.

Une fausse impression que vient intelligemment corrigé la vision du film, adaptation du roman éponyme d'Ottessa Moshfegh, qui ne cherche pas tant à révolutionner le genre dans ses tressaillements passionnels et sa tension, qu'à engager un vrai jeu ludique avec son auditoire, l'intimant presque à deviner quelle direction il s'apprête à prendre après chacun de ses rebondissements - et ce sans jamais prendre les contours du film qui se pense/sait plus malin que ceux qui le regarde.

Copyright Jeong Park

Catapulté dans le Boston des 60s, l'histoire s'attache à la rencontre puis à la relation intime entre la commis d'une prison locale, Eileen, et l'ultra-glamour Rebecca, la première étant littéralement obsédé par la seconde, à tel point qu'il devient presque difficile de dire si elle veut simple être avec Rebecca, ou être Rebecca.
Très vite, les deux femmes se laissent tenter par l'idée de suivre les pires pulsions de l'autre, jusqu'à ce qu'elles se retrouvent complètement dépassées par celles-ci...

Du cousu de fil blanc en apparence, mais que le scénario, tout comme la mise en scène et sa direction d'acteurs (tous les comédiens, impliqués, sont sur la corde raide, d'une Thomasin McKenzie imposante à une Anne Hathaway merveilleusement vénéneuse et hitchcockienne), garde le plus tendu, sec et opaque possible, tirant pleinement sa force dans sa concision, dans son incroyable souci du moindre détail, dans la douce ironie macabre qui se loge dans le point de vue subjectif et ambivalent de sa figure centrale, qui permet au cinéaste de brasser de nombreux thèmes fascinant (dynamique de pouvoir, traumatisme et dysfonctionnement familial,...)

Copyright NEON

Thriller pulp sauce jeu du chat et de la souris psychologique et psychosexuel, Eileen, qui aurait sans doute (du chipotage) mérité un peu plus d'éclat dans sa conclusion, n'en reste pas moins un vrai bout de cinéma malicieux et dérangeant aux jolies nuances gothiques, gentiment dans l'ombre d'Hitchcock et Todd Haynes, et dont la dénonciation sourde des ravages du patriarcat et de l'oppression féminine, fait bien plus de boucan que du côté d'un cinéma dit plus populaire (coucou Barbie).


Jonathan Chevrier