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[TOUCHE PAS NON PLUS À MES 90ϟs] : #153. The Glimmer Man

Photo by Warner Bros. Pictures - © 1996

Nous sommes tous un peu nostalgique de ce que l'on considère, parfois à raison, comme l'une des plus plaisantes époques de l'industrie cinématographique : le cinéma béni des 90's, avec ses petits bijoux, ses séries B burnées et ses savoureux (si...) nanars.
Une époque de tous les possibles où les héros étaient des humains qui ne se balladaient pas tous en collants, qui ne réalisaient pas leurs prouesses à coups d'effets spéciaux et de fonds verts, une époque où les petits studios venaient jouer dans la même cour que les grosses majors légendaires, où les enfants et l'imaginaire avaient leurs mots à dire,...
Bref, les 90's c'était bien, tout comme les 90's, voilà pourquoi on se fait le petit plaisir de créer une section où l'on ne parle QUE de ça et ce, sans la moindre modération.
Alors attachez bien vos ceintures, prenez votre ticket magique, votre spray anti-Dinos et la pillule rouge de Morpheus : on se replonge illico dans les années 90 !




#153. L'ombre Blanche de John Gray (1996)

Il y a une époque pas si lointaine (bon si quand-même un peu), ou voir Steven Seagal en tête d'affiche d'un B movie ne prêtait pas forcément à rire, et attirait même plus que l'intention des amateurs de cinéma burnés que nous sommes.
Une époque bénie où le bonhomme n'avait pas encore mangé tous ses clones (où toute sa famille, au choix) et n'était pas encore totalement bouffé par son narcissime démesuré, une époque où il pouvait encore se fighter avec un minimum de grâce - et pas de graisse - et surtout, où il pouvait décemment incarner un action man de seconds plan solide, gentiment intercalé entre un Chuck Norris vieillissant et un Michael Dudikoff pas forcément crédible.

Aujourd'hui, quand il ne traine pas péniblement sa bedaine dans des productions d'Europe de l'Est aux montages épileptiques, pétant vainement du bras entre deux usines à yaourt désaffectées bulgares avec un regard crispé - et à la limite de la constipation -, le Saumon Agile pousse la chansonnette - très bien d'ailleurs - et joue même les ambassadeurs humanitaires pour la Russie - moins bien.

Photo by Warner Bros. Pictures - © 1996

La vieillesse ça fait mal, et le statut d'has been à Hollywood encore plus, surtout qu'il ne s'est jamais réellement donné les moyens de revenir convenablement sur le devant de la scène, même s'il a cherché à la jouer tendance au début des années 2000, en prenant pour sidekicks quelques rappeurs se pensant acteurs.
Condamné à aligner les DTV au rabais, le bonhomme nous condamne également à nous cantonner (douce condamnation, soyons honnêtes) à mater en boucle sa gloire passée, au sein de péloches pas toujours défendables, mais souvent géniales.

S'il nous faudra encore un peu de courage avant de nous attaquer au gros morceau qu'incarne sa première réalisation, Terrain Miné (l'écologie, le Seagal la met où il veut, et c'est souvent dans la gueule), il y a une petite joie purement régressive à revenir sur sa période de transition, la fin des années 90 où, à l'instar d'un Stallone où d'un Schwarzenegger, le bonhomme s'accrochait comme il le pouvait à son statut d'action man, tout en essayant de renouveler son terrain de jeu pour rester jeune et à la mode - et, encore à cette époque, plus où moins svelte.

En ce sens, L'ombre Blanche de John Gray incarne une véritable pépite du mal, proto-Se7en du pauvre sauce buddy movie où il campait, face à un Keenen Ivory Wayans fraîchement délesté de la magique In Living Colors, l'ancien meilleur tueur des services secrets (évidemment) devenu criminologue, Jack Cole, appelé à résoudre une vague de meurtres à Los Angeles, flanqué d'un coéquipier avec qui il (évidemment bis) ne s'entend pas, opérée par un tueur en série psychopathe qui assassine et crucifie des familles de confession catholique.
Mais, p(e)lot(e) twist : le tueur tente de faire tomber Cole en le faisant accuser des meurtres, tout en s'attaquant même à sa famille.

Photo by Warner Bros. Pictures - © 1996

Tout un programme malsain donc, qui ne va pas pour autant faire faillir d'un iota la foi bouddhiste d'un Saumon Agile qui prône non pas la bienveillance, mais une violence bien craspec, où il dessoude et égorge (avec une carte de crédit !) son prochain avec une bonhomie non feinte (tout en se la jouant cool comme son collègue black, dialogues gênants en prime), à l'image même d'un divertissement facile et sous coke comme les 90s les alignait à la pelle, dont l'humour est aussi involontaire qu'à ses dépends.

Riche en gueules folles (Brian Cox, Bob Gunton, Richard Gant ou encore Stephen Tobolowsky) et en influences mal digérées, mais toujours porté par une énergie - du désespoir - agitée et joliment communicative; L'ombre Blanche, mis en scène avec suffisamment de soin pour ne pas brûler la rétine avec l'usure du temps, fleure malgré tout la bonne odeur de toutes les bandes burnées et régressives, qui ont enchaînés les allers-retours dans nos infatigables magnétoscopes.
Alors oui, quand on est un amoureux du cinéma d'action, et encore plus de Steven Seagal, il en faut peu, vraiment très peu pour être heureux...


Jonathan Chevrier