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[CRITIQUE] : The Summer with Carmen


Réalisateur : Zacharias Mavroeidis
Avec : Yorgos Tsiantoulas, Roubini Vasilakopoulou, Andreas Labropoulos, Nikolaos Mihas, …
Distributeur : Epicentre Films
Budget : -
Genre : Comédie, Romance.
Nationalité : Grec.
Durée : 1h46min.

Synopsis :
Démos, un grec ténébreux à la sexualité débordante, passe son été sur les plages d’Athènes avec son ami de longue date, Nikitas. Ensemble, ils tentent d’écrire un scénario inspiré de leur vie tumultueuse, surtout celle du beau Démos, au cœur écorché par sa dernière rupture…


Critique :


« On dirait Carmen » dit Demosthènes, le personnage principal de The Summer with Carmen, en désignant un chien. On pourrait croire, un court instant, qu’il vient de comparer un humain à un chien. Mais il n’en est rien. Carmen est bien une chienne et le point de départ du film, réalisé par Zacharias Mavroeidis.

Copyright Epicentre Films

Sur une falaise, des corps d’hommes nus se prélassent, proches de la mer. Ce bout de paysage est comme un sanctuaire gay. Ces hommes se saluent, se jaugent, parfois couchent ensemble. C’est l’endroit qu’ont choisi Demosthènes et Nikitas pour un pique-nique. Ces deux amis de longue date s'offrent un moment de détente, loin des problèmes. Pourtant, Demosthènes y pense, aux problèmes, quand il voit un chien et l’associe à Carmen, la chienne de son ex. La conversation, badine, sur une peine de cœur se transforme petit à petit en écriture de scénario. Cela tombe bien, Nikitas a le syndrome de la page blanche, alors qu’il doit bientôt pitcher un projet de film à un producteur français. Son ami est persuadé que son histoire possède tous les codes d’un bon film de comédie dramatique. En tout cas, elle renferme tout ce qu’il faut pour devenir le film “drôle et sexy, mais à petit budget” que cherche le producteur.

Se déroule, de ce fait, une narration métatextuelle sur les comédies romantiques gay, en nous montrant le résultat de cette conversation. The Summer with Carmen ne nous cache rien en matière d’écriture et en expose les b.a-ba : la structure en trois actes, les points clés du récit, les péripéties, la morale de l’histoire, etc… Qui a déjà lu ou étudié les modalités de narration reconnaîtront ces règles de base. C’est en faisant cela que Zacharias Mavroeidis et son scénariste, Xenofon Chalatsis, débusquent les clichés du genre. L’ouverture du film est un exemple de cliché. Coupé du monde, ces hommes gay, la plupart montés comme des statues grecs, embrassent la liberté sexuelle. Être athlétique, soigné, avoir une sexualité bestiale et sans attache, voilà des stéréotypes qui ont la vie dure. Mais en même temps, parce qu’ils sont coupés du monde, ils peuvent se permettre de laisser tomber les masques. Et c’est ce que fait Demosthènes en confiant son expérience. Les deux amis ne font pas que conceptualiser un futur scénario, ils créent également une safe place pour la vulnérabilité du personnage.

Copyright Epicentre Films

Car Demosthènes est persuadé que son histoire est porteuse d’un fort message, que ce soit dans l’amour, le couple ou pour appréhender son identité. Alors qu’il se met en avant, le film explore un de ses sujets sous-jacents, l’amitié, avec une ironie adéquate. On a parfois l’impression de voir un Carrie Bradshaw au masculin, si autocentré, si obnubilé par sa relation avec les hommes, que ses amitiés, en l'occurrence sa relation avec Nikitas, se place toujours en second plan. Cette écriture verbale de scénario est l’occasion pour ce dernier de dire parfois ses quatre vérités à son ami. Avec l’outil du flash-back, sa parole est soutenue par les images, où on voit Demosthènes sans cesse le mettre de côté dès que son date ou son ex sont dans les parages. Faire un film dans le film sert aussi de critique à un cinéma trop engoncé dans ses règles d’écriture, mais une critique allégée par l’atmosphère estival et par la volonté des personnages. Nikitas rêve de réussir comme Xavier Dolan. D’ailleurs, Demosthènes est un acteur raté, devenu fonctionnaire depuis. Faire de sa vie un film est peut-être le seul moyen de se raccrocher à un rêve.

La mise en abyme de The Summer with Carmen constitue toute son originalité. On s’amuse des petits commentaires venant agrémenter les scènes, comme si on regardait le film entre potes et qu’on se permettait de le critiquer tout en le visionnant. Une comédie sincère et ensoleillée qui, si elle ne prend aucun risque, nous fait au moins bien rire.


Laura Enjolvy


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