[C’ÉTAIT DANS TA TV] : #35. Renegade
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Avant de devenir des cinéphiles plus ou moins en puissance, nous avons tous été biberonnés par nos chères télévisions, de loin les baby-sitter les plus fidèles que nous ayons connus (merci maman, merci papa). Des dessins animés gentiment débiles aux mangas violents (... dixit Ségolène Royal), des teens shows cucul la praline aux dramas passionnants, en passant par les sitcoms hilarants ou encore les mini-séries occasionnelles, la Fucking Team reviendra sur tout ce qui a fait la télé pour elle, puisera dans sa nostalgie et ses souvenirs, et dégainera sa plume aussi vite que sa télécommande.
Prêts ? Zappez !!!
#35. Le Rebelle / Renegade (1992 - 1997)
« Il était flic et il faisait du bon travail. Mais il avait commis le crime le plus grave, en témoignant contre d'autres flics qui avaient mal tourné. Ces flics avaient tenté de l'éliminer, mais c'est la femme qu'il aimait qui avait été touchée.
Accusé à tort de meurtre, il rôdait maintenant du côté du Dakota. Un hors-la-loi poursuivant les hors-la-loi, un chasseur de primes, un renégat. »
Parmi tous les mômes biberonnés par la riche galerie de séries balancées un brin à l'aveugle à la télévision au cœur des années 90, par une TF1 pas encore totalement emportée par sa " drama cop " aiguë (coucou CSI), beaucoup si ce n'est pas tous - allez, soyons optimistes - ont grandis en s'émerveillant devant les tataneries des kickeurs du dimanche après-midi que furent la légende Chuck Norris (on reviendra, un de ces jours, sur l'importance de Walker Texas Ranger dans nos nombreuses sessions télévisées), et le moins impressionnant mais toujours à moto Lorenzo Lamas, dans la mythique Le Rebelle, dont le générique prononcé en français par feu Jacques " Mad Mel/De Niro forever " Frantz, est gravé au fer rouge dans nos mémoires (les frissons rien que d'y repenser).
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Cocktail facile et kitsch entre Agence Tous Risques et Kung Fu, avec son bon samaritain (Reno " Fucking " Raines, rien que le nom te pète à la gueule) hors-la-loi et expert en arts martiaux, qui cherchait à s'innocenter (spoilers : il n'y arrivera jamais) d'un meurtre qu'il n'avait pas commis tout en s'en allant aider la veuve et l'orphelin à coups de bourre-pifs pas toujours bien assénés, mais suffisant pour séduire un auditoire peu exigeant, hypnotisé par sa chevelure de biker fashion victime au moins autant que par sa BFF, Cheyenne (fantasme de tout gamin aux hormones un peu trop expressifs), The Renegade en V.O., créée par Stephen J. Cannell (qui s'est offert rien de moins que le rôle du grand vilain de l'histoire, Donald "Dutch" Dixon, flic ripoux qui a pourris la vie de Reno), n'avait strictement rien de révolutionnaire ni sur le papier, ni à l'écran.
Pire, si l'honnêteté s'en vient à déchirer le voile d'une nostalgie un peu trop prélassée comme une bouse sur nos souvenirs, il est vite évident qu'elle ne pouvait même pas rivaliser face à ses concurrentes de l'époque, avec ses intrigues peroxydées, sa distribution au jeu moins frais qu'une 1664 laissée toute l'après-midi au soleil, où encore son fétichisisme du cuir un peu trop prononcé.
Mais qu'est-ce qui a bien pu la rendre marquante dans nos caboches (mais pas que les nôtres, puisqu'elle a tenu 110 épisodes et 5 saisons, comme quoi), pour qu'on en parle encore même trente ans après ?
Et bah... un peu tout cela, cette fusion tout en mauvais goût, en burlesque et en ringardise plus où moins involontaire, d'une popote familière, cette propension à continuellement foncer droit dans le mur avec un enthousiasme non feint, se gavant jusqu'à l'overdose de dialogues cheesy, de scènes d'action insensées et d'un humour furieusement bas du front, souvent porté par un Bobby aux costumes improbables (l'immense Branscombe Richmond, habitué jusque-là à se faire kicker la tronche par Schwarzenegger, Norris où Seagal).
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Car oui, Le Rebelle était nanardesque à souhait, et était méticuleusement scruté par ton daron, tes oncles et tes frangins uniquement pour les mauvaises raisons, et cela te fascinait au point même qu'elle venait sans trop forcer, rompre l'ennui et la tristesse des dernières heures de ton week-end.
C'était un mauvais show qui en devenait génial parce qu'il ne cherchait jamais à n'être plus que cela, parce qu'il allait strictement à l'essentiel, parce qu'il transpirait les 90s jusqu'au bout de la pellicule, parce qu'il alignait les trognes géniales venues squatter quelques minutes d'antenne, mais aussi et surtout parce qu'il cognait dur.
Alors toi, qui est savamment caché derrière ton écran, laisse la cruelle vérité de côté (oui, on regardait un peu de la merde et oui, on aimait ça - et même encore aujourd’hui), prends une bonne bière, ta plus belle Harley (ton VTT, ça ira très bien, nous ne sommes pas tous riches hein), ton harmonica et viens claquer avec nous cette bonne phrase de boomer décomplexé, entre deux lampées mousseuses : " cherche pas p'tit, la télé d'avant, c’était vraiment le bon vieux temps... ".
Jonathan Chevrier