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[CRITIQUE] : Rivière de nuit


Réalisateur : Kôzaburô Yoshimura
Avec : Fujiko Yamamoto, Ken UeharaKeizô Kawasaki,…
Distributeur : Carlotta Films
Budget : -
Genre : Drame, Romance.
Nationalité : Japonais.
Durée : 1h44min

Synopsis :
Kiwa Funaki travaille à la teinturerie de son père à Kyoto. Cette femme indépendante et talentueuse y conçoit des tissus et accessoires qu’elle commercialise elle-même jusqu’à Tokyo. À bientôt trente ans, son entourage aimerait la voir mariée mais Kiwa trouve son épanouissement dans son art. Un jour, elle fait la rencontre de M. Takemura, professeur à l’université d’Osaka. Ce client singulier et érudit, au demeurant marié et père de famille, trouble la jeune femme...



Critique :



Quelques mois après la ressortie en version restaurée du magnifique Onibaba de Shindo Kaneto par Potemkine Films, il y a quelque chose de naturel finalement dans le fait de voir Carlotta Films dégainé de son côté, une œuvre de l'un de ses plus proches collaborateurs, gentiment méconnu dans l'hexagone - mais pas que -, Kôzaburô Yoshimura : Rivière de nuit, son premier effort en couleurs ici sublimé par une restauration 4K toute pimpante.

Copyright Carlotta Films

Mélodrame délicat et bouleversant né de la plume experte de  Sumie Tanaka - fidèle collaboratrice de Kinuyo Tanaka -, le film se fait autant l'histoire d'un amour impossible qu'un portrait de femme avant-gardiste, sur une protagoniste (Kiwa Funaki, incarné par la magnifique Fujiko Yamamoto) merveilleusement complexe et autonome, à la fois forte et fragile, qui trouve un équilibre précaire mais vitale entre son lien fort avec les traditions - via son travail dans la teinturerie de son père - et une attitude résolument moderne face à son époque et sa culture - elle est indépendante, conçoit des tissus et accessoires qu'elle commercialise elle-même, et ne se définit absolument pas par son rapport aux hommes.

Une âme qui trouve son bonheur dans l'art, et n'a de cesse d'éconduire son prochain masculin jusqu'à ce qu'elle fasse la rencontre de de M. Takemura, élégant professeur à l’université d’Osaka.
Pour elle, c'est le coup de foudre et si lui n'est pas insensible à son charme, il est aussi et surtout un homme marié (à une épouse mortellement malade) et un père de famille...

Copyright Carlotta Films

À travers le parcours sentimental désabusé et dénué de toute sentimentalité putassière, d'une femme qui vit au milieu des couleurs les plus éclatantes qui soit, mais qui attend désespérément qu'un homme en mette un peu dans son coeur, Kozaburo dresse aussi bien le portrait tridimensionnelle (et non stupidement binaire, dans une opposition progressisme/conservatisme, ou même entre l'immobilité - le passé, les corps - et le mouvement - l'avenir, la nature) les dilemmes moraux et existentiels d'une nation en proie à des renversements et une influence occidentale irréversibles; que celui doux-amer de la figure féminine dans le Japon post-Seconde guerre mondiale, entravées par des valeurs morales patriarcales qui limitent leur épanouissement (ici un père qui la pousse au mariage, un étudiant en peinture qui la considère comme une muse innocente, un amant qui ne peut totalement lui appartenir,...), et qui deviennent socialement méprisées lorsqu'elles s'en délestent.

Une très belle (re)découverte.


Jonathan Chevrier


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