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[CRITIQUE] : Renfield


Réalisateur : Chris McKay
Avec : Nicolas Cage, Nicholas Hoult, Awkwafina,...
Distributeur : Universal Pictures International France
Budget : -
Genre : Comédie, Épouvante-horreur.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h33min

Synopsis :
Le mal ne saurait survivre une éternité sans un petit coup de pouce. 

Dans cette version moderne du mythe de Dracula, Renfield est l’assistant torturé du maître le plus narcissique qui ait jamais existé : Dracula. Renfield est contraint par son maître de lui procurer des proies et de pourvoir à toutes ses requêtes, mêmes les plus dégradantes. Mais après des siècles de servitude, il est enfin prêt à s’affranchir de l’ombre du Prince des ténèbres. À la seule condition qu’il arrive à mettre un terme à la dépendance mutuelle qui les unit.


Critique :


Ce n'est pas parce qu'il est désormais acquis que ce bon vieux Nicolas Cage se soit (enfin) gentiment sorti de la mélasse des DTV de luxe difficilement défendables, que le bonhomme ne peut pas s'autoriser - volontairement où non - de figurer à l'occasion, au casting de quelques panouilles uniquement où presque bâties sur son propre nom.
Après tout, ça met encore un petit peu plus du beurre dans les épinards et il s'entiche suffisamment de projets alléchants, pour que la balance ne soit pas aussi déséquilibrée comme durant toute la dernière décennie.

Ce qui est fâcheux en revanche, c'est de voir l'un de ces dits projets alléchant ne correspond pas réellement aux attentes qu'il a su suscité au fil de sa production.
Clairement de cette pellicule-là, Renfield de Chris McKay laisse un sacré goût d'ail dans le gosier, là où il avait tout pour être une comédie horrifico-musclée envoyant méchamment du pâté, avec un Cage campant tout simplement... Dracula, avec tout le cabotinage génial que cela pouvait impliquer sur le papier.

Copyright 2023 UNIVERSAL STUDIOS. All Rights Reserved.

À certains égards, impossible de ne pas louer l'idée, aguicheuse sur le papier, de faire de Robert Montague Renfield, serviteur soumis à qui le comte Dracula a accordé la vie éternelle et des compétences de combat surhumaines (qui ne prennent effet que lorsqu'il mange des insectes) en échange de victimes quotidiennes, le sujet de son propre film, alors qu'il tente d'échapper à l'emprise mystique et toxique de son maître.
Une figure fascinante et ambiguë, partagée entre sa soumission au narcissique comte et son envie de rébellion contre lui, qui justifiait totalement l'idée qu'on s'y plonge un minimum.
Mais si les intentions sont bonnes, c'est du côté de l'exécution que cela pêche tant toute l'entreprise est désespérément calculée comme une tentative de s'inscrire dans la même lignée que What We Do in the Shadows - le film comme la série.

Mais là où le pastiche auto-réflexif du tandem Waititi/Clement établit rapidement un ton savoureusement ironique qui s'amuse à redéfinir dans l'humour la mythologie familière du vampire, le nouvel effort de McKay se cherche continuellement, jamais assez charpenté pour assumer la satire, trop moderne dans sa manière de faire constamment référence à la pop-culture, mais surtout bien trop timide pour pousser le ton vers le camp - bien que Cage s'éclate comme un sagouin en Dracula.

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Une maladresse qui se ressent à toutes les strates de son écriture tant la comédie ne cherche pas à naître du comportement inhumain de son monstre central (dont la question de son existence aux yeux du monde n'est pas abordée avant une heure de bobine), mais bien d'une sorte de proto-remake sauce actionner de Crocodile Dundee où Renfield remet en cause sa propre servitude tout en aidant une fliquette locale (arc romantico-flasque qui ne mène nulle part à la clé) à faire tomber un gang local, responsable de la mort de son père.

Bien loin de ce que laisse présager un jouissif premier quart-d'heure, entre une séance désopilante et gore à un groupe de soutien de la Nouvelle-Orléans pour codépendants, et une relecture du Dracula de Tod Browning façon flash-back, superposant Hoult et Cage dans les rôles de Dwight Frye et Bela Lugosi.
Mais l'exploitation cocasse de la relation toxique entre les deux personnages, qui aurait pu bifurquer vers l'ironie à double-sens d'un 21/22 Jump Street (où la frontière entre collègues et bromance/couple déglingué est souvent savoureusement franchie), ne va jamais plus loin, tout comme leurs confrontations qui ne nourrissent jamais assez une quête d'émancipation aussi fine qu'une feuille de papier cul Lotus - placement de produit bonjour.

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Ou comment faire de la vraie pointe d'originalité de sa narration prétexte, le cœur même de tous ses problèmes.
Mais que reste t-il à une comédie d'action qui pêche dans son humour, si ce n'est son action ?
De ce côté-là, même si McKay n'est pas le plus doué en la matière (ses envolées musclées et sanglantes sont souvent illisibles, quand elles ne sont pas parfois coupées une seconde trop tôt), il délivre quelques séquences gentiment décomplexées et cartoonesques aux CGI pas toujours heureux, auxquelles viennent souvent s'additionner la prestation délicieusement désaxée d'un Nicolas Cage profondément investi, mais trop peu présent à l'écran.

Il est, indiscutablement, avec Nicholas Hoult (dont le mélange entre naïveté et sérieux se marie bien avec la dépravation sarcastique de l'éternel Cameron Poe) le point fort - sans oublier un vrai travail soigné côté maquillage - de ce qui s'apparente à une série de séquences déconnectées, reliées par un humour faisant rarement mouche et une propension il est vrai généreuse, à jouer d'une violence spectaculaire et grand-guignolesque.

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Volontairement où non, Renfield est symptomatique de la comédie américaine moderne, qui cherche désespérément à dépasser les limites de son (souvent) excellente prémisse, en surchargeant plus que de raison sa besace jusqu'à l'overdose.
En fuyant par deux fois les pistes les plus intéressantes de son pitch (la relation toxique sur plusieurs décennies entretenue avec un sociopathe immortel et immoral avide de sang, puis l'idée que Renfield se serve des relations toxiques de son groupe de soutien comme source de nourriture pour son maître) pour fuir vers une intrigue étrangement anémique et désinvolte, totalement consciente de sa vacuité et de son humour simili-MCU.

Nicolas Cage méritait mieux en Dracula, nous aussi.


Jonathan Chevrier


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