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[CRITIQUE] : Italia, le feu, la cendre


Réalisateur⋅ices : Céline Gailleurd et Olivier Bohler
Avec la voix de : Fanny Ardant
Distributeur : Carlotta Films
Budget : -
Genre : Documentaire
Nationalité : Italien, Français
Durée : 1h34min

Synopsis :
Italia, Le Feu, La Cendre est un film entièrement composé d’images d’archives tournées en Italie entre 1896 et 1930, dont la plupart n’ont jamais été montées depuis leur sortie en salles, au début du XXe siècle. Conçu sous la forme d’un essai lyrique et onirique, ce documentaire retrace la naissance du septième art dans une Italie à peine unifiée, de ses premières images jusqu’au parlant et la chute dans le précipice du fascisme. Cette industrie cinématographique florissante a donné naissance au péplum, fait éclore les premières stars, que l’on nommait alors des dive et révélé des cinéastes qui se sont forgés un style en s’inspirant des oeuvres les plus en vogues de l’époque, que ce soit en peinture, en littérature, au théâtre ou à l’opéra. Dans ses fastes, ses délires romantiques, son goût pour l’excès, pour la littérature decadentiste de D’Annunzio, pour le symbolisme et la musique de Verdi, ce cinéma a bénéficié d’une renommée internationale, fascinant les foules et les artistes dans toute l’Europe, et bien au-delà, jusqu’aux États-Unis et en Amérique Latine.


Critique :


Au commencement, il y avait un train déraillé et une foule étonnée. Comme si nous assistions à une suite macabre d’un des premiers films français, L’arrivée d’un train en gare de la Ciotat. Céline Gailleurd et Olivier Bohler déterrent les restes cadavériques d’un héritage italien perdu et/ou oublié. Italia, le feu, la cendre veut remettre en lumière ce qui a été jeté dans l’ombre. Documentaire, ou plutôt film-essai, nous plongeons dans un passé strié de marques mais tout aussi incandescent qu’à l’époque.

Comment résumer tout un pan de l’histoire avec seulement quelques bouts d’images ? C’est le travail titanesque qu’a effectué le duo de cinéastes. Rythmé chronologiquement, Italia, le feu, la cendre remet en perspective la beauté du cinéma muet italien, sa grandeur. Ces images vibrent de cinégénie malgré les affres du temps. Ce sont des œuvres qui, à coup de gestes emphatiques, à coup de technique de montage et de trucage, brûlent d’un feu difficile à effacer. Et pourtant, il n’en reste pas grand chose, 15% si on en croit le dossier de presse du film. La faute à l’Histoire, celle avec un h si immense qu’il a su faucher ce bel élan artistique à son apogée. La guerre, le fascisme, la décadence.

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Céline Gailleurd et Olivier Bohler s'efforcent de ne pas glisser vers le cours d’histoire du cinéma. Ce film est une célébration poétique (élégiaque peut-être) d'œuvres différentes, du grand spectacle au documentaire ouvrant une minuscule fenêtre sur le monde. On y croise les grandes stars de l’époque Lyda Borelli, Emilio Ghione, Bartolomeo Pagano, Francesca Bertini (seule femme des témoignages du film), mais aussi la réalisatrice Elvira Notari dont les oeuvres portaient déjà une patte néoréaliste. Le film s’appuie sur la voix suave de Fanny Ardant qui récite les témoignages des contemporains du cinématographe. Des critiques acerbes de Luigi Pirandello — horrifié de voir des adaptations shakespeariennes sans paroles (“le mot est une chose morte” dit-il) — aux souvenirs émus de Federico Fellini devant Maciste en enfer (1925). Accompagnée par une musique grandiloquente (à la mesure des images) composée par Lorenzo Esposito Fornasari, les images se succèdent et prennent de l’ampleur grâce au phrasé de Fanny Ardant. Cependant, Italia, le feu, la cendre garde des moments silencieux, un recueillement nécessaire qui ranime la flamme de ces œuvres.


Laura Enjolvy


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