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[CRITIQUE/RESSORTIE] : Django

Réalisateur : Sergio Corbucci
Avec : Franco Nero, José Bódalo, Loredana Nusciak,...
Distributeur : Carlotta Films
Budget : -
Genre : Western.
Nationalité : Espagnol, Italien.
Durée : 1h32min.

Date de sortie : 9 novembre 1966
Date de reprise : 17 novembre 2021

Synopsis :
Un homme mystérieux arrive dans une petite ville, tirant un cercueil boueux derrière lui. Nommé Django, cet étranger sauve la vie d’une jeune femme et se retrouve ainsi projeté en plein cœur d’une guerre entre des révolutionnaires mexicains et une bande de racistes sadiques menés par un fanatique, le major Jackson. Malgré le chaos ambiant, Django met son plan en action : se venger, en opposant ennemi contre ennemi...



Critique :


Outre les classiques indéboulonable de Sergio Leone, Django du scénariste-réalisateur Sergio Corbucci est résolument le plus célèbre de tous les bons westerns spaghetti qui se respectent (c'est-à-dire pas tant que cela, sad but true), et peut-être aussi l'un des plus jouissif et décomplexé.
S'il louche gentiment sur les légendaires
Yojimbo de Kurosawa et A Fistful of Dollars de Leone, tout en ayant un poil plus chargé politiquement ses colts (sa violence, graphique et osée pour l'époque, n'a rien perdu de sa superbe dont cette fameuse scène de mutilation que Tarantino reproduira plus tard, dans Reservoir Dogs), le film s'attache à compter l'histoire de celui que l'on pourrait appeler " l'homme qui sème la mort ".
Un spectre venant de nul part traînant, littéralement, un cercueil derrière lui, Django est un antihéros taillé dans la roche du destin, impénétrable et mutique, un ancien officier de l'armée de l'Union traversant péniblement le paysage poussiéreux, dans une douloureuse quête de vengeance (et une plus hypothétique quête de rédemption, aussi).
Arrivé dans une ville presque désolée, un paysage élémentaire peuplé uniquement d'un barman-proxénète et de quelques prostituées, Django finit par nouer une alliance difficile avec un général mexicain pour combattre un ancien officier confédéré et sa bande de suprémacistes blancs masqués...

Copyright Carlotta Films

Pas forcément aidé par la réputation peu flatteuse de ses innombrables suites (qui n'ont de rapport que le Django de leurs titres), le film, fleurant bon le souffre et le sang, est une bisserie ritale jusqu'au bout de la pellicule, une cruelle fable morale sur des montres s'entretuant entre eux et littéralement en guerre contre le monde entier; un western zapata sombre, amer et politiquement conscient dans lequel la cupidité et la haine écrasent l'amour sous leurs bottes boueuses, dans un monde intimidant à la laideur impénitente, ou la moindre valeur humaine ne peut que vasciller.
Pour Corbucci, la violence est autant un profond exutoire (et point une fin cathartique, même pour les hommes mutilés dont il a toujours fait ses antihéros - comme Jean-Louis Trintignant dans Le Grand Silence) qu'une manière implacable de démontrer qu'il n'y a aucun honneur possible à préserver ou retrouver au coeur Far West, la vision nihiliste d'une humanité enchaînée par les propres structures de sa société : la politique - et donc le gouvernement -, la religion et le commerce.
Peckinpahien en diable dans sa rage politique sous-jacente, surréaliste et anticlérical tout en étant bardé de symbole religieux, Django laisse s'exposer la nature humaine dans ce qu'elle a de plus épouvantable et sadique, et inscrit dans la légende du bis ultra-violent une figure mythique incarné à la perfection par l'immense Franco Nero.
Même cinquante-cinq ans plus tard, le plaisir de sa vision n'a strictement rien perdu de sa superbe.


Jonathan Chevrier