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[LES CARNETS DE L’ÉTRANGE] : Jour 8

Étrange Festival cuvée 2021 : J-8.


Le rendez-vous de la rentrée pour les cinéphiles parisiens est, comme chaque année, L’Étrange Festival et son lot de curiosités venues des quatre coins du monde. Né en 1993, l’évènement prend place, cette année et comme d’habitude, au Forum des images, dans le centre de la capitale. C’est un immanquable pour tous les passionnés d’horreurs, de genre, de bizarre, de tout ce qui sort des écrans conventionnels et qu’on ne verrait pas ailleurs. Cette année, le festival propose sa traditionnelle compétition, sa sélection Mondovision, ses découvertes de nouveaux talents et ses trouvailles de documentaires mais aussi des cartes blanches et focus. La réalisatrice Lynne Ramsay a ainsi amené quelques œuvres avec elle, tout comme Pierre Bordage. On retrouve, enfin, des projections des films de Atsushi Yamatoya, un focus Fred Halsted et trois films de Yûzô Kawashima.

C’est un programme fort alléchant auquel on est ravi d’assister. Nos rédacteurs se font un plaisir de découvrir, pour vous, ces inédits ou ces rétrospectives.

Ce mercredi 15 septembre présente encore un programme alléchant, ce qui a obligé nos rédacteurs à faire de nouveaux choix. On accueille, pour le bilan de ce huitième jour de festival, Manon, John et Eléonore. Manon fait le choix de découvrir le réalisateur japonais Yuzo Kawashima à travers la petite rétrospective qui lui était offerte. John et Eléonore se penchent, eux, sur les nouveautés.

Commençons par la journée de Manon, consacrée à Yuzo Kawashima. Né en 1918 et mort en 1963, à l’âge de seulement 45 ans, le réalisateur a cependant eu le temps d’être assez prolifique et de changer plusieurs fois de studio. Le représentant de Badlands, éditeur et distributeur du film, précise lors de sa présentation que contrairement à d’autres réalisateurs de l’époque, Yuzo Kawashima n’aimait pas rentrer dans le moule des studios. L’Etrange Festival a mis trois de ses films à l’honneur : Le Temple des oies sauvages, Les Femmes naissent deux fois et La Bête élégante. C’est ces deux derniers que notre rédactrice se fait un plaisir de découvrir. Dans Les Femmes naissent deux fois, Koen, une geisha des bas quartiers voit sa profession menacée par la fermeture de son lieu de travail, accusé d’être un berceau pour la prostitution. Un de ses clients lui propose alors d’être son bienfaiteur régulier, elle sera sa maîtresse qui lui restera fidèle et lui en prendra, en retour, soin.

Manon s’exprime sur le film, qu’elle décrit comme étant sa « plus belle découverte du festival » : « Les Femmes naissent deux fois esquisse le portrait d’une jeune femme, attachée à un mode de vie ancien, tandis que la société change autour d’elle. Elle ne sait que vivre de ses relations avec les hommes, qu’elle apprécie autant que leur portefeuille. Mais la magnifique Koen, avec laquelle le spectateur est toujours en empathie, souffre aussi de solitude. Les Femmes naissent deux fois est un film profondément mélancolique sur les relations humaines et la recherche de compagnie d’une femme qui peine à trouver sa place dans le monde. La mise en scène et le montage sont un délice, ils incarnent à merveille les soirées alcoolisées pour masquer la tristesse, Les Femmes naissent deux fois ne sombre à aucun moment dans le pathos ou le misérabilisme – au contraire. Merci à L’Etrange Festival pour remettre en lumière cette œuvre exceptionnelle (même si on doit admettre qu’elle n’a strictement rien d’étrange). »

© D.R.

Notre rédactrice continue avec La Bête élégante, un huis-clos sur une famille de petits arnaqueurs dans un HLM : « La Bête élégante est la deuxième grande leçon de mise en scène de la journée. Le scénario (écrit par Kaneto Shindo à qui on doit déjà Onibaba), laisse place à des dialogues cinglants, souvent très drôles, qui s’inscrivent allégrement dans le registre de la comédie. La cruauté se cache pourtant derrière ce rire, les jeux de manipulations, aussi cocasses soient-ils, témoignent de personnages souvent isolés, qui ont souffert de la guerre, et deviennent excessivement individualistes pour s’en sortir. Les plans dans lesquels les personnages évoluent dans un escalier purement symbolique témoignent d’une volonté de gravir les échelons – mais toujours seul, la famille étant les rares personnes sur lesquelles on peut compter. »

© D.R.

C’était le dernier jour pour découvrir les films de Yuzo Kawashima à L’Etrange Festival mais on espère pouvoir vous reparler très vite et plus en détails de ces merveilles !

On laisse désormais place à John et Eléonore pour parler de Mad God, un film d’animation qui vient tout droit des États-Unis et est réalisé par Phil Tippet. Il s’agit d’une plongée dans les bas-fonds d’un monde en ruine où l’on suit L’Assassin. Ses sombres desseins se perdent dans un labyrinthe de paysages étranges, repaire d’une faune inquiétante et féérique. Le film est en compétition pour le prix Nouveau Genre.

John en tire ces quelques mots : « Volontairement elliptique avec son récit épisodique quasiment relégué au rang de prétexte - qui joue même la carte de l'économie de dialogues -, le film, qui s'ouvre sur un passage enflammé de Lévitique, est une vision folle de l'enfer selon Tippett, qui transpire le mal et le sinistre mais surtout fourmille de détails incroyables, fruit d'un travail monstrueux - à tous les niveaux -, ressemblant continuellement au tableau Hieronymus de Bosch sous acide, ou chaque cadre contient suffisamment de terreur en lui, pour nourrir nos songes pendant des lustres. »

On vous invite cependant à lire sa critique complète ici.

Eléonore ajoute : « C’est un projet titanesque que Tippett a mis plus de 30 ans à réaliser. Mais ce film les vaut bien. Des visions infernales de ce que l'Homme a de plus noir. Le sens du détail de Bosch, le grotesque en plus. »

© D.R.

Et c’est toujours avec Eléonore que se termine la journée, avec les rediffusions de Limbo (compétition Nouveau Genre) et The Sadness (catégorie Nouveaux Talents). Léa et Manon avaient découvert le premier lors de sa première diffusion et John et Manon avaient, quant à eux, déjà vu The Sadness le soir de l’ouverture.

Limbo, réalisé par Soi Cheang suit deux policiers dans les bas-fonds hongkongais, sur les traces d’un homme qui découpe la main gauche de ses victimes. Ils comptent sur l’aide d’une jeune femme qui cherche à se repentir d’un passé sombre. Manon saluait une technique irréprochable et une mise en scène impressionnante mais regrettait un ensemble un peu convenu, qui s’appuyait trop sur cette mise en scène trop démonstrative, bien que le film soit un sérieux candidat au prix Nouveau Genre. Léa trouvait qu’à force de chercher la noirceur partout, le film peinait signer une fin convaincante mais remplissait bien sa mission de polar « poissant et tripant ». Eléonore en tire ces quelques mots : « Au cas où la métaphore ne serait pas assez claire dans le film : l'homme est une ordure. Soi Cheang met en scène un policier tendu qui ne laisse de place ni pour le ciel, ni pour l'espoir. Visuellement, il convoque Tetsuo. Et franchement, que c'est beau »

© 2021 Sun Entertainment Culture Limited

Et notre chère rédactrice clôture la journée avec le choc The Sadness à Taïwan. Le film réalisé par Rob Jabbaz narrait une histoire de zombies ultra-violents, adeptes de torture, tripes et viol, face auxquels un jeune couple essayait de faire face. On laisse Eléonore nous parler de ce qu’elle décrit comme étant la convocation d’une « hyperviolence, humour noir et gore décomplexé ». Elle ajoute : « Dommage qu'il y ait une intrigue sans intérêt et un couple de personnages principaux fades et gentillets. On est passé pas loin d'une bombe nihiliste. »

De son côté, Manon soulignait la franchise et l’absence de complexe d’un film qui n’était certainement pas l’œuvre la plus intellectuelle du festival mais qui s’assumait comme pur exutoire. John en tirait une critique complète que vous pouvez retrouver ici.

Copyright Machi Xcelsior Studios

Il ne reste à présent que quatre jours de festival mais nos rédacteurs comptent bien en profiter ! Pour rappel, L’Etrange Festival se tient à Paris, au Forum des images. Il est accessible à tous, détenteurs de la carte illimitée du Forum comme simples curieux, contre 10€ la place (8€ en tarif réduit). Des cartes 5 films et 10 films sont aussi disponibles.


La Fucking Team (Manon Franken)



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