[CRITIQUE] : L’État du Texas contre Melissa
Acteurs : -
Distributeur : Alba Films
Budget : -
Genre : Documentaire.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h37min.
Synopsis :
Melissa Lucio est la première femme hispano-américaine condamnée à mort au Texas.
Accusée d’avoir tué sa fille de deux ans, cette mère pauvre et droguée, coche toutes les cases de la coupable idéale.
Pourtant, son histoire qui regorge de zones d'ombres, va se révéler bien plus complexe qu’elle n’y paraît...
Critique :
Regard sans faille sur une société gangrenée par les inégalités sociales, #LEtatduTexascontreMelissa montre que les prisons US sont remplies d'innombrables Melissa Lucios, dans un instantané révélateur et pertinent de la brutalité quotidienne au coeur de l'Amérique capitaliste. pic.twitter.com/NkpvHdGBaK
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) September 17, 2021
" L'État du Texas veut me tuer ", une déclaration choc et lourde de sens balancée face caméra par Melissa Lucio, au coeur des premières secondes du documentaire déchirant qui lui est consacré, réalisé par la cinéaste franco-américaine de Sabrina Van Tassel, L'État du Texas contre Melissa.
Tristement connu comme la première femme hispanique du Texas à avoir été dans le couloir de la mort - ou elle croupit depuis treize ans -, elle a été reconnue coupable du meurtre de sa fille de deux ans, Mariah, décédée d'un traumatisme contondant à la tête le 17 février 2007.
Sans tambour ni trompette, le documentaire s'échine à expliquer comment et pourquoi sa condamnation était une erreur judiciaire flagrante, la principale preuve de son accusation étant une confession enregistrée sur vidéo, qu'elle avait faite pendant sa garde à vue, alors qu'elle avait été agressivement pendant près de sept heures (partiellement montrée dans le documentaire), et contrainte d'avouer.
Copyright Alba Films |
Pour tous ceux qui connaissent un tant soit peu le couloir de la mort outre-Atlantique (merci aux nombreux reportages racoleurs sur la TNT - mais pas que -, le Texas restant l'État avec le plus grand nombre d'exécutions), l'histoire de Lucio - raconté avec grand soin - n'a finalement rien de nouveau au coeur d'un état (pays ?) foncièrement inégalitaire et raciste - voire même corrompu, ou les membres de minorités font constamment appel de leurs condamnations, tant le doute persiste quand à l'objectivité de l'enquête et de leur accusation - et certains sont probablement réellement innocents.
Et c'est cet aspect douloureusement commun, couplé à un regard douloureux sur la pauvreté et la précarité qui gangrènent la lower class, qui rend l'effort de Van Tassel aussi percutant, dévoilant avec minutie combien cette affaire est criblé d'incompétence et comment le système juridique de l'État se complaît dans une cruauté/inhumanité jamais remise en question; tout en incarnant également une véritable charge sur pellicule, envers l'indifférence des médias et à l'auto-obsession fanatique de la foule des politiques identitaires.
Mise en images sans faille d'une société profondément malade, corrompue de part en part par les inégalités sociales et le principe aristocratique selon lequel les riches et les puissants peuvent faire ce qu'ils veulent ou presque (tandis que les pauvres et les impuissants doivent être humiliés et dégradés); L'État du Texas contre Melissa montre que les prisons américaines sont remplies d'innombrables Melissa Lucios, dans un instantané aussi révélateur que convaincant de la brutalité quotidienne au coeur de l'Amérique capitaliste.
Jonathan Chevrier