[CRITIQUE] : Michael Kohlhaas
Réalisateur : Arnaud des Pallières
Acteurs : Mads Mikkelsen, Mélusine Mayence, Delphine Chuillot, Sergi Lopez, Bruno Ganz, Denis Lavant, David Kross, Amira Casar,...
Distributeur : Les Films du Losange
Budget : -
Genre : Drame, Historique.
Nationalité : Français et Allemand.
Durée : 2h02min.
Synopsis :
Au XVIème siècle dans les Cévennes, le marchand de chevaux Michael Kohlhaas mène une vie familiale prospère et heureuse. Victime de l'injustice d'un seigneur, cet homme pieux et intègre lève une armée et met le pays à feu et à sang pour rétablir son droit.
Critique :
L'affiche de Michael Kohlhaas avait de quoi faire vendre du rêve à tout cinéphile un minimum bercé par le cinéma de John McTiernan.
Oui, John McTiernan, car de son pitch, furieusement chaotique et épique, on ressentait les douces saveurs bruyantes et brutales du chef d’œuvre mutilé - enfin, l'un de ces nombreux pour être précis -, Le 13eme Guerrier.
Autant le dire tout de suite même si nous n'apprenons par là rien à personne, Arnaud des Pallières, aussi talentueux soit-il, n'est pas le grand cinéaste que la justice ricaine se borne à nous priver.
Certes, cette vérité là nous la connaissons tous, mais dès son introduction, foutrement épique avec une poursuite en plein Moyen-Age au cadrage en contre-plongée digne d'un plan à la John Ford, le bonhomme force le respect et impressionne.
Alors oui, si plus tard on comprendra que le cinéaste, réputé pour avoir un cinéma plus que radical, préfèrera offrir à son spectateur un film d'aventure plus théorique que viscéral, son Michael Kohlhaas n'en restera pas moins un western bougrement burné pour débarquer et s'imposer avec autant de force et de qualité dans un été des blockbusters qui a su écraser des péloches bien plus ambitieuses.
Avec pour point de départ - le film est l'adaptation d’une nouvelle de l’écrivain et poète romantique allemand Heinrich von Kleist -, la métamorphose emplit de dignité d'un marchant de chevaux en guerrier implacable en quête de justice et de vengeance - on l'a spolié et on a en plus liquidé sa femme, on peut être en pétard pour moins que ça -, vu que les autorités ne sont même pas là pour le défendre, des Pallières met en scène un spectacle à la beauté et à l'intelligence incroyable, réflexion puissante et universelle sur la justice et la politique, mais surtout sur les conséquences de la loi du Talion et de sa justice aveugle.
Prodigieux, puissant, certes très bavard, religieux et un peu trop étiré sur la longueur (une grosse demie heure en moins de ses deux bonnes heures ne lui aurait peut-être pas fait de mal), la péloche est infiniment glaciale et fascinante dans sa critique d'une société des privilèges et ce grâce, en grande partie, au charismatique et génial Mads Mikkelsen, plus brutal et sauvage que jamais, en bras armé et la vengeance aussi fantasmatique que colérique.
Le reste du casting n'est pas en reste d'ailleurs, puisqu'on y voit quelques-unes des plus belles gueules du septième art hexagonal, Bruno Ganz, Sergi Lopez ou encore Denis Lavant.
Belle œuvre inspirée, à l'image aussi forte que son propos - qui a le bon gout de se privé de musique -, et au style aussi minimaliste que foutrement réaliste, loin d'incarner un chef d’œuvre indiscutable mais qui se pose bien là comme film solide, mais surtout une preuve que oui, le cinéma français est encore capable de produire des œuvres épiques et ambitieuses, la bande est un grand film qui a le mérite d'être vu bien calé, pop corn à la main, dans un fauteuil de cinéma.
Bref, un de ces rdv à ne pas manquer dans les salles obscures en cet fin d'été...
Jonathan Chevrier