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[CRITIQUE] : Coupez !


Réalisateur : Michel Hazanavicius
Acteurs : Romain Duris, Bérenice Béjo, Finnegan Oldfield, Agnès Hurstel, Matilda Lutz, Grégory Gadebois, Luana Bajrami, Jean-Pascal Zadi,...
Distributeur : Pan Distribution
Budget : -
Genre : Comédie.
Nationalité : Français.
Durée : 1h50min

Synopsis :
Le film est présenté hors-compétition au Festival de Cannes 2022 et en fait l'ouverture.

Un tournage de film de zombies dans un bâtiment désaffecté. Entre techniciens blasés et acteurs pas vraiment concernés, seul le réalisateur semble investi de l’énergie nécessaire pour donner vie à un énième film d'horreur à petit budget. L’irruption d’authentiques morts-vivants va perturber le tournage…


Critique :


Alors que l'on fustige le manque d'originalité d'un cinéma Hollywoodien qui remake tout ce qui bouge, pour l'adapter à un public local pas forcément prompte à se laisser aller à une expérience cinématographique qui n'aurait pas tous les codes inhérents à leurs productions fétiches, difficile de venir féliciter par la suite de tels efforts venant de notre bon vieux cinéma hexagonal, et encore plus quand la pertinence de l'effort ne saute pas forcément aux yeux dès son annonce.
Calque totalement assumé de la petite bombe nippone Ne Coupez Pas ! de Shin'ichirō Ueda - dont c'était le film de fin d'études -, Coupez ! signé par un Michel Hazanavicius que l'on avait laissé écorné par deux précédents efforts gentiment décevants (Le Redoutable et Le Prince Oublié), s'inscrit presque dans la même lignée que le Psycho de Gus Van Sant (qui remakait plan par plan le chef-d'oeuvre d'Hitchcock), dans le sens où il duplique et passe une oeuvre un brin méconnu (ce que n'était évidemment pas Psychose, d'où le " presque "), au broyeur de son propre style mais aussi d'un cinéma français sensiblement moins rompu aux mélanges des genres et/où aux efforts moins consensuels.

Copyright Lisa Ritaine

Jouant la carte de la mise en abyme dans la mise en abyme d'une mise en abyme avec l'intégration du statut de remake dans la balance narrative, Hazanavicius surprend néanmoins dans son entreprise, en poussant pas tant que cela le curseur du phénomène de citation/regurgitation, même s'il ne possède jamais vraiment le même pouls que le film original, auquel il n'offre que peu de profondeur scénaristique (les personnages sont à peine mieux brossés, les gags sont quasiment les mêmes,...).
D'autant qu'il y a quelque chose de profondément absurde dans l'idée que la même catastrophe frappe le tournage d'un film et son remake, nuisant encore un peu plus à l'aura d'authenticité factice que le cinéaste tente en vain de reproduire, celle d'une lettre d'amour aux séries Z fauchées qui n'a rien de fauchée, l'idée de ce que doit être un film bricolé par un film qui ne l'est pas (et Coupez ! n'a définitivement rien du Ed Wood de Burton).
L'effort n'est alors plus un pastiche, mais un pastiche de pastiche où il est facile d'égrainer les comparatifs biaisés entre un wannabe cinéaste (film de fin d'études qu'on vous dit, ce que ne laisse jamais transparaître son radical plan-séquence inaugural) et un réalisateur chevronné, dont la mise en scène plus assurée (une meilleur gestion du cadre et de la géographie des espaces couplée à une photographie plus léchée et un montage plus limpide) et l'appropriation discrète, surplombe techniquement un art urgent de la débrouillardise, du bricolage et de la solidarité qu'il s'échine pourtant à célébrer.

Copyright Lisa Ritaine

Mais c'est peut-être la finalement, au-delà de sa seconde moitié épousant sans réserve ses élans régressifs, dans ce côté méta-autobiographique, ce côté - léger - retour aux sources d'un cinéma fait de briques et de broc mais surtout de passion, que Coupez ! tire sans doute son plus (seul?) beau message, celui que la malice et le mojo d'Hazanavicius sont bien toujours là, certes sporadiquement perceptible mais toujours en vie.
Parfois drôle et sincère mais un poil opportuniste et définitivement sans vrai surprise en son coeur, le film, pas même relevé par le cabotinage extrême d'un casting totalement voué a sa cause et quelques punchlines folles, laisse un sacré goût d'inachevé au fond du palais.


Jonathan Chevrier


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