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[CRITIQUE] : Abou Leila


Réalisateur : Amin Sidi-Boumedine
Avec : Slimane Benouari, Lyes Salem, Azouz Abdelkader,...
Distributeur : UFO Distribution
Budget : -
Genre : Drame, Policier, Thriller.
Nationalité : Algérien, Français.
Durée : 2h15min.

Synopsis :
Algérie, 1994. S. et Lotfi, deux amis d’enfance, traversent le désert à la recherche d’Abou Leila, un dangereux criminel. La quête semble absurde dans l’immensité du Sahara. Mais S., dont la santé mentale est vacillante, est convaincu d’y trouver Abou Leila. Lotfi, lui, n’a qu’une idée en tête : éloigner S. de la capitale. C’est en s’enfonçant dans le désert qu’ils vont se confronter à leur propre violence.




Critique :



Dans la catégorie des premiers longs qui en ont méchamment dans les tripes, force est d'admettre qu'Abou Leila n'y va pas par le dos de la cuillère pour en foutre plein les mirettes à un auditoire qui n'en attendait sans doute pas autant.
Sombre psychodrame signé Amin Sidi-Boumédine (qui devient de facto, un cinéaste à suivre de très près), qui narre les dommages collatéraux de la guerre en Algérie à travers l'odyssée de deux hommes - Lotfi (Lyès Salem) et son ami, simplement nommé S (Slimane Benouari) -; tout en laissant planer suffisamment longtemps le mystère - et il ne sera pas le seul - autour de son énigmatique titre (placardé sur ce qui est l'une des plus belles affiches de l'année), pour captiver sans trembler ses spectateurs.
Flanqué en 1994, au milieu de la guerre civile en Algérie, il est censé y avoir "qu'une seule route" qui mène le tandem de héros à leur destination, mais le voyage dans lequel il s'est engagé est loin d'être un long fleuve tranquille, et leurs expériences - en particulier celles de S, sur-médicamenté et au passé troublant -, vont les mener dans des détours sombres et définitivement inquiétants.


Copyright UFO Distribution

Loin des sentiers battus du récit traditionnel, la péloche incarne une expérience hautement engageante et affectante tant elle est vissée sur les troubles de S, de plus en plus incapable de faire la distinction entre la réalité et les rêves, imbibant dès lors l'atmosphère de l'intrigue d'un effroi et d'un sentiment anxiogène savoureusement palpable, ou la violence est tapi dans l'ombre et implacable.
S'appuyant sur la photographie sublime de Kaname Onayama, Sidi-Boumédine dresse le portrait puissant et sans artifices, d'une société engoncée dans la terreur - à la fois visible et psychologique -, mais aussi comment les actes les plus abominables, peuvent tromper les apparences et être commis par ceux dont on s'attend le moins - en fonction des circonstances, souvent catastrophiques.
Ne trahissant jamais la vérité qu'il est un premier long-métrage (sa maîtrise technique et scénaristique, est franchement impressionnante), Abou Leila est une odyssée émotionnelle incroyable ou l'humanisme perd de sa grandeur,
un voyage fictionnel dans une psyché fragile façonnée par l'horreur de la guerre qui, même s'il est imagé, illustre une réalité troublante et bien réelle pour beaucoup.
Une vraie petite claque comme on les aime.


Jonathan Chevrier