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[CRITIQUE] : Au Poste !


Réalisateur : Quentin Dupieux
Acteurs : Benoît Poelvoorde, Grégoire Ludig, Marc Fraize, Anaïs Demoustier, Philippe Duquesne, Orelsan,...
Distributeur : Diaphana Distribution
Budget : -
Genre : Comédie dramatique.
Nationalité : Français, Belge.
Durée : 1h13min.

Synopsis :
Les membres d'un poste de police doivent résoudre une affaire de meurtre.



Critique :



S'il y a bien une chose qui est gravée dans la roche d'un septième art français dont le souci d'originalité se meurt de plus en plus avec le temps, c'est que Quentin Dupieux est l'un des cinéastes contemporains les plus inclassables de la dernière décennie par chez nous.
Personne ne pourra reprocher au génial bonhomme de faire du mieux qu'il le peut pour produire des œuvres aussi singulières et barrées à l'intérieur d'un cinéma hexagonal qui n'a que trop peu l'habitude (et encore pire, la paresse) de laisser ses brebis tourneuses, trop s'écarter du droit chemin de la pellicule populaire.
Trois ans déjà après son formidable Réalité (sans doute son meilleur essai, avec Steak), le voilà de retour après un passage cannois un poil timide et un casting flambant neuf (et ne comptant que très peu d'habitués de son univers), avec Au Poste !, qui avait tout pour égayer notre ciné, en attendant le comeback de l'agent Hunt prévu pour le 1er août prochain.



Sublime, d'une folie absurde et parfois attendrissante, référentiel - voire même auto-référentiel - tout en réussissant la prouesse d'être nettement plus accessible que ses précédents longs, le Dupieux nouveau est une péloche presque impitchable qui démarre sur une scène barrée et intrigante (un homme dirige, en slip rouge et sur une pelouse, un orchestre avant de s'enfuir dès l'arrivée de la police), pour se poursuivre dans une enquête policière détournant habilement des codes du polar - et plus directement des scènes d'interrogatoire - entre présent (dans une salle d'interrogatoire) et passé (à coups de flashbacks presque hallucinatoires, dont il faudra retenir le moindre petit détail), pour mieux incarner une comédie policière potache et caustique comme l'hexagone en manquait tant.
D'un premier degré extrême - et salvateur -, alignant les mises en abimes nonsensiques et les situations délirantes via une écriture tout aussi joliment cohérente et soignée (l'exubérance parait ici plus ressérée et débarassée de nombreux tics) que sa réalisation est d'une esthétique impeccable, Au Poste ! pourrait presque être la synthèse parfaite et épurée de tout un cinéma, au-delà de n'être " que " l’œuvre la plus aboutie et maitrisée de Dupieux, loin devant le pourtant merveilleux Réalité, dont le film pioche toute la savoureuse poésie décalée.



Trip cosmique et vintage d'une densité étonnante, mené tambour battant - 1h14 au compteur - et qui ose tout, même l'impensable (le climax abat toutes les cartes), pour nous divertir, porté par un casting impliqué au timing comique remarquable (le couple Poelvoorde /Ludig fait des étincelles, tandis que Marc " Monsieur " Fraize leur vole carrément la vedette à chaque scène), Au Poste ! est un millésime irrésistible, décomplexée, totalement absurde et méchamment ludique.
Un immanquable qui, on l'espère, ne se fera pas bouffer par une concurrence estivale qui, n'ayons pas peur des mots, risque de bien galérer pour lui arriver à la cheville...


Jonathan Chevrier