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[CRITIQUE] : Samba


Réalisateur : Olivier Nakache et Eric Toledano
Acteurs : Omar Sy, Charlotte Gainsbourg, Izia Higelin, Tahar Rahim, Youngar Fall,...
Distributeur : Gaumont Distribution
Budget : -
Genre : Drame, Comédie.
Nationalité : Français.
Durée : 1h58min.

Synopsis :
Samba, sénégalais en France depuis 10 ans, collectionne les petits boulots ; Alice est une cadre supérieure épuisée par un burn out. Lui essaye par tous les moyens d'obtenir ses papiers, alors qu'elle tente de se reconstruire par le bénévolat dans une association. Chacun cherche à sortir de son impasse jusqu'au jour où leurs destins se croisent... Entre humour et émotion, leur histoire se fraye un autre chemin vers le bonheur. Et si la vie avait plus d'imagination qu'eux ? 


Critique :

Comment répondre aux attentes nombreuses et diverses des spectateurs et des cinéphiles, à la suite d'un succès planétaire qui incarne en plus, le meilleur film d'une carrière.

Voilà le dilemme, ou plutôt le pari plus que musclé que ce sont lancés Olivier Nakache et Eric Toledano, près de trois ans après le triomphe mérité - et aussi bien critique que public - d'Intouchables, incontestablement leur meilleure péloche, et qui permit à Omar Sy de choper aussi bien le césar du meilleur acteur (au nez et à la barbe de Jean Dujardin) que son ticket pour une carrière Hollywoodienne, déjà joliment entamé.

Pour leur retour, inutile de dire que le trio gagnant n'a pas choisit la monture la plus simple, là ou l'on présume logiquement qu'ils ont dût recevoir plus d'un script clone d'Intouchables.
Avec Samba, adaptation plutôt libre du roman de Delphine Coulin, Samba la France, ils creusent un petit peu plus le sillon de leur " choc des France ", via l'itinéraire difficile d'un sans-papier prêt à tout pour s'en sortir dans un pays qui ne veut pas de lui.


Un retour en force sur fond de drame au sujet aussi complexe que casse-gueule, qui promettait également de belles incartades romantiques et comiques, le tout joué par un casting vedette frisant l'indécence du bon gout : Sy (évidemment), Charlotte Gainsbourg, Tahar Rahim et Izla Higelin.

Il n'y avait plus de doute, si l'époque Intouchables est loin, via Samba, Nakache et Toledano pousse les cinéphiles hexagonaux a les placer de nouveau tout en haut de la chaine alimentaire du divertissement populaire racé et intelligent, avec ce qui incarne aisément l'aventure événement de cette fin d'année ciné frenchy de 2014.

Samba donc, ou l'histoire de Samba justement, Sénégalais sans-papiers qui travaille depuis dix ans en France.
Il collectionne les petits boulots, mais risque d'être très bientôt expulsé.
C'est alors qu'il fait la connaissance d'Alice, une cadre supérieure épuisée qui soigne son burn-out en faisant du bénévolat auprès des sans-papiers.
Lui qui cherche par tous les moyens d’obtenir ses papiers, va obtenir de sa part une aide des plus précieuses, tandis qu'il lui redonnera, peu à peu, gout à la vie et l'envie de se battre.

Entre humour et émotion, leur histoire se fraye un autre chemin vers le bonheur...


On le sait, rares sont les cinéastes français a être capable de surfer sur les sujets difficiles sans se noyer tête la première dans l'océan du bon sentiment proprement indigeste.
Avec Intouchables et son traitement maitrisé du handicap, le duo Nakache/Toledano prouvait qu'il était possible de produire du feel good movie dramatique en France, tout en lui conférant ce qu'il faut de pathos de supermarché pour attirer et non révulser son cinéphile.

Avec Samba, le tandem va encore plus loin, car il passe à la moulinette  avec une justesse et une souplesse étonnante, aussi bien le film social, la comédie populaire, la romance improbable et le drame intime et poignant, pour offrir ni plus ni moins que le cocktail sur pellicule le plus ambitieux et brillant de l'année du côté du septième art hexagonal.

Articulant toujours son récit sur la thématique du handicap, plus physique mais social, la péloche dresse un portrait tendre mais dur et réaliste d'immigrés pleins d’ambitions, travailleurs et motivés, vivant entre une accumulation de galère et une trouille permanente, et dont les espoirs se voient brisés par une France qui ne veut pas d'eux, tout en trouvant le moyen, malsain et cruel, de se servir d'eux.

Pour mieux aiguiser leur propos, ils mettent face à face deux versants de notre société, celle enlacé par la richesse, l'autre frappé par la pauvreté, l'une ou la dépression guette tandis que l'autre est portée par une bonne humeur constante et l'espoir de jours meilleurs.


En ce sens, le film se rapproche beaucoup de leur précédent essai, puisqu'on ne peut que penser au duo Cluzet/Sy à la vision de celui incarné toujours pas Sy, et Charlotte Gainsbourg, deux personnages qui ont tout à gagner à s'aider.
Mais plus que de replonger dans une simple redite ou de stagner en faisant du surplace, ils traitent cette relation avec une émotion nouvelle.

En effet, fini le buddy movie place à la comédie romantique sauce ricaine ou l'amour et (surtout) l'humour est l'antidote contre tous les maux d'une vie.

Évitant admirablement les écueils faciles du drame social (un côté trop partisan, un misérabilisme certain,...), slalomant entre les clichés et se montrant bien plus politique et engagé qu'à leur accoutumé (le film fait lourdement écho au contexte social de la France d'aujourd'hui), Nakache et Toledano témoignent d'une maturité étonnante dans leur cinéma, tout en apportant à Samba quelques petites touches qui faisaient le sel de leurs films, à savoir un happy end enthousiasmant et des ruptures de tons maitrisés, durant près de deux heures définitivement beaucoup trop courte.

Dans la peau du héros Samba, Omar Sy au jeu subtil et tout en nuance, se joue de nos attentes et incarne à la perfection un sans-papiers touchant, loin du stéréotype du " gentil " immigré redouté.
Captant avec sensibilité et intelligence toutes les facettes de cette homme courageux et pétri d'espoir, qui ne cherche qu'à se faire accepter, il porte le film sur ses larges épaules, se paye ici ni plus ni moins que son meilleur rôle à ce jour et s'inscrit même déjà dans la short-list des futurs nominés au prochain césar, avec certainement Romain Duris (Une Nouvelle Amie) et Jean Dujardin (LaFrench).


A ses côtés, la lumineuse Charlotte Gainsbourg, libérée de ses rôles extrêmes et sexe chez Lars Von Trier, jongle admirablement sur le fil tenu du tragi-comique dans la peau de la dépressive Alice, portée par une mélancolie et sens du comique aiguisé - déjà entrevu dans les films de son compagnon Yvan Attal.
L'alchimie entre elle et Sy, hautement improbable et surprenante, fait des merveilles.

A leurs côtés, dans des seconds-rôles joliment croqués, on ne peut que souligner également les prestations parfaites d'un Tahar Rahim jouissivement génial en sans-papiers brésilien, d'une Izia Higelin (aussi bonne chanteuse qu'actrice) excellente en bénévole/étudiante grande gueule, mais aussi de Youngar Fall, poignant dans la peau de l'oncle de Samba.

Rugueux, complexe et énergique tout autant que bouleversant et méchamment attachant à la fois, l'improbable Samba (improbable puisque qui aurait cru qu'un sans-papiers aurait pu être le héros d'une comédie romantique ?) est en tout point une réussite, une histoire forte et poignante sous forme de virage dramatique subtilement et magnifiquement négocié par des cinéastes dont on signe déjà d'avance pour vivre leurs prochaines aventures sur pellicules.


Dire que l'on est face ici au meilleur film français de 2014 est peut-être un jugement un poil trop hâtif pour le moment (quoique), tout comme Intouchables en son époque,dont il est diamétralement opposé.

N'empêche qu'il est bien l'un des seuls long métrage de l'hexagone sur les douze derniers mois, qui pousse avec un enthousiasme non-feint, son spectateur à le défendre corps et âmes.

Vive Samba !


Jonathan Chevrier



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