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[CRITIQUE] : Le Vent se Lève


Réalisateur : Hayao Miyazaki
Acteurs : avec les voix de : Hideaki Anno, Miori Takimoto, Hidetoshi Nishijima,...
Distributeur : The Walt Disney Company France
Budget : -
Genre : Animation, Drame.
Nationalité : Japonnais.
Durée : 2h06min.

Synopsis :
Inspiré par le fameux concepteur d’avions Giovanni Caproni, Jiro rêve de voler et de dessiner de magnifiques avions. Mais sa mauvaise vue l’empêche de devenir pilote, et il se fait engager dans le département aéronautique d’une importante entreprise d’ingénierie en 1927. Son génie l’impose rapidement comme l’un des plus grands ingénieurs du monde.
Le Vent se lève raconte une grande partie de sa vie et dépeint les événements historiques clés qui ont profondément influencé le cours de son existence, dont le séisme de Kanto en 1923, la Grande Dépression, l’épidémie de tuberculose et l’entrée en guerre du Japon. Jiro connaîtra l’amour avec Nahoko et l’amitié avec son collègue Honjo. Inventeur extraordinaire, il fera entrer l’aviation dans une ère nouvelle.





 Critique :

A la dernière Mostra de Venise, le précieux Hayao Miyazaki - dont la présentation de son Le Vent se Lève incarnait déjà un événement majeur - s'était empresser pour l'occasion, de briser le cœur de tous les cinéphiles un minimum séduit par son cinéma (soit 99,9% d'entre-nous), en annonçant qu'il prenait purement et simplement sa retraite avec son dernier métrage.

Et pas de faux départ comme ce fut le cas à l'époque, avec le sublime Princesse Mononoké, cette fois le bonhomme à l'air foutrement bien campé sur ses positions.

Inutile de dire donc que le septième art mondial perd gros, très gros, et qu'il était d'un impératif certain pour moi, de foncer à toute vitesse et les yeux fermés en salle, pour mirer cette ultime testament sur pellicule d'un génie à la filmographie sans aucune fausse note.

Et si il était évident avant même sa vision, que cette ultime péloche serait d'une réussite indéniable, force est d'admettre tout de même que Le Vent se Lève est un chef d'oeuvre merveilleux, une conclusion surprenante à une carrière sans nul pareil.


Le Vent se Lève ou une histoire au pluriel, adaptant à la fois le roman éponyme de Tatsuo Hori (qui conte la maladie  d'une femme dans un sanatorium de Nagano), biopic animé de l'ingénieur nipon Jiro Horikoshi (concepteur des chasseurs Zero, usés par les kamikazes durant la seconde guerre mondial) et mise en image de la citation de Paul Valéry : " Le Vent se Lève, il faut tenter de vivre ".

Dès cette citation, autant dire que le ton du métrage est tout donné, il incarnera un drame hautement sérieux et grave, comme jamais ne l'a été auparavant, une péloche estampillé Miyazaki.

Via le prisme de la vie de Jiro, le personnage le plus passionné de la filmo du cinéaste, Miyazaki questionne et interroge sur la création, sous toutes ses formes.
Quelle soit dévorante - au point de pousser au repli sur soi -, obsédante - au point que rien ne passera avant elle, même l'amour -, ambigu (Jiro ne cessera jamais ses travaux, même si il sait que son invention servira autant l'homme qu'elle le détruira) et même dictatrice vu les sacrifices qu'elle force souvent à accomplir, le cinéaste l'a décortique sous toutes ses formes sans pour autant la juger une seule seconde.

Car qu'il le veuille ou non, Jiro est porté par cette créativité, comme porté par un vent auquel il ne peut pas résister.
C'est dans ce constat emplit d'un fatalisme certain, que Le Vent se Lève tire toute sa force, ou comment les rêves d'une vie influent considérablement sur le cours des choses si ils sont menés à bien, qu'ils soient bon ou mauvais, puisque souvent même les plus belles intentions peuvent nourrir les pires catastrophes.


D'une mélancolie bouleversante, tout aussi cruel (la relation crève cœur entre Jiro et Nahoko) que noir (le contexte historique du moment : la pauvreté, la montée du nazisme et l'entrée imminente en guerre du Japon), ne trahissant jamais la notion humaine de son propos (outre la tragique love-story, le film peut également se voir comme un drame romanesque sur un homme face à son destin et les obligations de son génie) et jouant toujours habilement des sens opposés de son élément central, le vent - beau quand il est à l'origine de la rencontre entre les deux amoureux, terrible quand il provoque des séismes -, le film éblouit constamment son spectateur - l'esthétique est onirique et majestueuse -, tout autant qu'il déroute volontairement.

Si la dureté du film rappelle clairement le Tombeau des Lucioles d'Isao Takahata, elle est surtout la preuve indéniable que Miyazaki s'y livre comme jamais, tant il n'épargne rien à ses spectateurs et que les parallèles entre lui et son œuvre sont d'un naturel foutrement flagrant.

Citant autant sa passion pour l'aviation (comme pour Porco Rosso) que son dégout de la guerre (comme pour Le Château Ambulant), le cinéaste parle également avec force de son père (directeur de Miyazaki Airplanes, influant dans la production des chasseurs Zero) et de sa mère malade (comme pour Mon Voisin Totoro), une partie autobiographique injecté avec intelligence et émotion.

Mature, grave et sans aucune fantaisie (le manque de fantastique et de symbolique imaginaire serait bien là, son seul défaut majeur), éprouvant - le mal y est partout , que ce soit dans le corps d'une amoureuse impuissante ou dans les machines de guerre qui bouffent un monde au bord du chaos -, au rythme lent et déroutant, les deux heures du Vent se Lève sont d'une beauté à couper le souffle qui vous prennent à la gorge comme rarement un film d'animation aura réussi à le faire jusqu'à présent.


Triste, magnifique et infiniment bouleversant, le métrage remue son spectateur dans une émotion intense et constante, causée à la fois par la réussite de l’œuvre, mais surtout par le sentiment que l'on assiste - cette fois - au dernier métrage d'un maitre absolu.

Si tel s'avérait finalement être le cas, Hayao Miyazaki n'aurait pas pu partir plus en beauté...


Jonathan Chevrier


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