Breaking News

[CRITIQUE/RESSORTIE] : Amours Chiennes



Réalisateur : Alejandro González Iñárritu
Acteurs : Gael García Bernal, Goya Toledo, Alvaro Guerrero, Jorge Salinas,...
Distributeur : Metropolitan FilmExport
Budget : -
Genre : Drame, Thriller.
Nationalité : Mexicain.
Durée : 2h33min.

Date de sortie : 1er novembre 2000
Date de ressortie : 29 octobre 2025

Synopsis :
Mexico. Un tragique accident de voiture. Les extremes de la vie, sous l'angle de trois histoires radicalement différentes: Octavio, un adolescent qui a decide de s'enfuir avec la femme de son frère; Daniel, un quadragénaire qui quitte sa femme et ses enfants pour aller vivre avec un top model; El Chivo, un ex-guérillero communiste devenu tueur a gages, qui n'attend plus rien de la vie.





Au-delà de la chance et du confort assez incroyable que peut nous offrir de nombreux distributeurs (quand bien même, assez paradoxalement, le cinéma de patrimoine ne fait pas péter plus que de raison les scores du box-office maison), il y a toujours quelque chose de fascinant dans le fait de scruter les premiers efforts de cinéastes talentueux et - plus où  moins - acclamés, tant ils permettent parfois de déceler les premières graines de ce qui a constitué un tout fascinant au fil du temps.

Amours Chiennes (titre aussi chic que furieusement à-propos), estampillé premier long-métrage d'un Alejandro González Iñárritu pas encore adoubé par la cinéphilie mondiale, correspond parfaitement à cette définition, fantastique et douloureux mélodrame tout en violence et en passions perdues dans les rues désolées d'un Mexico dont le cinéaste colle sa caméra au plus près de toutes ses classes, des marginalisés aux défavorisés en passant par les plus aisés.

Fragmenté en trois chapitres bien distincts (mais liés par un événement essentiel, un tragique accident de voiture et une présence accrue, d'où le titre, de plusieurs représentants du meilleur ami de l'homme - aux combats heureusement simulés -, qui reflètent pleinement les tensions qui subsistent entre chaque protagoniste) comme autant histoires d'amour aussi obsessionnelles et poignantes que méchamment vouées à l'échec : l'amour d'Octavio pour la femme enceinte de son frère aîné, Susana; celui plus sombre et dépressif de la jeune mannequin Valeria pour Daniel, rédac chef d'un magazine d'âge mûr et prospère, qui a quitté sa famille pour vivre cette union, avant qu'elle ne soit frappé par un douloureux accident de voiture qui lui fera perdre l'usage d'une jambe; et enfin celui de El Chivu, un ancien guérillero/tueurs à gages devenu sans-abri, pour sa fille désormais adulte et qu'il avait abandonné par le passé, Maru.

Tragédie urbaine prenant les courbes d'une fresque humaine dense et bouleversante au réalisme aussi lucide que profondément crue, dont l'écriture vient scruter méticuleusement les rêves comme les obsessions de personnages pétri de failles dont la fatalité de leurs existences n'a de cesse de les dépasser; Amours Chiennes marque avant tout et surtout la rétine par l'assurance comme la force particulièrement mordante de sa mise en scène - et de son montage affuté -, opérée caméra à l'épaule comme pour mieux capturer l'étouffement progressif et inéluctable de figures piégées par leurs propres destinées.

Un film intense tout en rage et en douleurs où l'amour n'est que le mirage d'une spirale infernale qui creuse les blessures intimes plus qu'il ne les panse, première pierre imposante d'un édifice cinématographique insaisissable et maîtrisé qui, visiblement, n'a pas encore fini de nous étonner par son éclectisme comme par son désir de cinéma savoureusement exacerbé.


Jonathan Chevrier