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[FUCKING SERIES] : Alien: Earth : Forgetting Neverland



(Critique - avec spoilers - de la saison 1)



Entre l'actionner et le slasher, la tragédie grecque et le space opera, entre la dévotion et l'extension timide mais essentielle de la mythologie (la bonne idée de placer en son cœur une union familiale entre humain et humanoïde, redistribuant les cartes des rapports préétablis de la saga par une légère et troublante humanité, ou encore de contextualiser par l'image la croissance rapide du xénomorphe), Alien : Romulus ramenait la franchise sur le devant de la scène en trouvant son équilibre dans un entre-deux qui collait totalement à sa propre étiquette cinématographique (entre Alien, le huitième passager et Aliens : Le retour), et qui collait même au propre statut de funambule de toute la saga, constamment entre animalité et humanité, entre vision d'auteurs et franchisation à outrance (beaucoup trop de fois entre dans cette introduction, pardonnes nos barbarismes cher lecteur).

Un opus qui ne cherchait jamais à légitimer son existence en se prenant les pieds dans le tapis d'une expansion inutile de la mythologie original, mais n'arrivant pas totalement (la faute à son fan-service marqué) à exister par lui-même, même dans son chaos sanglant et enthousiasmant.
Du Disney tout craché, sournois mais malin, qui flatte le fan service sans jamais trop péter dans la soie de l'originalité - parce qu'incapable de réellement le faire, certes.

Copyright Disney / FX

Autant dire donc que l'on attendait beaucoup d'une déclinaison télévisée - la première - du mythe par Noah Hawley (annoncée encore plus coûteuse que l'excellente Shogun), qui promettait de pousser le tandem Mickey/Weyland-Yutani sur des rails moins conventionnels et plus expérimentaux, sans pour autant totalement renier les éléments fondamentaux de la franchise au cœur d'un récit à la fois ouvert et captivant.
Mauvaise pioche, tant la première saison s'apparente de tout son long à une tentative médiocre de réaliser un film Alien étiré en longueur sur plus de six heures, sacrifiant son rythme comme son suspense sur l'autel de l'ennui.
Une sorte de remake de Big flanqué dans une île sauce Isla Nubar du pauvre, façon sous-Westworld saison 1 (la plus complète et prenante du show) à la subtilité absente et qui efface consciemment tout potentiel conflit de ses arcs narratifs, dans sa volonté de triturer sans une once de complexité la notion de conscience humaine (difficile de ne pas lier les personnages de Ford et Buy Kavalier, comme ceux de Dolores et Wendy), à travers un concept pour le coup accrocheur : implanter les esprits d'enfants en phase terminale dans des corps synthétiques d'apparence adultes, sauf que les mômes continueront tout du long à se comporter comme des gamins...

Un véritable désastre (tout juste sauverons-nous l'alien-oeil, meilleur personnage du show avec Joe, le frère maladroit mais attachant de Wendy) truffé de facilités narratives et de séquences effroyablement embarrassantes, dont aucun personnage ne mérite qu'on s'y intéresse et encore moins qu'on s'y identifie (à l'image du personnage de Boy Kavalier dont on nous répète sans cesse son intelligence, alors que la série met tout en œuvre pour que chacun de ses actes soit à l'opposé).
Le tout plombé par l'obsession maladive d'un Hawley qui ne peut tout simplement pas résister à l'envie d'enchaîner d'innombrables références au mythe de Peter Pan (via le symbolisme le plus pachydermique de la télévision US de ces dernières années), ni les clins d'œil embarrassants et sans profondeur à Blade Runner, au point même de totalement laisser à la dérive ses thématiques transhumanistes et ses réflexions existentielles.

Copyright Disney / FX

Roulant péniblement sa bosse jusqu'à un final tellement bardé d'incohérences que cela frise au génie pur (malgré des créatures extraterrestres en liberté, l'invasion imminente des Weyland-Yutani où encore la transformation des hybrides en machines à tuer férocement diaboliques, la quasi-totalité de la distribution sort indemne de cette première saison), le show abat fébrilement ses cartes pour donner envie à son auditoire de perdre à nouveau plusieurs autres heures de son existence via une seconde saison déjà inévitable, histoire de suivre sans passion les futures pérégrinations déglinguées de sa Wendy/Mary Sue dotée de super pouvoirs inexplicables et d'un toutou xénomorphe (pire traitement physique et narratif de la bête, de toute la saga).

Une seconde salve malade qui nous démontrera, assurément, avec encore plus de clarté et d'élégance putassière, que les vrais monstres ne sont ni Wendy, ni ses compagnons hybrides mais bien les exécutifs d'une firme aux grandes oreilles qui nous a imposé cette diatribe indigeste et furieusement dispensable, pissant encore un peu plus franchement sur le cadavre d'une saga qu'elle cherche moins à faire renaître de ses cendres, qu'à l'enterrer gentiment mais sûrement - après un gangbang mignon - dans le cercueil en colza de la franchisation interminable et outrancière.
S.O.S. Alien en détresse, rappelez Ridley Scott... et vite.


Jonathan Chevrier