[CRITIQUE] : Voyage avec mon père
Réalisatrice : Julia Von Heinz
Acteurs : Lena Dunham, Stephen Fry, Zbigniew Zamachowski, Tomasz Włosok,...
Distributeur : Haut et Court
Budget : -
Genre : Comedie Dramatique, Drame, Comédie.
Nationalité : Français, Allemand, Polonais, Américain.
Durée : 1h52min
Synopsis :
Une journaliste new-yorkaise propose à son père, rescapé des camps, un voyage en Pologne, son pays d’origine. Elle cherche à comprendre l’histoire de sa famille, tandis que lui n’a aucune envie de déterrer le passé. Un voyage qui s’annonce compliqué !
Hasard douloureux du calendrier, Voyage avec mon père, le nouvel effort de la réalisatrice et scénariste allemande Julia Von Heinz, va subir malgré lui le jeu putassier - mais parfois légitime - des comparaisons avec le brillant A Real Pain de Jesse Eisenberg, et ce même s'il a été chapeauté plusieurs mois auparavant.
Alors certes, sur le papier, les deux péloches boxent sensiblement dans la même catégorie avec leurs récits tournés autour d'un voyage familio-mémoriel en Pologne, sous fond de traumatisme de l'Holocauste et d'une dynamique tonale jouant autant la carte de l'humour que de l'émotion.
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Mais les similarités se dissipent au fond assez vite : le film de Von Heinz adapte (tout en extirpant quelques points pouvant paraître gênant) le roman semi-autobiographique de la romancière et essayiste Lily Brett, fille de survivants de l'Holocauste, articulé autour du voyage père-fille à la fois dans les souvenirs du premier - en terres loin d'être inconnues donc - qu'au plus profond d'une relation tendue - mais pleine d'amour - , le tout sous fond d'exploration des thèmes de la culpabilité du survivant où encore d'un antisémitisme intemporel.
Soit Ruth Rothwax, journaliste new-yorkaise perpétuellement irritable et sensiblement rongée par un dégoût profond d'elle-même (un mariage raté, ses problèmes de poids,...), qui cherche à comprendre le passé comme l'héritage familial porté par son paternel Edek, un Juif polonais faussement insouciant qui n'a pas fondamentalement envie de revivre les horreurs d'hier, à tel point qu'il sabote ce road trip tout en n'étant pas moins heureux de profiter du voyage pour partager du temps avec la chair de sa chair.
D'un côté, l'aîné qui sait mais ne veut plus y penser, de l'autre une jeune génération un brin prétentieuse qui veut ressentir pour mieux comprendre ce qu'elle n'a pas pu vivre, soit deux déclinaisons conflictuelles d'un mal profondément enraciné avec lequel chacun negocie comme il le peut, au sein d'une existence pleine de colère et de peines.
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Sans jamais péter dans la soie de l'originalité, Voyage avec mon père incarne une séance à la fois familière et sensiblement déroutante, tout autant drôle qu'elle est chargée en émotions et en maladresses, un équilibre évidemment précaire et loin d'être subtil (sauf, peut-être, dans toute sa belle et digne séquence à Auschwitz) qui tient cela dit bon tout du long grâce aux prestations touchantes d'un tandem Lena Dunham et (surtout) Stephen Fry particulièrement affuté.
Pas une balade cinématographique indispensable donc, mais loin d'être désagréable à faire.
Jonathan Chevrier
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