Breaking News

[CRITIQUE] : Les Reines du Drame


Réalisateur : Alexis Langlois
Acteurs : Louiza Aura, Gio VenturaBilal Hassani, Nana Benamer,...
Distributeur : Bac Films
Budget : -
Genre : Comédie Dramatique, Musical.
Nationalité : Belge, Français.
Durée : 1h55min.

Synopsis :
2055. Steevyshady, youtubeur hyper botoxé raconte le destin incandescent de son idole, la diva pop Mimi Madamour, du top de sa gloire en 2005 à sa descente aux enfers, précipitée par son histoire d’amour avec l'icône punk Billie Kohler. Pendant un demi-siècle, ces reines du drame ont chanté leur passion et leur rage sous le feu des projecteurs.



Critique :



Et si Queens of Drama, estampillé premier long-métrage plein de promesse et de singularité du wannabe cinéaste Alexis Langlois, s'avérait in fine une meilleure révérence au monument A Star is Born, que le remake même du film opéré par Bradley Cooper ?
Question bitchy certes, mais pas si dénué de sens que ça finalement.

Vous avez - presque - deux heures pour fonder votre propre ressenti à travers une expérience savoureusement autre et généreuse, véritable film funambule entre la romance queer débridée et la comédie musicale déglinguée tout en paillettes, en passion et en fureur; sorte de fusion assumée entre les cinémas de De Palma, Waters et Araki, qui n'aurait pas peur d'embrasser son extravagance et tous les extrêmes quitte à s'en brûler les ailes.

Copyright LES FILMS DU POISSON

Alors oui, évidemment, qui dit De Palma impute que la présence de Phantom of the Paradise n'est jamais très loin, lui qui hante assez franchement ce qui revendique pleinement comme une exploration a la fois pop et rock, sérieuse et ironique de toute la contradiction sournoise de l'industrie musicale de ses vingt dernières années, culture à la dominante patriarcale capable de créer, promouvoir des simili-divas ingénues et - supposément - émancipées, destinées à incarner des modèles pour des millions de jeunes femmes et hommes tout en niant, dans le même mouvement, tout possibilité d'un élan de féminisme, totalement réifié, au sein de sa structure industrialisée.

Le tout enlacé autour d'une romance entre Mimi Madamour, future popstar mainstream que le milieu va transformer, sexualiser à outrance puis briser, et Billie Kohler, dont les regards se sont croisés au cours d'une émission de télé-crochet, elles dont les expériences radicalement différentes vont à la fois caractériser leur hemins divergents vers la notoriété, mais aussi porter la dichotomie entre l'American Idol-isation (où n'importe quelle autre émission qui conforme la femme à un standard limitant et même parfois dégradant, t'as capté l'idée) de la pop dite grand public, policée à mort et prônant une féminité hétéro, et une scène musicale underground à la musicalité sensiblement plus travaillée et personnelle.

Deux figures dont la passion sera directement impactée par le pacte Faustien de la première, et la nécessité de cacher son homosexualité pour conserver son semblant de popularité - mais point l'amour de l'élu de son cœur -, avant qu'elles ne sombrent ensemble dans les limbes des starlettes oubliées.

Copyright LES FILMS DU POISSON

Tout n'est évidemment pas parfait sous le feu des projecteurs et pourtant, il y a une authenticité folle, un charme incandescent qui se dégage de cette fable satirique et colorée, aussi bien dans sa manière de surnager sans couler dans l'imaginaire queer, d'exposer la toxicité de toute une industrie, autant que la douceur maladive et au final tout aussi dangereuse, du fan système orchestré/manipulé dans son escarcelle (une culture Internet nocive qui n'a fait que se vautrer encore plus dangereusement dans ses dérives); le tout avec un Langlois qui s'amuse à épouser fougueusement les courbes familières de la comédie musicale à la fois romantique et populaire, à l'esthétique férocement camp.

Tout menace souvent d'imploser, comme les cœurs, dans Les Reines du Drame mais les pulsations folles et mélancoliques qui lui servent de moteur tiennent continuellement l'édifice romanesque en place, met du strass et des paillettes dans les yeux de son auditoire.
On appelle ça un put*** de premier effort.


Jonathan Chevrier