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[FUCKING SERIES] : Mr. McMahon : You can't handle the truth



(Critique - avec spoilers - de la mini-série documentaire) 


Au-delà de la somme rondelette de 5 milliards de dollars dépensée par la plateforme pour détenir les droits de diffusion exclusif du show phare de la WWE, Monday Night Raw, il était évident que Netflix n'allait pas uniquement se contenter de jouer la carte du simple diffuseur, d'autant que la fédération de catch la plus populaire au monde (n'en déplaise aux fans de l'AEW), à en son sein suffisamment d'histoires extraordinaires mais également de casseroles assez dingues, pour remplir une grille de documentaires sur toute une décennie - avec, à priori, un accès illimité au catalogue d'images de la fédé. 

Et parce qu'il faut bien commencer quelque part une petite salve de mini-séries documentaires, pourquoi ne pas directement s'offrir le plus gros - et problématique - morceau : son fondateur Vincent Kennedy McMahon, grand artisan de la popularité monstrueuse du catch outre-Atlantique et même à travers le globe, figure aussi douée pour les affaires (on oubliera la XFL) que profondément égocentrique et problématique, dont la longue et horrible histoire des nombreux abus sexuels - et même de trafic présumés - vient tout récemment d'être rendue publique... on appelle ça avoir le sens du timing.

Copyright Netflix

Chapeauté par Chris " Tiger King " Smith et Bill Simmons, Mr. McMahon au sous-titre on ne peut plus adéquat - « Mastermind. Madman » -, attirait gentiment son fan de catch pour la belle odeur de souffre qu'il dégageait, cette idée d'un potentiel " True crime " cher à la firme au Toudoum, qui reviendrait sans prendre de gants sur le succès, la popularité plus la chute publique grandiloquente du bonhomme, avec des témoignages et une enquête approfondie qui viendrait à percer les secrets bien gardés d'une fédération qui, quoiqu'on en dise, a toujours su protéger son image et orchestrer des défenses publiques solides en sa faveur (coucou Chris Benoit, Owen Hart,...).

Mais il y avait une couille dans le pâté de cet espoir vite relégué au fond des tiroirs : la présence du Vince himself à la production, impliquant dès lors un contrôle et/où une influence certaine sur le contrôle de ce qui sera dit où montré (sur la WWE, qui l'a soigneusement évincé, comme sur lui-même, mais surtout sur la dite représentation de ce qui est longtemps resté la tête dirigeante numéro 1 de la WWE, avant le passage sous le pavillon TKO - d'autant qu'il aurait tenté d’acheter le documentaire à Netflix, pour empêcher sa diffusion.
Et malheureusement, ça ne manque pas, car si le show se fait parfois accablant envers son sujet, certes beaucoup pour qui ne connaît pas vraiment le bonhomme, il n'en est pas moins presque à l'image de tous les documentaires préconçus à la chaîne par la firme (avoues, toi aussi, tu as dépensé une fortune en DVD pour les collectionner) : tout en auto-congratulation et en célébration polies. 

Car oui, s'il est connu pour de nombreux faits abjects (entre autres, un viol présumé de l'arbitre Rita Chatterton, un réseau de pédophiles sous sa surveillance au début des années 80,...), le documentaire laisse néanmoins l'idée désagréable de non pas le dédouaner, mais de ne pas trop voguer vers les sujets qui fâchent, de survoler les sujets brûlants et de présenter le bonhomme pas uniquement comme un monstre (ce que les faits démontrent pourtant), comme cet homme d'affaires impitoyable et sans âme qu'il a toujours su si bien incarner sur les écrans, mais comme un être qui n'était pas tant la caricature heel qu'il a tant vanté, comme si tout cela n'était qu'un versant sombre et dramatique de sa personnalité, comme si la fiction s'invitait dans la réalité pour fournir une sorte de - légère - excuse à sa conduire véritablement révoltante.


Copyright Netflix

Le tout noyé dans une célébration de tous ses accomplissements plus où moins louables pour faire de la WWE, la fédération majeure du divertissement sportif.
Au final, il y a un vrai sentiment d'inachevé à la vision de cette mini-série, sans doute accentuée par des attentes qui ne pouvaient absolument pas être répondues à travers elle (Netflix ne peut décemment pas plomber ses propres intérêts, surtout avec 5 milliards de dollars dans la besace).

Le tandem Smith et Simmons dresse néanmoins un portrait plutôt juste de la WWE à travers la face " sombre " de McMahon, et dans un monde tout en paraître et en mensonges, il ne faut pas s'attendre à plus tant les masques ne sont pas encore prêts à tomber, et la vérité encore loin d'être dite où, tout du moins, pas par la WWE au sein d'un projet sur lequel elle peut avoir une quelconque influence...


Jonathan Chevrier