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[CRITIQUE] : Speak no evil


Réalisateur : James Watkins
Acteurs : James McAvoy, Mackenzie Davis, Scoot McNairy, Aisling Franciosi,...
Distributeur : Universal Pictures International France
Budget : -
Genre : Épouvante-Horreur.
Nationalité : Américain, Danois.
Durée : 1h50min.

Synopsis :
Une famille américaine passe le week-end dans la propriété de rêve d'une charmante famille britannique rencontrée en vacances. Mais ce séjour qui s’annonçait idyllique se transforme rapidement en atroce cauchemar.



Critique :



On ne reviendra pas sur l'absurdité, purement Hollywoodienne, de s'attaquer au remake d'un film dont la sortie est tellement récente, que le souvenir de sa séance est encore vivace pour quiconque s'est aventuré à le découvrir, mais il y avait tout de même une curiosité certaine, bien que malsaine, à l'idée de voir ce que donnerait Speak no evil sauce James Watkins, juste histoire de voir s'il conserverait ne serait-ce qu'une once de la puissance de son matériau d'origine éponyme, signé par le Danois Christian Tafdrup.

Un pur morceau de terreur psychologique à la lisière du drame social réaliste et désespérée, imprimé par le sadisme brutal et dérangeant du cinéma d'Haneke, qui incarnait une impitoyable et déroutante satire sociale autant qu'une étude troublante et fascinante de la psychologie humaine.

Copyright 2024 Universal Studios. All Rights Reserved.

Exit la Hollande donc et bonjour les terres anglaises, pour cette relecture vouée à courtiser tous les spectateurs anglophones - mais pas que - allergiques aussi bien aux sous-titres qu'aux divertissements sans visages familliers, sans pour autant totalement bouleverser la trame initiale : deux couples fraîchement amis, les britanniques Paddy et Ciara, et les américains Ben et Louise, se retrouvent dans la maison de campagne des premiers pour le week-end, et les seconds s'entêtent à rester même lorsque l'hospitalité de leurs hôtes se fait plus agressive et étrange, les menant lentement mais sûrement vers d'horribles révélations.

Place vite donc au jeu des comparaisons, et s'il est vite évident que cette redite Hollywoodienne arpente un terrain résolument plus conventionnel et moins radical que son illustre aîné (la crainte majeur entourant toute relecture/appropriation, pas uniquement US), ce n'est pas pour autant qu'elle est totalement dénuée d'intérêt... loin de là même, tant chaque petit degré de séparation vient apporter sa nuance, plus ou moins efficace et/où pertinente certes, mais qui élèvent le film bien au-delà du simple remake fragile et apathique comme la production outre-Atlantique nous a souvent habitué.

Le changement de nationalité des personnages de prime abord, bancal sur le papier (c'est justement l'opposition des mœurs danoises et hollandaises, qui justifiaient le rapport de force dominant/dominé du premier), mais plutôt habile dans sa manière de bousculer le champ des convenances vers une dynamique de genres et de politique tout aussi corsée, où les hôtes jouent directement sur les problèmes conjugaux, leurs manque de confiance (à la fois en eux et en leur union, ce qui les différencient totalement du tandem Bjørn/Louise), leurs frustrations et les inquiétudes profondément ancrés de leurs visiteurs, pour les mener au pire.

Copyright 2024 Universal Studios. All Rights Reserved.

Même l'ambiguïté entourant leurs désirs profonds est exarbé, notamment dans les rapports entre le mâle alpha Paddy et l'homme faible Ben (puisque trompé, sans emploi et suppliant presque sa compagne de rester à ses côtés, dans un processus de culpabilisation tout aussi manipulateur), le second ne voulant pas uniquement être premier, mais peut-être tout simplement avoir envie de lui, être avec lui.
Des rapports troublés et troublants que l'on retrouve cela dit nettement moins du côté des enfants, versions à la fois plus adolescentes et donc plus édulcorés de leur pendant originaux, victimes moins innocentes (puisque conscientes des déviances et des maux parentaux) et de facto plus actives qui atténuent l'aspect choquant de l'épilogue (pas de langue coupée, les enfants sont épargnés et les bons américains s'en sortent).

Mais le vrai bouleversement entre les deux films résident finalement dans leur complémentarité évidente, même dans leurs travers.
Si la version danoise misait sur une terreur viscérale et palpable, appelée à exploser dans un final sombre et féroce, elle mettait douloureusement de côté la crédibilité des motivations de ses personnages (dont les actes devenaient de moins en moins plausibles), là où la version américaine accentue le développement aussi bien de chaque individualité (quitte à grossir le trait, voire même à s'appuyer sur le jeu excessif de ses interprètes, comme avec un James McAvoy on fire), que de leur rapport pour mieux nourrir une tension allant crescendo, jusqu'à un final pourtant bien moins impactant.

Certes, si Speak no evil version US/Blumhouse se fait in fine moins radical et plus manichéen, thriller bien plus physique que psychologique et un peu trop motivé par l'idée de ne jamais trop mettre à mal les certitudes de son auditoire; il n'en est pas moins un film de genre tendu qui se revendique lui aussi, autant comme une satire sociale (encore une fois moins impactante, la faute à son final) pas si éloigné de la comédie de mœurs à l'humour grinçant, qu'un thriller à combustion lente.

Copyright 2024 Universal Studios. All Rights Reserved.

Tout n'est qu'une question de nuances donc, et au sein d'une culture de la redite savamment orchestrée par une Hollywood à l'originalité/créativité absente, ce remake n'est peut-être pas une bouffée d'air frais salutaire, mais au moins une séance qui justifie joliment son existence.
Et c'est déjà pas mal (beaucoup).


Jonathan Chevrier





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