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[INSTANT LITTÉRATURE] : #7. Just Kids (Patti Smith)

" Quoi, un site centré sur le cinéma qui papote littérature, mais quelle hérésie ! ".Voilà une manière polie de dire " qu'est-ce qu'on est en train de foutre ", mais à une heure ou la littérature n'a jamais autant été liée au septième art (ah, Hollywood et son manque d'originalité...), nous avons trouvé de bon ton, en temps que media, de voir un petit peu plus loin que le bout de notre plume, et d'élargir notre prisme de partage culturel en papotant littérature donc, sans pour autant que cela soit lié au cinéma - même si cela arrivera certainement souvent.

Armez-vous de vos lunettes, d'un marque-page et d'un potentiel chèque-cadeau FNAC pour faire vos emplettes, et lisez un brin nos recommandations littéraires pleines d'amour, au coeur de notre nouvelle section : Instant Littérature !


#7. Just Kids de Patti Smith


Patti Smith, je la connais surtout pour son tube « Because the Night ». Je suis aussi capable de la reconnaître si je la vois en photo (dans la rue, ça serait autre chose, mais bon en même temps, dans la rue, je suis parfois à peine capable de reconnaître mes propres amis…). Bref, tout ça pour dire que mes connaissances concernant Smith sont assez limitées. Pourtant, depuis des années, son ouvrage autobiographique, Just Kids (2010), me faisait sérieusement de l’œil. Une fois le livre dans les mains, je me renseigne enfin sur un minimum sur Smith. Musicienne, écrivaine, ça va, je le savais par déduction. J’apprends aussi qu’elle est également photographe, peintre et surtout poète. Mais au fond, tout ça, j’allais aussi le découvrir dans son livre (parsemé de quelques poèmes et photographies en noir et blanc), qui rencontra un véritable succès dès sa sortie. Mon ignorance pourra certainement faire réagir (bouuhh je suis inculte !) alors que je suis certaine que beaucoup de potentiels lecteurs se sont retrouvés dans mon cas : ne pas connaître la carrière de Smith n’est pas un handicap pour apprécier Just Kids. Cela explique certainement pourquoi il est devenu un phénomène littéraire assez rapidement. 

On apprend évidemment à connaître Patti Smith via son texte qui se concentre principalement sur sa jeunesse. Mais surtout, comme le montre si bien sa désormais célèbre couverture, Just Kids retrace la relation fusionnelle entre Smith et le photographe Robert Mapplethorpe à la fin des années 60 / début des années 70. Smith trouve alors un juste équilibre entre le « je » habituel et attendu de l’exercice autobiographique et le portrait de Mapplethorpe, qui fut son amoureux et son ami. De plus, cela permet à son autrice de prendre un véritable recul sur elle-même, sur Mapplethorpe et plus globalement sur les événements qu’elle a vécus. Smith est touchante lorsqu’elle évoque son parcours semé d’embûches, elle qui a besoin de se chercher et de s’affirmer en tant qu’artiste. La relation qu’elle entretient avec Mapplethorpe est également passionnante. Smith fait preuve d’une véritable tendresse et bienveillance à l’égard de son compagnon, lui qui est toujours prêt à repousser ses limites et celles de l’art (notamment par son goût pour le sadomasochisme). Elle se montre également ouverte d’esprit et respectueuse lorsque le photographe découvre son homosexualité. Surtout, il permettra à Smith de se révéler en tant qu’artiste, elle qui ne semble pas avoir confiance en elle. Par ailleurs, les dernières pages sont particulièrement bouleversantes. Smith fait un saut dans le temps et se remémore des derniers instants de Mapplethorpe, condamné par le Sida, tandis qu’elle est enceinte. Le parallèle mort / naissance pourrait être lourd sur le papier mais pourtant il contribue bel et bien à cette émotion finale.


Patti Smith - (Nicklas Thegerström/DN/TT News agency via AFP)

Enfin, Smith fait voyager son lecteur dans le New York des années 60/70. On y croise dans cette ville poétique et inspirante (mais fragilisée par les ravages de la drogue) et surtout au mythique Chelsea Hotel de nombreux artistes comme Sam Shepard, Janis Joplin, Allen Ginsberg, Tom Verlaine ou encore William Burroughs. En tant que lecteur, on se sent même privilégié de côtoyer pendant un instant ce petit cercle privé qui semble hors du temps et du monde. Au fil des pages, on serait même capable d’entendre le tumulte de la ville, les notes de guitare ou même sentir la clope embaumant les lieux. On comprend alors mieux sous la plume de Smith la fascination qu’on éprouve encore pour cette période où toute liberté semble permise, même si on ne cherche pas non plus à tout idéaliser. Smith ne s’éternise pourtant pas dans dix milles descriptions, mais avec simplicité et humilité, elle réussit à retranscrire un rythme de vie à part, une énergie vivifiante, un état d’esprit qui semble si loin de nous, le lecteur des années 2010/2020.

Smith avait déclaré vouloir écrire une suite qui serait davantage concentrée sur sa musique, sa famille et son mari Fred « Sonic » Smith. J’espère que cette idée lui trotte toujours dans un coin de sa tête et qu’elle est encore prête à nous laisser entrer dans son intimité, à partager ses expériences et rencontres passionnantes. Nous serions nombreux à vouloir voyager encore un peu avec Smith.



Tinalakiller


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