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[CRITIQUE] : Tous nos jours parfaits


Réalisateur : Brett Haley
Acteurs : Elle Fanning, Justice Smith, Keegan-Michael Key, Alexandra Shipp, Luke Wilson,...
Distributeur : Netflix France
Budget : -
Genre : Romance, Drame.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h47min

Synopsis :
Deux adolescents suicidaires se rencontrent et réapprennent à aimer la vie.




Critique :


Que l'on soutienne ou non la démarche véhiculée par la première saison de la série 13 Reasons Why, elle aura au moins eu le mérite de mettre les pieds dans le plat d'un mal-être adolescent bien trop gentiment effleuré par la télévision US et même, plus généralement, par un septième art qui ne compte que trop peu d'irréductibles cinéastes justes dans les portraits qu'ils dressent d'une jeunesse contemporaine loin d'aller aussi bien qu'elle pourrait le laisser penser.
C'est toujours sur ce fil tenu, et peut de temps après le hashtag #BeKind, que Netflix enfonce le clou avec All The Bright Places - Tous nos jours parfaits par chez nous -, adaptation du roman éponyme de Jennifer Niven, ou les maux de l'adolescence sont cette fois traités et représentés avec infiniment plus de justesse et de mérite, et l'histoire s'articule on ne peut plus simplement autour d'un personnage lui-même brisé, s'échinant inconditionnellement de sortir un autre de l'obscurité pour le ramener vers la lumière.

Copyright Michele K. Short/Netflix

Soit Theodore Finch qui, en courant un matin, aperçoit sa camarade de classe Violet Markey envisager silencieusement de sauter d'un pont : elle s'est peu à peu mise en retrait de sa vie et s'est laissé emporter par le chagrin depuis le décès de sa sœur, un an auparavant.
Finch saute alors sur le rebord, offrant à Violet une main et une promesse tacite qu'elle n'est clairement plus seule dans sa lutte (une petite scène qui démontre l'importance d'un soutien dans instants de vraie détresse).
Lui aussi peut s'identifier à sa tristesse insondable et ses envies d'en finir, tant il s'efforce de chercher des raisons de rester en vie, alors que sa dépression aura injustement fait de lui un monstre auprès de ses camarades...
Leurs vies basculera véritablement lorsque leur professeur de géographie leur assigne un projet de récit de carnet de bord/voyage, qui les fait errer les étudiants dans toute l'Indiana, et les fait vagabonder hors des sentiers battus.
C'est à travers ces activités locales que le duo se lie, nourrissant une affection commune qui l'encourage à embrasser leur existence et à rester connecté avec les vivants.
Le problème, c'est que si l'un des deux retrouve peu à peu le goût d'être en vie, l'autre s'enfonce inéluctablement dans les limbes...

Copyright Michele K. Short/Netflix

Allant plus loin que son simple statut du " boy meets girl " et s'avèrant sensiblement moins gavé en potentiel lacrymal de teen movies aux héros romantiques dit " désespérés " (qui a dit l'irritant Nos Étoiles Contraires ?), All The Bright Places traite les sujets de la maladie mentale, de la dépression et de la gestion du deuil avec soin et précaution, et ou sa représentation du suicide est connue mais jamais montrée, ce qui en fait une expérience moins déclencheuse et de facto, d'autant plus percutante.
Extrêmement sensible sans tomber tête la première dans le bassin gluant de la mièvrerie indigeste (l'effusion de larmes est assez inévitable, mais c'est une catharsis méritée et non vulgairement recherchée coûte que coûte) et porté par des personnages ne jouant jamais vraiment la carte de la prévisibilité et n'ayant pas les mêmes capacités à gérer leurs maux (ce qui rend son auscultation de la jeunesse actuelle encore plus crédible et rafraîchissante), le film de Brett Haley ne serait sans doute peut-être rien sans les prestations subtiles et déchirantes de ses comédiens vedettes.

Copyright Walter Thomson/Netflix

Captivante et magistrale, laissant parfaitement parler le raffinement des nuances de son jeu, Elle Fanning rend la joie mais surtout la dévastation intérieur de son personnage palpable, là ou Justice Smith lui offre un répondant tout en charisme et en vulnérabilité, laissant transparaître toutes les possibilités d'un talent rarement aussi mis à l'épreuve jusqu'à maintenant.
Ils sont le coeur vibrant d'un teen movie intime, honnête et réfléchi, un authentique moment de cinéma plus proche des bandes du regretté John Hughes, que des bluettes récentes ne rendant pas toujours (pour être poli) justice au genre.


Jonathan Chevrier