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[COOKIE TIME] : #13. Les Quatre Filles du Docteur March, à travers les âges



C'est le Cookie Time. Un moment de détente pour parler cinéma. Alors installez vous dans votre canapé, prenez un thé et un cookie. Et c'est parti !





En 1868, l’autrice américaine Louisa May Alcott publiait un roman jeunesse inspiré de sa propre vie, Les quatre filles du Docteur March (Little Women, en version originale). Comme toute success story, ce triomphe immédiat prend Louisa May Alcott de court. Comment ce petit roman, qui raconte une histoire majoritairement domestique est devenu ce succès retentissant ? Pourtant, le livre n’a jamais été épuisé, traduit dans plusieurs langues, et il est vite devenu un classique de la littérature. Pour le prouver, en 2016, le New York Times l’a cité dans sa liste des cent meilleurs romans. La légende dit qu’il aurait dépassé les dix millions d’exemplaires dans le monde. Chaque lecteurs (et surtout lectrices) ont une histoire avec ce roman : découvert enfant, adolescent ou plus tard, nous avons tous été captivés par son récit d’une Amérique en pleine guerre de Sécession, par la tendresse qui se dégage de ses six femmes (les sœurs, leur mère Marmee et Hannah la domestique de la famille March). L’éditeur a vite demandé une suite à l’autrice, qui ne s’est pas fait prié.

Photo by Wilson Webb - © © 2019 CTMG, Inc.


Les filles du docteur March se marient est publié un an après (sous le titre Good Wives en version originale). Plus tard, ses deux romans n’en formeront plus qu’un, pour devenir une véritable fresque de la famille March, de l’enfance des jeunes filles, jusqu’au passage à l’âge adulte et surtout les mariages. Parce qu’un tel succès intéresse le cinéma, nous avons eu droit à un nombre conséquent d’adaptation. Certaines au temps du cinéma muet, maintenant introuvables, d’autres très connues. En 2019, Greta Gerwig sort son deuxième long-métrage, une nouvelle adaptation du roman intitulé sobrement Les filles du docteur March. Injustement boudé aux Oscars, le film est pourtant un succès critique, une adaptation fidèle tout en proposant un nouveau regard, moderne, féministe. Chaque film est le témoin de sa génération, de son époque. En quoi sont-ils différents ? Qu’est-ce qu’ils nous racontent de l’histoire inventée par Louisa May Alcott, quel est le regard ? Ce sont les questions auxquelles j’ai envie de vous répondre aujourd’hui, avec quatre adaptations cinéma : celle de George Cukor en 1933, de Mervyn LeRoy en 1949, de Gillian Armstrong en 1994 et celle citée plus haut, de la réalisatrice Greta Gerwig.

© 1949 - Warner Bros. All rights reserved



Louisa May Alcott et son oeuvre

L’oeuvre de Louisa May Alcott est si proche de sa vie qu’il est difficile de ne pas en parler quand il est question des Filles du docteur March. Contrairement à M. March, qui a perdu sa fortune par bonté de coeur, Bronson Alcott perd sa fortune en fondant une communauté utopique nommée Fruitlands, dont les membres devaient se laver à l’eau froide et manger des fruits et légumes poussant hors de terre. Après la dissolution de la communauté, M. Alcott ne voulut pas prendre un emploi, ce qui plongea la famille dans la précarité. Louisa, qui écrit depuis petite, décide d’envoyer un manuscrit sous forme de feuilleton à des hebdomadaires, qui fut accepté suite à un concours. Elle en gagnera cent dollars (une grosse somme pour l’époque). A l’inverse de ce que montre Greta Gerwig dans son film, Louisa n’a pas du argumenté pour que son roman soit publié. C’est même son éditeur qui lui commande une histoire susceptible de plaire aux jeunes filles. Elle lui répondit “je n’ai jamais fréquenté beaucoup de jeunes filles, à part mes sœurs [...], nos expériences et nos jeux étranges intéresseront peut-être les lectrices, quoique j’en doute”. La suite lui a prouvé le contraire. Suite à la publication du deuxième tome, Louisa pouvait subvenir sans mal aux besoins de sa famille.


Joseph Lederer/Columbia Pictures/Photofest 

Sa famille, justement, est au cœur de son oeuvre. Si son père est loin du simple homme qu’est M. March, ses sœurs et sa mère sont des inspirations inépuisables pour former la famille March. Sa soeur aînée Anna, devient Meg, un peu fleur bleue, une seconde maman. Anna, comme Meg épousent un John et s’installent pas loin de leurs familles. Anna aura des jumeaux, qui serviront à Louisa de modèles pour les jumeaux de Meg, Daisy et Demi Brooke. Lizzie et May sont respectivement Beth et Amy. Ses personnages sont si attachés à sa famille, que Louisa écrira le décès de Beth exactement comme celui de sa jeune sœur Lizzie qui meurt de la scarlatine à l’âge de vingt-deux ans. Elle est sa propre inspiration pour le personnage de Jo, qui est le personnage phare du roman (et des films). Par son caractère bien trempé, par sa fougue, sa passion, son anti-conformisme, elle est le miroir de Louisa, et a influencé la vie de nombreuses lectrices dont des célébrités telles que J.K Rowling, Gloria Steinem, Simone de Beauvoir, même la membre de la Cour Suprême Ruth Bader Ginsburg. Tout le monde veut ressembler à Jo. Si le livre en lui-même reste une fresque conforme aux mœurs de l’époque pour les jeunes filles, le sous-texte transmet les idées progressistes de l’autrice.

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Louisa, comme sa mère Abigail, était une suffragette engagée, a participé au Congrès des femmes en 1875 et a été la première femme à obtenir le droit de vote lors de l’élection d’un conseil d’établissement à Concord, Massachusett, sa ville natale. Être indépendante financièrement ainsi que maritalement était son but. Louisa a fini sa vie riche et libre, mais il n’en est pas de même pour son double, Jo. Ce sont ses lectrices qui l’ont incité à changer d’avis sur le sort de son héroïne qui ne devait pas se marier avec Laurie, comme tout le monde l’attendait. Ses lectrices et son éditeur ont finit de la convaincre, mais par esprit de contradiction, elle n’ira pas épouser Laurie, mais un professeur allemand, de vingt ans son aîné, répondant au doux nom de Friedrich Bhaer. Elle écrit à une amie, pour justifier ce choix très controversé “ Jo aurait dû rester célibataire, mais tant de jeunes filles enthousiastes m’ont écrit pour réclamer son mariage avec Laurie, ou n’importe qui qu’autre, que je n’ai pas osé refuser. Par esprit de contradiction, je l’ai casée avec un drôle de mari ! “.


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Son point de vue moderne et féministe pour l’époque a su traverser les âges,que l’on voit uniquement un récit familiale, un portrait de l’Amérique pendant la guerre de Sécession ou une histoire de jeunes filles apprenant à être des femmes, avec toute la complexité qui les entoure : la difficulté de gagner de l’argent pour soi, ce que l’on attend d’elles, en comparaison avec Laurie, la seule figure masculine de leur âge. Une histoire d’une jeunesse qui est vouée à finir pour pouvoir vivre les moments de triomphe et les tragédies familiales ou de société, qui nous façonnent, pour la vie. Les différents films mettent en exergue un point de vue distinct du roman de Louisa May Alcott, ce qui donne quatre films opposés, ancrés dans leur époque.


À chaque génération, son adaptation


Photo by RKO Pictures/Getty Images

Il est faux de se dire que Hollywood recycle ses films uniquement de nos jours. Il l’a toujours fait. Dans les années 30, un des producteur de la RKO David O. Selznick décide d’adapter des classiques de la littérature, dont Les 4 filles du docteur March. Pourtant, deux adaptations existaient déjà. Mais ce monsieur avait le nez creux (nous parlons du producteur de Autant en emporte le vent, un classique au succès critique retentissant). Que ce soit dans la version qui va nous intéresser, réalisé par George Cukor, ou les autres, Jo est un exemple de la femme moderne, l’incarnation de l’émancipation et de l'impertinence. En 1933, une actrice ressemblait à une Jo, trait pour trait : Katharine Hepburn. Un “garçon manqué”, qui ne mâche pas ses mots. Son fort tempérament et son refus des conventions en font une Jo idéale. De plus, elle était la star montante de la RKO, Selznick n’a pas eu à la chercher longtemps, Hepburn était celle qui leur fallait. Nous avons l’interprétation de Jo la plus agitée, tout film confondu. Le personnage est toujours en mouvement dans la version de Cukor, elle saute, court, grimpe, sans se soucier de son comportement ou de sa tenue. Ce n’est pas une surprise, quand on s’intéresse à la façon de travailler de l’actrice. Beaucoup de réalisateurs ont profité de son agilité et de son côté sportif pour intégrer des cascades à ses personnages. Katharine Hepburn était l’actrice du mouvement. Ici, elle court dans la neige, saute à travers des haies, n’arrête jamais de bouger ses bras, tout en intégrant une des caractéristiques du personnage de Jo : sa maladresse.

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Malgré son côté tête en l’air, Jo comprend le fossé qui existe entre son besoin de liberté (qui s’exprime visuellement) et sa condition de femme. A l’époque de Louisa May Alcott, devenir femme, c’était apprendre à faire des concessions entre son désir personnel et ce que l’on attendait des jeunes femmes. Concessions que Jo n’est pas prête de faire au début du livre. Hepburn n’arrête donc jamais de renier son genre, pour pouvoir fermer les yeux sur le chemin qu’elle doit entreprendre en tant que femme. Son arc narratif dans la version de Cukor est simple : cette Jo doit trouver et comprendre sa féminité. Le film fait en sorte de faire ressentir de l’empathie au spectateur pour cette Jo effrayée. Effrayée par sa propre féminité, effrayée de voir partir ses sœurs, surtout Meg sur le point de se marier. Ce côté empowerment du film vient uniquement de Jo et surtout de son actrice. Les autres personnages du film n’existent uniquement pour la ramener sur le droit chemin : être une “rebelle” ne peut qu’être une passade dans la vie d’une jeune fille, elle finira toujours par retrouver la raison (et un mari). Les spectateurs de l’époque (et aussi ceux d’aujourd’hui) sont tombés sous le charme de Katharine Hepburn. Mais son talent ne suffit pas à cacher les défauts du reste du casting. Joan Bennett, qui joue Amy, n’est pas crédible. Son Amy est trop superficielle et très peu présente dans le film (une raison à ça, l’actrice étant enceinte durant la production). Douglas Montgomery (Laurie) ne fait pas le poids face à Hepburn et campe un sidekick, toujours le sourire aux lèvres. Le reste du casting semble fade, ce qui laisse la place à Katharine Hepburn pour briller.

Photo by RKO Pictures/Getty Images - © 2004 Getty Images

Mais le succès critique et financier ne vient pas uniquement de l’actrice, il s’explique par l’époque de sa sortie. En pleine Grande Dépression, alors que le taux de chômage montait à 25%, les spectateurs ont pu s’identifier à la famille March. L’admiration de Jo face à la richesse des Laurence, les voir compter, économiser étaient des gestes familiers pour plus de la moitié des familles américaines. Le mélange de la pauvreté des March et le côté chaleureux de leur maison étaient l’équilibre parfait, entre empathie et émerveillement. Pas de misérabilisme, avec un côté irréel que seul le cinéma peut apporter. Ironiquement parlant, le film (qui parle en grande partie d’émancipation) a relancé les débats sur les mœurs au cinéma. En 1933, le code Hays n’était pas encore installé, mais la menace planait et le succès du film a pu faire pencher la balance vers un cinéma plus “respectable”. Le producteur B.P. Schulberg avait annoncé dans un article Maybe I’m wrong “the great success of Little Women has made everyone in production circles “clean-minded”. Many of us are concluding that Little Women proves that American public now wants only clean, sweet pictures”. La version de George Cukor est celle qui rend le plus justice à Jo, incarné par une Katharine Hepburn à bras le corps, celle qui met la guerre de Sécession au centre du récit. Malheureusement, le scénario ne rend que peu justice au texte de Louisa May Alcott, oubliant l’importance de la famille, et surtout du soutien sororale entre les sœurs March.

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En 1936, David O. Selznick crée son propre studio de production, la Selznick International Pictures et finit par revenir à l’histoire des March, pour une nouvelle adaptation, dans laquelle devait figurer Jennifer Jones (qui deviendra plus tard sa femme) pour le rôle de Jo. Pour des raisons inconnues, le film ne se fera jamais. En 1940, après avoir produit Rebecca de Alfred Hitchcock (et gagné l’Oscar du Meilleur Film), il ferme son studio et cède les droits à la MGM (Metro Goldwyn Mayer), qui était dans leur phase “films familiaux en technicolor”. Cette version de 1949, réalisé par Mervyn LeRoy ressemble étrangement à celle de Cukor, quinze ans auparavant. Cela s’explique peut-être par la présence des deux scénaristes oscarisés pour le version de 1933, Sarah Y. Mason et Victor Heerman, qui ont ici collaboré avec Andrew Solt. À cause de ces similarités, le film a plus de mal à plaire. Pourtant, si l’on regarde de plus près, les deux films ne se ressemblent pas autant et sont marqués par leur différences. Dans les années 40’s, la MGM aimait produire des films colorés, de préférence des comédies musicales, avec des stars phares, comme Judy Garland. Nous comprenons alors pourquoi le casting quatre étoiles du film : Janet Leigh (Meg), Elizabeth Taylor (Amy). Pour plus de crédibilité, la production décide de réarranger l’âge des sœurs et transforme Beth (ici interprétée par Margaret O’Brien) en petite dernière de la famille, ce qui rend son décès encore plus tragique.

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June Allyson est la Jo de cette version, et est ainsi l’actrice la plus âgée l'interprétant, toutes adaptations confondues (elle avait 31 ans, 26 ans pour Katharine Hepburn, 25 ans pour Saoirse Ronan pour la version de 2019 et enfin 23 ans pour Winona Ryder de la version de Gillian Armstrong). Mais son âge ne l’empêche pas de jouer une Jo aussi énergique que celle de Hepburn. Son jeu, cependant, la rend un peu plus complexe. Cette version de Jo est plus impétueuse, détient plus de confiance en soi, mettant l’accent sur son intelligence plutôt que sur sa sensibilité. Malheureusement pour Allyson, Katharine Hepburn avait marqué les esprits, malgré le temps passé et son interprétation n’a pas plu, ni à la critique, ni aux spectateurs qui n’ont pu s’empêcher de les comparer. Le New York Times de l’époque avait d’ailleurs mis l’accent sur cette comparaison dans leur critique : “ Comparisons, of course, are odious, but if memory serves us well, she (June Allyson) can’t hold a bayberry candle to the Jo of Katharine Hepburn of fifteen years ago”.

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Les sœurs ne sont pas les seules à subir un changement, nous pouvons constater des différences avec les personnages masculins des deux versions. Comme dit un peu plus haut, Louisa May Alcott avait choisi un “drôle de mari” pour sa Jo, un professeur allemand beaucoup plus vieux qu’elle, une décision étrange. Le professeur Bhaer du film de Cukor était resté très proche du livre, et donnait un couple très mal assorti. Le paternalisme exaspérant du professeur ne s’accorde pas beaucoup avec Katharine Hepburn, le spectateur avait donc du mal à comprendre cette fin. La production fait ici un choix intéressant, et opte pour un acteur italien Rossano Brazzi, dans le rôle de Friedrich Bhaer, plus jeune et au sex-appeal visible. Ce couple est sur la même longueur d’onde, et bien que toujours frustrant, son mariage paraît allant de soi. Laurie aussi reçoit une caractérisation un peu plus correcte. Interprété par Peter Lawford, il n’est plus un sidekick souriant et devient le Laurie plus impertinent, en adéquation avec Jo. Nous comprenons son refus à sa demande matrimonial et surtout l’explication de Jo sur leur incompatibilité, parce qu’il lui tient tête, et paraît plus sceptique sur ses travaux d’écriture. Comme pour la version de Cukor, celle-ci montre Laurie dans une position économique supérieure, qui la rend pleine d’admiration. Mais, les scénaristes sont allés plus loin cette fois, la Jo de Allyson étant jalouse de son éducation, à l’école, mais aussi de sa formation militaire.

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Cela le place au-dessus, étant devenu un homme noble et vertueux. Cet accent militaire, qui n’existait pas dans la version de 1933, s’explique par l’époque d’après-guerre, où les hommes revenus du front étaient considérés comme des héros de la patrie. Ainsi, le film ne s’attarde pas autant sur la pauvreté des March, car l’époque n’était plus aux économies. Les horreurs de guerre ont donné envie aux américains de dépenser leur argent, le début de la société de consommation. Il n’était plus possible de voir les sœurs March débattre si elles vont dépenser le dollar donné par tante March. Dans la version de LeRoy, le réalisateur prend le temps de filmer une séquence de shopping, où chacune dépense l’argent de tante March selon leurs passions. Des rubans pour Amy, un chapeau pour Meg, des partitions pour Beth et un livre pour Jo. Ces achats les rendent enthousiastes, avant de culpabiliser et échanger leurs achats pour des cadeaux de Noël offert à Marmee (comme écrit dans le livre). Le film de Mervyn LeRoy n’a malheureusement jamais reçu l’attention qu’il méritait, restant dans l’ombre de son prédécesseur, considéré comme trop fade pour certains, trop kitch pour d’autres (et le happy-ending, avec son petit arc-en-ciel n’aide pas). Pourtant, il est le produit de son époque d’après-guerre, où tout devait être beau, lumineux après des temps sombres et incertains.


Columbia Pictures

Il s’est passé un long moment entre la version de LeRoy et celle qui nous intéresse maintenant, sorti en 1994. Et il s’en est passé des choses en quarante-cinq ans. Les années 90’s étant les années girl power, paradoxalement, il a été difficile pour la réalisatrice Gillian Armstrong de financer son film, les studios étant frileux d’un all-cast féminin. La productrice Denise Di Novi s’était confié au New York Times “At that time, it was almost impossible to get female-driven films made. They called them “needle in the eyemovies, where a guy would say to his wife ‘I’d rather have a needle in the eye than to go to that movie”. And this one had “little” and “women” in the title, freaking deadly”. Il est ironique de se dire qu’après quarante cinq ans de progrès, de combat, de mouvement féministe pour l’émancipation des femmes, il est impossible de montrer une bande de femmes au cinéma, alors qu’il n’y avait aucun problème dans les années 40’s. Les femmes ont maintenant accès à la contraception, à leur propre compte en banque, peuvent subvenir intégralement à leur besoin, mais sont refusées à la représentation au cinéma. Il est vrai que le sujet du film n’aide pas beaucoup, alors que la mode était aux femmes badass et/ou sexy, aux working-girl moderne ou à l’adolescente américaine.

Columbia Pictures


Mais Columbia accepte de financer grâce à un casting impressionnant : Winona Ryder, Susan Sarandon, Christian Bale, Claire Danes, Kirsten Dunst. La réalisatrice Gillian Armstrong et sa productrice/scénariste Robin Swicord décident de moderniser l’histoire et de ne pas coller aux versions précédentes, même si elles veulent rester aussi proche que possible du matériau de base : le roman de Louisa May Alcott. Jo est donc encore une fois l’arc narratif principal. Mais Armstrong ne la voulait pas aussi “garçon manqué” que celle interprétée par Katharine Hepburn, qui ne lui semblait pas très proche de ce que voulait l’autrice. Elle la voulait aussi moins butée que celle de June Allyson. Moins athlétique et mouvementée, plus passionnée et statique, parce qu’elle pense et surtout, elle écrit. Et oui, pour la première fois, un film la montre en train d’écrire, chose qui était capitale pour la cinéaste, comme le montre un article du Hollywood Reporter : “The Australian director says she felt Hepburn portrayal of Jo in the Cukor film was “very, very tomboyish” and didn’t want her version to have “the portrayal of bright rebellious women as out and out tomboys. So our Jo was ungainly, passionate, complicated, talented and clever.

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Contrairement aux autres versions du personnage, qui semblait écrire pour s’amuser, la Jo de Winona Ryder veut désespérément en faire son métier, c’est ce qui la pousse à écrire des pages et des pages. Nous la voyons même proposer ses travaux à un éditeur, pour montrer à quel point elle prend sa passion au sérieux. Le film passe plus de temps à vouloir une Jo qui trouve son bonheur dans le travail, qui a une aspiration à faire de son rêve une réalité, plutôt qu’à faire le constat du fossé entre son rêve et son statut de femme. Par exemple, dans les deux versions précédentes, son refus à Laurie est montré comme une longue conversation, où Jo explique leur incompatibilité amoureuse, avec flot de larmes et d’embrassades. Dans la version de Armstrong, le film va plus loin et montre le personnage décidé à ne pas se marier car elle tient à sa liberté, pour continuer ses écrits. Laurie ne respecte pas assez son art et cette raison passe avant tout, avant même son manque d’amour pour lui. Un autre exemple, quand Jo apprend qu’elle n’ira finalement pas en Europe. Les versions de Cukor et LeRoy expliquent que tante March change d’avis à cause du comportement de Jo, qui ne convient pas à la bonne société européenne. Lui enlever l’invitation revient à punir son manque de féminité et récompenser celle d'Amy, qui convient à ce que l’on demande aux jeunes filles.

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Dans le film de 1994, le scénario montre ce choix d’une manière plus logique : elle ne peut pas partir car son ambition passe au-dessus d’un voyage de loisir, qui convient mieux au tempérament d’Amy. Le film ne peut pas la montrer aussi passionnée et ambitieuse, pour au final lui couper les ailes, même si cela veut dire de ne pas découvrir d’autres pays. En allant au-devant des opportunités qui se présentent à elle, Jo fait preuve de ce qu’appelle Beverly Lyon Clark “les vertus de la femme moderne”, dans son livre Little Women and the feminist imagination : “These qualities are the paramount female virtues in this film-modern female virtues, the properties of a contemporary woman who can take charge of all aspect of moral and practical life without depending on male support or advice.” Marmee, la mère des soeurs March, jouée ici par Susan Sarandon (icône de la femme émancipée depuis Thelma et Louise en 1991) possède également ces qualités. Elle n’est plus la mère moralisatrice qui remet ses filles sur le droit chemin, mais une mère qui leur apprend l’indépendance et qui leur explique qu’il n’existe pas qu’une seule féminité. Elle ne représente plus la version aseptisée des films précédents, mais une mère fière, protectrice, qui n’hésite pas à remettre à sa place quiconque montrerait devant elle un esprit étriqué (sa réplique sur les corsets à John Brooke). La version d'Armstrong lui donne plus de pouvoir et de présence à l’écran. C’est elle qui réanime Beth pendant sa première maladie, au lieu du médecin habituel. Le changement le plus marquant vient de la plus célèbre scène de l’histoire, représentée dans toutes les adaptations : la lecture de la lettre de M. March, par Marmee entourée de ses filles. C’est la séquence qui donne le titre du livre, le père parlant de ses filles comme ses “little women”. 

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Dans la version de 1994, c’est Marmee qui les appelle ainsi, détournant l’aspect un poil paternaliste de la scène par une réappropriation de leur propre genre. Le professeur Bhaer redevient un homme allemand plus âgé, mais la scénariste donne à Jo et lui plus d’espace pour développer leur inclinaison respective. Robin Swicord met en plus un aspect plus sensuel entre eux, qui donne même à un échange de baiser pendant une représentation d’une pièce de Shakespeare. Ils sont en connivence intellectuellement parlant, il l’encourage et la conseille dans ses écrits. Le Laurie de Christian Bale est peut-être la caractérisation la plus proche du roman de Louisa May Alcott. Un mélange de jeunesse, de paresse, qui montre à quel point Jo et lui ne sont pas fait pour former un couple. Il est montré encore une fois d’une classe supérieure à Jo, aisée, qu’elle ne peut atteindre : il est musicien, éduqué, peut voyager à sa guise. Mais le film appuie sur son manque d’ambition qui fait tâche face au destin de Jo. Le club de théâtre des sœurs March est pour lui qu’un simple amusement alors qu’il est pour elle un terrain d'entraînement à son inspiration créative. Le professeur Bhaer, lui, la confronte, la défie dans le seul but de l’améliorer à son art. Leur histoire d’amour prend alors tout son sens. En essayant de moderniser le récit, la scénariste a mis de côté certains sujets du livre et s’est fortement éloigné du ton de l’autrice, ce qui a posé problème pour beaucoup de critiques à l’époque.

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Karen Hollinger et Teresa Winterhalter l’analysent dans leur livre A feminist romance : adapting Little Women to the screen : “In this light, it appears that Swicord may have been so drawn to the potential for women’s resistance that feminist critics have found in Little Women that she rendered not so much Alcott’s novel as a contemporary myth of that novel. By infusing her script with popular appreciations of feminism criticism, Swicord, in fact, may have taken the feminist critical impulse to locate a subversive subtext in Alcott’s work to its logical conclusion.” Il est vrai que le film de Gillian Armstrong apparaît moins un film familial sur le passage à l’âge adulte qu’un manifeste sur l’importance d’apprendre aux jeunes filles d’avoir des rêves et l’ambition de les réaliser. La scénariste, Robin Swicord, s’est défendue dans le L.A Times : “Alcott put these things between the lines of the book because if they’d been openly addressed she probably wouldn’t have been able to get it published.” Pour la scénariste, il était important d’aller au-delà du simple récit du livre et d’y implanter les idées féministes de l’autrice (qui était une suffragette on le rappelle). Il est donc dommage d’avoir un film qui se veut aussi moderne, tout en gardant la trame classique du récit. La version de 1994 avait l’ambition d’en faire une fresque féministe, sans avoir les outils, le public ou une production prête à prendre le risque.


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Greta Gerwig et sa vision

Les années 2010 ont amené un changement palpable dans la représentation des femmes au cinéma. Parce que cette décennie s’est enfin questionnée sur des questions importantes, peu vues sur grand écran cependant : qu’est-ce qu’être une femme, qu’est-ce la féminité, etc … Le manque d’opportunité a aussi été au premier plan, avec le mouvement hollywoodien Times’s Up, où on s’est aperçu qu’il n’y a pas beaucoup de films réalisés par une femme car … eh bien tout simplement, on leur laissait moins de chance (cela nous semble logique). Il y a eu un ras le bol de l'unilatéralisme cinématographique, où le regard des hommes était le seul point de vue majoritairement montré. Il est donc très symbolique d’avoir terminé cette décennie salvatrice par un nouveau regard sur Les 4 filles du Docteur March, comme si le film montrait la marche à suivre pour les années suivantes.

© Wilson Webb/© 2019 CTMG, Inc.


C’est avec cet état d’esprit que la productrice Amy Pascal s’est décidée à revoir le texte de Louisa May Alcott et produire une nouvelle adaptation, avec un point de vue totalement différent et tranché par rapport aux autres. Il était temps, pour elle, de réaliser une adaptation qui réponde aux nouvelles attentes du public. Dans Les 4 filles du Docteur March, d’hier à aujourd’hui de Gina McIntyre, elle confie : “Ce livre est beaucoup plus satirique, plus fin et bien moins sentimental que certaines de ses adaptations”. C’est aussi le sentiment de Robin Swicord, la scénariste et productrice de la version de 1994, qui dit dans le même livre : “J’ai le sentiment que chaque génération devrait avoir l’occasion de se replonger dans les classiques, films et livres, qui ont façonné notre enfance, pour se demander : que retrouve-t-on ici de notre époque ? Nous avions besoin d’un certain type de filles du docteur March en 1994, et à mon sens, c’est également le cas en 2019. Nous avons besoin d’histoires dans lesquelles nous retrouver, nous avons besoin de sortir du cinéma en réfléchissant intensément à ce que cela implique d’être une femme à notre époque”. Et qui d’autre que Greta Gerwig pour retravailler le texte et le moderniser ?

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Découverte en tant qu’actrice et scénariste, avec le succès du film Frances Ha en 2013, réalisé par Noah Baumbach, la cinéaste nous a conquis avec son premier long-métrage Lady Bird, sorti en 2018 en France. Sa sensibilité pour les relations féminines, sa compréhension de l’adolescence et son humour sarcastique sur le passage à l’âge adulte et ses absurdités, font d’elle la réalisatrice idéale pour mettre en scène un nouveau regard sur le livre. Elle a d’ailleurs une toute autre approche des autres adaptations. Une phrase de Virginia Woolf l’a inspiré pendant l’écriture du scénario : “la liberté intellectuelle dépend des choses matérielles” (Une chambre à soi). Pour Greta Gerwig, le livre de Louisa May Alcott parle d’argent, des conséquences de son manque et pourquoi il est si difficile pour les femmes d’en gagner. Quelles conséquences ce manque a sur leurs ambitions et leurs choix ? Ce sont les premier mots du livre, où Meg se morfond d’un Noël sans cadeaux. Les sœurs March ne peuvent s’offrir ce dont elles rêvent, alors que pour la plupart, leur envie d’achat ont un rapport avec leur art. Dans Les 4 filles du Docteur March, d’hier à aujourd’hui, Gerwig nous dit : “ Je ne sais pas si elle-même (Louisa May Alcott) le percevait pleinement, mais à mon avis, la dimension économique, liée au fait d’être artiste et femme pour qui l’argent est une préoccupation constante, constitue l’un des thèmes principaux de l’oeuvre”.

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La cinéaste avait une idée très arrêtée et innovante sur le personnage d'Amy, considérée à tort comme une petite prétentieuse sans cervelle. Elle y voit une jeune fille pleine d’assurance, qui s’assume. Elle voulait en faire une adversaire de Jo, avec une personnalité forte, mais qui paradoxalement comprend le mieux sa sœur aînée, car elle partage cette envie dévorante d’opportunité. Amy n’est pas une fille précieuse, mais une ogresse, qui a de l’ambition à revendre. Il n’était pas question cependant de changer son caractère, ni son impulsivité qui lui pose problème, c’est pourquoi Gerwig a décidé de montrer le moment où le personnage brûle le manuscrit de Jo dans un accès de colère, scène inexistante dans toutes les autres adaptations. Même si la réalisatrice fait du film une version plus moderne, les dialogues, eux sont collés au livre ou aux lettres de l’autrice envoyées à ses proches. Pour elle, il était évident de s’appuyer sur l’authenticité du vécu de Louisa May Alcott, qui a écrit son livre avec comme modèle sa propre famille (comme vu plus haut). Cependant, pour perdre un peu de la préciosité de certaines répliques devenues cultes, Gerwig choisit de créer un vraie cacophonie, un travail de son minutieux, où chaque membre de la famille parle en même temps. C’est une façon d’aller encore au plus près de l’autrice, qui raconte dans ses lettres l’expérience d’habiter avec autant de femmes, aux avis différents et avec le besoin de l’exprimer. Les March deviennent alors la famille parfaite, où tous ses membres ont une voix qui compte. 

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Cela crée une différence avec le silence de la maison des Laurance et surtout une différence marquante avec la maison des March, une fois les sœurs parties vivre leur vie chacune de leur côté. Car Greta Gerwig décide de changer drastiquement la chronologie du récit et choisit de commencer le film avec les March déjà adultes. Cela permet à Gerwig de se concentrer sur ce qui l’intéresse le plus, c’est-à-dire parler des difficultés qu’elles subissent en tant que femmes. Il est donc difficile de comparer cette version aux autres, mais nous comprenons ce choix car il convient mieux au regard de la réalisatrice. Il est vrai qu’avec une version chronologique, les personnages sont enfermés car elles n’ont pas le choix : elles grandissent et se marient. Ce montage est intéressant car il permet à la cinéaste de faire des parallèles avec la vie d’aujourd’hui et leurs souvenirs d’enfance, auréolés de chaleur. Cela permet de complexifier les personnages, car ils ont un vécu et évite les archétypes. Par exemple, le spectateur comprend un peu mieux Meg, que l’on découvre ici dévorée par la culpabilité de s’être acheter un tissu à 50$, alors qu’on la voit se frustrer toute son enfance par manque d’argent, regardant avec envie une classe sociale qu’elle ne peut atteindre. Comme pour la version de 1933, Greta Gerwig filme le mariage comme une menace dans les flash-back, comme une chose qui les éloignera les unes des autres. Cependant, la version de 2019 appuie d’autant plus sur l’obligation. Le mariage est une transaction économique, conclue entre deux familles. L’amour est un plus, si la chance est présente. Nous comprenons mieux ainsi les avis différents sur le mariage.

© Wilson Webb/© 2019 CTMG, Inc.


Malgré son envie de richesse, Meg choisit un John Brooke sans le sou car pour elle l’amour prime sur la haute société. Jo est beaucoup trop fière pour s’abaisser à se marier pour l’argent et trop indépendante pour se marier tout court. Beth n’est pas assez mâture pour y penser et ne verra jamais le moment arriver. Amy a une vision bien à elle, un point de vue qui mélange son ambition à devenir une peintresse respectée pour son talent et la pression qu’elle se met (et que tante March lui met) d’entretenir sa famille qu’elle aime par dessus-tout. Cela passe avant les émotions, qu’elle méprise un peu. “I’m not a poet, I’m just a woman” dit-elle dans le film à Laurie, une réplique qui résume sa pensée. Son monologue n’existe pas seulement pour justifier son point de vue, il existe aussi pour montrer que les choix des personnages sont guidés par leur statut, leur éducation et leur genre. Greta Gerwig ne veut pas seulement s’épancher sur les difficultés que vivent les femmes du XIXème siècle, elle veut des personnages complexes, qui se sont construits en fonction de leur caractère, de leur éducation, qui ont des opinions marqués et qui peuvent constater leurs contradictions (le monologue de Jo dans le grenier exprime parfaitement cette idée).

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En plus d’une fresque familiale, la version de 2019 est un hommage à l’écriture, aux autrices, en particulier Louisa May Alcott évidemment. C’est pourquoi Greta Gerwig s’est amusée à infuser un peu de Louisa dans sa Jo. Dans le film, la cinéaste filme le personnage ambidextre, comme l’autrice. La négociation entre l’éditeur et Jo, sur les droits de son livre est aussi un miroir de la vie de Louisa, qui a voulu garder le contrôle de son livre, jusqu’au bout. Gerwig en profite pour faire un parallèle avec notre monde, sur le salaire des femmes pour un travail égal par rapport aux hommes. Pour sa nouvelle, payée pour un homme entre 25 et 30$, Jo n’en reçoit que 20$, sans raisons valables. En plus de la difficulté de trouver un emploi, Gerwig infuse aussi la difficulté d’être payée à sa juste valeur. La cinéaste traite la question du professeur Bhaer comme une blague, un peu comme Louisa dans sa lettre (voir plus haut). Redevenu un homme charismatique (il est joué par Louis Garrel), comme dans la version de 1949, Gerwig ne filme pas leur dialogue sous la pluie comme la fin de l’histoire. D’ailleurs, sont-ils vraiment ensembles ? Cette question n’est pas très importante au final, parce que la cinéaste préfère se concentrer sur l'accomplissement du rêve de Jo, à savoir être publier. Le film se finit par une Jo fière d’elle-même, devenue une autrice accomplie et serrant son livre contre elle. Le professeur Bhaer, même s’il est présent dans le film, n’a plus autant d’importance dans sa vie. Elle découvre l’opéra toute seule dans cette adaptation (alors qu’il l’invite dans les autres), Il ne l’encourage pas à écrire sur Beth, l’idée lui revient, et il ne l’aide pas non plus à publier son livre, chose qu’elle entreprend seule aussi. Elle ouvre une école, exactement comme dans le livre, scène qui n'apparaît jamais dans les autres adaptations. La Jo de Saoirse Ronan pense que l’éducation et les opportunités sont la clef de la réussite, notamment pour les jeunes filles. Greta Gerwig laisse le choix aux spectateurs : Jo est peut-être en couple avec le professeur Bhaer, ou peut-être est-ce la fin de son propre roman. Mais, sa vie privée n’est pas si importante comparée à ses actions et à son travail.

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Greta Gerwig a su donner une nouvelle vie au roman et à son histoire, a réussi à dépasser le récit pour filmer une fresque de jeunes femmes, qui ont différentes aspirations de la vie. Chaque adaptation a ses qualités, ses défauts, parle de sujets différents et reflète les pensées d’une époque. C’est pourquoi, malgré toute ma sympathie que j’ai pour la version de 1994, que j’ai découvert plus jeune, malgré le plaisir que j’ai eu à visionner les autres adaptations, c’est avec celle que propose Greta Gerwig que j’ai le plus d’affinité. Le film reflète une façon de penser proche de la mienne, une histoire qui va au-delà de la découverte de l’amour par une âme indépendante. La Jo qu’interprète Saoirse Ronan peut servir d’exemple à une nouvelle génération, comme celle du livre, qui a inspiré de nombreuses femmes (et de nombreux hommes), comme le prouve le début du livre Little Women and the feminist imagination, édité par Janice M. Alberghene et Beverly Lyon Clark, qui nous montre un bon nombre de citation prouvant l’impact qu’à eu le roman. “To engage with Little Women is to engage with the feminist imagination”, est la phrase du début du livre, qui retrace de nombreux essais et critiques sur le livre et ses symboles.

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C’est pourquoi, avant de crier au scandale sur le manque d’inspiration du cinéma actuel, il serait bon de se poser et de réfléchir. Le cinéma, étant un médium du temps et un regard sur le monde qui change, n’est-il pas essentiel de revenir sur les classiques et voir ce que l’on peut proposer de nouveau ? Les histoires sont éternelles car nous continuons à les raconter, mais pour ce faire, il faut un public attentif. Je ne dis pas que tout “reboot”, “remake” ou autres est bon à prendre (un exemple récent, Le Roi Lion de Jon Favreau), juste qu’il est intéressant de poser un nouveau regard sur les histoires anciennes, de nouvelles analyses qui peuvent inspirer à découvrir les œuvres d’origine et à les faire revivre.



Laura Enjolvy


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