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[FUCKING SERIES] : Marianne saison 1 : L’Auteure et La Sorcière


(Critique - avec spoilers - de la saison 1)


L’avantage de se trouver dans un système de production duquel il est hautement difficile, voire un petit peu suicidaire de vouloir extraire des films/séries de genre, c’est que quand on y parvient, c’est une telle chance qu’on va y mettre toutes ses tripes et tout son cœur. On sait que tellement d’autres ont échoué là où on est en train de réussir qu’on ne veut rien laisser au hasard et l’on va tout faire pour utiliser cette opportunité à bon escient. Avec Marianne, nouvelle série horrifique de Netflix made in France, l’essai est transformé haut la main. Pour notre plus grand plaisir, et nos plus affreux cauchemars.

Copyright Emmanuel Guimier / Netflix

La série peine presque de tout son long à réellement trouver un ton homogène et cohérent, allant de la mélancolie profonde a des scènes de comique presque burlesque, montrant son personnage principal pétri de failles, fragile et autodestructrice mais ne résistant pas à l’envie de l’iconiser avec des one liners à deux franc et des contre-plongées christiques. Si l’on passe sur ce manque d’homogénéité et sur une direction d’acteur parfois un peu chaotique soulignée par des dialogues pas toujours au diapason, Marianne est un récit cauchemardesque absorbant qui est capable de proposer des scènes d’horreur brillantes de mise en scène, soutenues par des visuels sortis des couches les plus sombres d’un imaginaire horrifique foisonnant. La sorcière Marianne est un monstre de cinéma, un vrai, de plus en plus épouvantable à mesure que la série avance, elle se révèle petit à petit jusqu’à ce que finalement seuls ces deux grands yeux vous restent en tête et vous accompagnent dans vos songes noirs les plus profonds. Elle fait partie de ces monstres qu’on ne veut pas voir apparaitre à l’écran, qu’on redoute, dont on craint de l’apercevoir au détour d’un plan de caméra. Et cette réussite tient autant à son design cauchemardesque qu’a une certaine qualité d’écriture qui sait garder assez de mystère autour d’elle tout en révélant suffisamment de détails sordide pour la rendre de plus en plus sinistre, et à une retenue dans ce que l’on montre d’elle et quand est-ce qu’on le fait, si bien qu’avant la fin on est incapable de dire précisément à quoi la sorcière ressemble. Seuls existent avec certitude ses deux abominables yeux. J’ai également envie de souligner l’interprétation dantesque de Mireille Herbstmeyer, première hôte de l’esprit de la sorcière, constamment à deux doigts d’en faire trop mais qui reste toujours juste et terrifiante, elle parvient dans son jeu à vraiment rendre compte visuellement de l'étrangeté glauque induite par la possession. 

Copyright Emmanuel Guimier / Netflix

Il n’y a pas de bon monstre de cinéma sans un bon personnage principal à tourmenter. Enfin si, c’est plutôt le contraire, mais en l’occurrence le personnage d’Emma est intéressant. On s’intéresse à la figure de l’auteur dépassé par ses écrits, de l’artiste tourmentée par des forces obscures qui sont autant de métaphores pour parler de ses démons intérieurs. Emma ne dépassera jamais vraiment le stade de cet archétype, aucun des personnages ne sera plus qu’un archétype mal dégrossi au final, mais c’est une figure très intéressante à explorer que celle de l’auteur dans la fiction. Étant au centre de l’intrigue elle est la première à souffrir des ruptures de ton maladroites de la série, elle peut subir une horrible perte et faire des blagues trois scènes plus tard, mais c’est un personnage qui arrive tout de même à être touchant, tout en étant moralement souvent à côté de la plaque. Alcoolique, socialement toxique, en apparence égoïste et n’hésitant pas à spoiler ses propres œuvres (ça c’est sacrilège). Emma est une épave, une épave qui va devoir se confronter à ses peurs d’adolescente et aux conséquence de ses actes passés et présent sur ses proches de l’époque, retrouvés après une longue absence. Elle et Marianne sont finalement les deux faces d'une même pièce.

Copyright Emmanuel Guimier / Netflix

On pardonne aisément à Marianne ses diverses maladresses qui sont largement contrebalancés par ses réussites et partent souvent d’une envie de trop bien faire. Le huitième et dernier épisode est une perle, beaucoup plus en maitrise, viscéral et poétique, et il nous donne matière à espérer pour une saison deux qui serait amplement méritée. On ne manque pas en France d’artistes désireux de nous partager des histoires et des visions d’horreur, mais on manque de producteurs qui sont prêt à leur donner les moyens de le faire, et d’un publique qui est prêt à laisser de côté ses préjugés sur notre production cinématographique nationale.
Quand une œuvre comme celle-là parvient à voir le jour, c’est toujours une petite fête. Alors fêtons la ! 



Kevin


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