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[CRITIQUE] : Noureev


Réalisateur : Ralph Fiennes
Acteurs : Oleg Ivanko, Adèle Exarchopoulos, Raphaël Personnaz, Ralph Fiennes, ...
Distributeur : Rezo Films
Budget : -
Genre : Biopic, Drame
Nationalité : Britannique
Durée : 2h07min

Synopsis :
Jeune prodige du célèbre ballet du Kirov, Rudolf Noureev est à Paris en juin 1961 pour se produire sur la scène de l'Opéra. Fasciné par les folles nuits parisiennes et par la vie artistique et culturelle de la capitale, il se lie d'amitié avec Clara Saint, jeune femme introduite dans les milieux huppés. Mais les hommes du KGB chargés de le surveiller ne voient pas d'un bon œil ses fréquentations "occidentales" et le rappellent à l'ordre. Confronté à un terrible dilemme, Noureev devra faire un choix irrévocable, qui va bouleverser sa vie à jamais. Mais qui va le faire entrer dans l’Histoire.



Critique :

Si l’on connaît Ralph Fiennes pour sa carrière d’acteur hétéroclite, le monsieur est aussi réalisateur et signe avec Noureev, biopic sur le célèbre danseur classique, son troisième long-métrage. Après un passage shakespearien en 2012 (Ennemis jurés) et les histoires de cœur de Charles Dickens (The invisible woman) en 2013, il nous revient conter l’incroyable histoire du russe Rudolf Noureev. Même vous n’êtes pas un fan de ballet, ce nom peut vous dire quelque chose, sa notoriété s’étendant dans chaque pays. Danseur charismatique, célèbre pour ses prestations passionnées (mais aussi pour son tempérament bien trempé), sa vie est en elle-même une histoire aussi invraisemblable que terriblement cinégénique.


The White Crow ("corbeau blanc", nom du film en anglais) est le surnom que se donnait le danseur, une expression qui définit quelqu’un de hors norme. Lui qui n’a jamais douté de son talent, ni de sa réussite malgré sa classe sociale ou son pays (la Russie, en pleine guerre froide), ce surnom lui sied à merveilles. Fils de parents tatars d'origine paysanne, il est né dans un train, comme il aimait à le rappeler. Histoire romancée ou non, c’est par cette naissance hors du commun que le film débute, dans une ambiance sale et désaturée au possible, comme tous les flash-back qui ponctueront Noureev. Véritable personnage, le danseur savait se mettre en scène et n’a pas eu peur de demander l’asile en France, pendant une tournée du théâtre Mariinsky à l’opéra Garnier en juin 1961. En cinq semaines, il a pu se lier d’amitié avec Pierre Lacotte, danseur classique et Clara Saint, qui l’aideront à demander l’asile politique. Comme il l’a lui-même dit, la politique ne l'intéressait pas, mais il ne pouvait pas avoir la carrière qu’il voulait en Russie, privé d’une certaine liberté artistique. Comme le montre très bien Ralph Fiennes, le ballet et l’art en général était sa raison d’être, rien ne pouvait l’en empêcher, ni l’Union Soviétique, ni la politique, rien.


Noureev s’intéresse donc uniquement aux jeunes années du danseur, des années formatrices à l'académie de Ballet de Saint-Pétersbourg, où il rencontrera le professeur de danse Poushkin (Ralph Fiennes), qui lui apprendra plus que la technique, mais comment lier les mouvements l’un à l’autre pour créer une énergie, un langage propre, au delà de l’excellence. Ensuite son voyage en France, moment clé de sa vie, qui lui ouvrira les yeux sur les entraves de son propre pays, jusqu’à lui en devenir intolérable. Car le film (et la biographie de Julie Kavanagh) met bien l’accent sur le fait que Noureev n’a pas prémédité sa fuite, mais qu’elle est le fruit de son besoin de liberté, de sa soif d’art.


Noureev est un film qui se veut respectueux de la légende. Ralph Fiennes a mis un point d’honneur à trouver des danseurs/acteurs russes (et il a trouvé la perle rare, Oleg Ivenko, sosie de Noureev) et à filmer les dialogues en russe quand c’était nécessaire. La caméra essaye aussi de dépeindre la complexité du personnage : son passé miséreux (avec sa désaturation), sa passion pour le mouvement (avec des plans fluides et serrés sur son corps), son impulsivité (le réalisateur a choisi de ne pas cacher ses accès de colère). Mais le fait est, si sur le papier, le film fonctionne, en pratique il ne dépasse jamais le biopic hollywoodien classique. Que ce soit les allers-retours temporels pas toujours maîtrisés ou la mise en scène basique, loin d’être créative, le film a un goût bizarre, sa volonté d’hommage ne suffit pas.


Laura Enjolvy