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[CRITIQUE] : Jimmy's Hall


Réalisateur : Ken Loach
Acteurs : Barry Ward, Simone Kirby, Jim Norton,...
Distributeur : Le Pacte
Budget : -
Genre : Drame, Historique.
Nationalité : Britannique, Français.
Durée : 2h14min.

Synopsis :
1932 - Après un exil de 10 ans aux États-Unis, Jimmy Gralton rentre au pays pour aider sa mère à s'occuper de la ferme familiale.
L'Irlande qu'il retrouve, une dizaine d'années après la guerre civile, s'est dotée d'un nouveau gouvernement. Tous les espoirs sont permis…
Suite aux sollicitations des jeunes du Comté de Leitrim, Jimmy, malgré sa réticence à provoquer ses vieux ennemis comme l'Eglise ou les propriétaires terriens, décide de rouvrir le "Hall", un foyer ouvert à tous où l'on se retrouve pour danser, étudier, ou discuter. À nouveau, le succès est immédiat. Mais l'influence grandissante de Jimmy et ses idées progressistes ne sont toujours pas du goût de tout le monde au village. Les tensions refont surface.
 


Critique :

Force est d'admettre que durant la dernière croisette (Cannes est définitivement la seconde maison de Loach après l'Irlande), ou le film était présenté en compétition officielle, un doux vent de nostalgie avait parcourut nos échines car pendant quelques temps, Jimmy's Hall était annoncé comme le dernier long-métrage de l'inestimable Ken Loach.

Mais depuis le bonhomme a remis les pendules à l'heure, et la péloche sera loin d'être la dernière du cinéaste, qui n'est pas si près que cela d'aller gouter aux joies de la retraite.

Alléluia donc, car on aurait été franchement très endeuillé de ne plus mirer en salles le cinéma politique et social du Loach, incontestablement ce que le cinéma britannique produit de mieux depuis près de cinquante ans.


Dans la parfaite continuité de ses récentes péloches, le plus ou moins biopic Jimmy's Hall s'intéresse à l'histoire véritable de Jimmy Gralton, seul irlandais à avoir été déporté de son propre pays.
En 1932, après un exil de dix ans aux États-Unis, il rentre au pays pour aider sa mère à s’occuper de la ferme familiale.
L’Irlande qu’il retrouve, une dizaine d’années après la guerre civile, s’est dotée d’un nouveau gouvernement.

Suite aux sollicitations des jeunes du Comté de Leitrim, Jimmy, malgré sa réticence à provoquer ses vieux ennemis comme l’Église ou les propriétaires terriens, décide de rouvrir le « Hall », un foyer ouvert à tous où l’on se retrouve pour danser, étudier, ou discuter.
A peine renait-il de ses cendres, que le succès est de nouveau au rendez-vous.

Mais l’influence grandissante de Jimmy et ses idées progressistes ne sont toujours pas du goût de tout le monde au village - surtout l’Église -, et les tensions qu'il a connu avant de quitter son pays, vont très vite refaire surface...

Inutile de tourner autour du pot, dès son pitch (sorte de Footloose dans l'Irlande des années 30, pour être grossier), Jimmy's Hall annonce clairement très tôt la couleur, si il est inférieurement moins convaincant que ses derniers longs (excepté Road Irish), il suit cependant avec habileté, le même classicisme que toutes ses autres œuvres, mais surtout les mêmes thématiques que le puissant Le Vent se Lève - qui valut une palme d'or mérité au bonhomme -, en s'imposant comme un pur film protestataire, une ode à la révolte et à la solidarité vibrante et libertaire et qui se situe par ailleurs, dix ans après celui-ci, au sein d'une Irlande toujours aussi répressive.


N'appuyant jamais trop son propos, privilégiant bien plus l'aspect social de son œuvre - la dimension humaine et intime - que politique même si le destin de Gralton est intimement lié à l'histoire de la politique, comme à son habitude, Loach prend son temps pour dépeindre son atmosphère, appuyer son soucis du détail, présenter ses personnages aussi authentiques que naturels, son fameux lieu mythique et espace de liberté totale - le foyer de Jimmy, personnage à part entière -, avant de se focaliser sur les enjeux de son histoire.

A savoir la montée en puissance du syndicaliste Jimmy Gralton - véritable reflet de la classe ouvrière combative de l'époque -, sa montée au créneau pour incarner le rôle (ingrat) de leader de tout un peuple et sa lutte face aux autorités bienpensantes et ecclésiastiques locales dans une époque charnière (soit juste après le krach boursier de 1929), mais également de la prise de conscience de gens réalisant que le monde et leur vie va bien au-delà des préceptes bibliques d'une Église totalitaire.

Plus optimiste et moins sombre et tourmenté que son ainé - tout en étant définitivement moins guerrier et convaincant -, le nouveau Loach ne pêche finalement que par son manque d'âme et de fureur, même si sa poésie est toujours bien présente (pour preuve la séquence de danse romantique et sensuelle entre Jimmy et son ex-fiancée).

Parce qu'au final, le film ne ressemble qu'à une succession de scènes, certes réussites, mais manquant cruellement de liant, ou le ton parfois étonnement léger créer une véritable distanciation entre le havre de paix qu'incarne le foyer de Jimmy, et les événements politiques extérieurs, dont on ne voit que les conséquences directes sur le salon, la faute à un point de vue extérieur peu présent.


Dommage, car l'interprétation éblouissante de son casting parfait (le charismatique Barry Ward, Simone Kirby et le terrifiant Jim Norton en tête), la photographie éblouissante, les excellentes séquences musicales et la tendre et subtil romance instauré peu à peu au fil du récit, pouvait décemment permettre au film d'incarner une œuvre plus que mineure dans la filmographie imposante de Ken Loach.

Passionnant, touchant, drôle et beau, aux thèmes qui trouvent souvent échos avec la société contemporaine, mais un poil trop doux même si Loach n'a pas entièrement perdu toute la pugnacité de son cinéma, Jimmy's Hall reste un très joli drame militant sur l'Irlande et son passé, malheureusement trop classique et ne proposant rien de nouveau pour réellement marquer.

Mais comme tout film du cinéaste est définitivement au-dessus du lot de la moyenne de toutes les sorties cinés annuelles, il ne serait pas très malin de ne pas en faire une de ses priorités à voir de ce début de l'été...


Jonathan Chevrier