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[CRITIQUE] : Dernière nuit à Milan


Réalisateur : Andrea Di Stefano
Avec : Pierfrancesco Favino, Linda Caridi, Antonio Gerardi, Francesco Di Leva, …
Distributeur : Universal Pictures International France
Budget : -
Genre : Thriller
Nationalité : Italien
Durée : 2h05min

Synopsis :
Franco Amore porte bien son nom. Il dit de lui-même que, durant toute sa vie, il a toujours essayé d’être un honnête homme, un policier qui, en 35 ans d’une honorable carrière, n’a jamais tiré sur personne. Ce sont en effet les mots qu’il écrit pour le discours qu’il tiendra au lendemain de sa dernière nuit de service. Mais cette dernière nuit sera plus longue et plus éprouvante qu’il ne l’imagine et mettra en danger tout ce qui compte à ses yeux : son travail au service de l’Etat, son amour pour sa femme Viviana, son amitié avec son collègue Dino, jusqu’à sa propre vie. Et c’est durant cette même nuit, dans les rues d’un Milan qui ne semble jamais voir le jour, que tout va s’enchaîner à un rythme effréné.


Critique :



Troisième long métrage de l’acteur et réalisateur Andrea Di Stefano, Dernière nuit à Milan s’est fait remarquer lors du dernier festival de Berlin et plus récemment en ouverture du Reims Polar 2023. Le cinéaste italien nous entraîne dans une descente aux enfers d’un homme honnête pendant une nuit milanaise. Corruption policière, tragédie, noirceur de l’âme humaine, etc… Tous les ingrédients d’un bon polar y passent.

Bienvenue à Milan, terreau d’un imaginaire mafieux. Le crime est inscrit dans les murs de la ville et éclate au grand jour, même (et surtout) parmi les policiers. Difficile de rester intègre quand la paie est faible, quand les promotions tardent et quand le crime est à notre porte, prêt à nous en mettre plein les poches. Franco Amore (Pierfrancesco Favino) serait-il le dernier flic incorruptible de la ville ?

Copyright Loris T. Zambelli

L’ultima notte di Amore. Si on traduit littéralement le titre original du film, ce n’est pas un polar qui nous vient à l’esprit mais une histoire romantique. Franco l’est, romantique, amoureux, et même sensible, loin du cliché machiste de l’italien, mâle alpha coureur de jupon. En trente-cinq ans de carrière, il n'a aucune bavure à son actif. La légende raconte même qu’il n’a jamais tiré sur quiconque. Est-il possible d’être blanc comme neige quand on côtoie tous les jours le crime ? Il faut croire. Des êtres comme Franco Amore sont rares mais ils existent ! Mais même les plus intègres d’entre nous peuvent tomber si l’on en croit Andrea Di Stefano. Il suffit parfois d’une nuit, une Dernière nuit à Milan

La nuit est tombée sur la ville et ne semble jamais vouloir se retirer. Réduit dans son espace-temps, le film tient en haleine son public. Construit comme un théâtre de la corruption, Dernière nuit à Milan expose ses différents personnages, leur fonction dans la narration, avant de partir sur des chapeaux de roue vers un polar noir et dense. Il y a notre flic intègre, Franco. Il y a sa femme, Viviana (Linda Caridi), primesautière. Il y a également Cosimo (Antonio Gerardi), le cousin de Viviana, qui nage dans la pègre mais aussi Dino (Francesco Di Leva), collègue de Franco, père célibataire tout aussi intègre que lui. Tout ce beau monde est lié par une mission qu’acceptent Franco et Dino, en lien avec la mafia chinoise implantée à Milan. Le premier pour faire plaisir à Cosimo, le deuxième pour l’argent. Deux conditions : pas d’armes et pas de produits illégaux. Franco et Dino doivent juste conduire quelqu’un d’un point A à un point B. Risqué, surtout à la veille du départ en retraite de Franco. Peut-être n’a-t-il pas envie qu’on le prenne pour un dégonflé, son entourage rigole déjà souvent de son caractère sérieux et de ses états de service à la police. Il accepte donc la mission et ce faisant, il signe, sans le savoir, avec le diable.

Copyright Loris T. Zambelli


Car nous comprenons bien que tout ne se passera pas comme prévu. Ils entrent dans un tunnel le long de la rocade comme on pénètre en enfer. C’en est fini du destin clean de Franco. Après cette séquence, le film bascule dans un suspense tendu, qui emprunte le célèbre MacGuffin de Hitchcock pour nous tenir en haleine. Franco est menacé de toute part et ne peut se fier à personne. Devenue échiquier grandeur nature, la ville avance ses pions pour piéger Franco mais celui-ci se montre difficilement impressionnable. Les apparences sont trompeuses nous dit Andrea Di Stefano, qui s’amuse à déjouer les clichés. La femme naïve ne l’est pas tellement et révèle son potentiel sous la pression. L’homme faible, car peu dans les codes de la virilité machiste, dévoile un sang-froid et un courage à toute épreuve.

S’il ne dépoussière pas le genre du polar à l’italienne, Dernière nuit à Milan a le mérite de lui apporter un nouveau souffle. Mitonné aux petits oignons, le film a la saveur des œuvres d’antan.


Laura Enjolvy