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[CRITIQUE] : John Wick : Chapitre 4


Réalisateur : Chad Stahelski
Acteurs : Keanu Reeves, Donnie Yen, Bill Skarsgård, Ian McShane, Shamier Anderson, Hiroyuki Sanada, Rina Sawayama, Scott Adkins, Clancy Brown, Laurence Fishburne,...
Distributeur : Metropolitan FilmExport
Budget : -
Genre : Action.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h50min

Synopsis :
John Wick découvre un moyen de vaincre l’organisation criminelle connue sous le nom de la Grande Table. Mais avant de gagner sa liberté, Il doit affronter un nouvel ennemi qui a tissé de puissantes alliances à travers le monde et qui transforme les vieux amis de John en ennemis.



Critique :


Le quatrième chapitre s’ouvre sur un John Wick plus décidé que jamais à regagner sa liberté et en finir une fois pour toutes avec la Grande Table.
Toujours poursuivi par les tueurs de l’organisation après avoir été excommunié, il doit également se confronter à un nouvel ennemi : le Marquis de Gramont interprété par Bill Skarsgård.

Copyright Metropolitan FilmExport

Surenchère tous azimuts 

Après trois premiers opus, le réalisateur et cascadeur Chad Stahelski réussit encore une fois à étendre l’univers de John Wick et repousser les limites du cinéma d’action. Tout est plus vertigineux, des scènes de poursuite aux décors en passant par les chorégraphies et les cascades. 
D’Osaka à Paris, John Wick nous entraîne pendant trois heures dans un voyage toujours plus périlleux : les scènes de combats redoublent d’inventivité, notamment grâce à l’arrivée de nouveaux personnages secondaires. Donnie Yen, acteur connu pour son rôle de Yip Man, joue un combattant aveugle, l’ancien ami de John Wick qui se retrouve forcé de l’affronter. Hiroyuki Sanada (Shimazu) et Rina Sawayama (Akira), père et fille tentant de protéger John Wick, font également une apparition (trop) courte, mais remarquée.

L’esthétique léchée du film sublime les nombreux décors pourtant parfois assez convenus dans lesquels John Wick évolue. 
Avec la cinématographie de Dan Laustsen, un night-club de Berlin se transforme en un piège suffocant et les marches menant au Sacré-Cœur deviennent un supplice de tantale.


Quelques clichés et une bonne dose d’humour 

Si la démesure de cet opus est impressionnante, elle finit sur la longueur par être épuisante et quelquefois risible. 
Le marquis, auquel Bill Skarsgard ne semble pas pouvoir s’empêcher de prêter certaines mimiques de Pennywise, apparaît d'abord comme un tueur froid, mais son sadisme et son accent plus allemand que français le rendent parfois grotesque. Mais ce ne sont pas que les antagonistes qui versent dans la caricature : les réponses toujours plus monosyllabiques du personnage principal nous font douter du talent de Keanu Reeves.

Parfois le film s’amuse de ses écarts, et assume son absence de réalisme et ses cascades loufoques en incorporant une dose d’humour que ne possédaient pas les deux premiers films. 
Mais à trop flirter avec le second degré, le film perd l’intensité qui faisait le charme des trois premiers opus.

Copyright Metropolitan FilmExport

Carnage et destruction 

C'est assez intéressant d’observer que le parcours du film épouse celui du personnage principal. 
Dans le premier volet, on ne pouvait que sympathiser avec John Wick, homme endeuillé agressé par un malfrat ignorant, tuant de surcroît un animal innocent. Mais ici, les dommages collatéraux engendrés par l’assassin et sa soif d’indépendance deviennent de moins en moins justifiables. Lorsque son ami de longue date se sacrifie pour protéger le tueur, les scénaristes ne daignent pas s’interroger sur la culpabilité que le personnage pourrait ressentir. On finit par tomber d’accord avec le personnage d’Akira qui voit son père mourir sous ses yeux ; partout où John Wick passe, il n’y a que carnage et destruction.

La libération finale du personnage et sa rédemption partielle viennent donc à point nommé, et interroge sur la suite de cette saga qui nous aura transportés dans un univers unique en son genre. 


Aurore Mancip



Copyright Metropolitan FilmExport

À une heure où le cinéma d'action ricain n'est plus que l'ombre de lui-même, totalement empoisonné par un genre super-héroique qui a troqué des héros musclés et à visages humains, pour des lascars à collants dégainant des actions surhumaines devant des fonds verts de plus en plus visibles (et, par la même occasion dans un effet totalement pervers, de moins en moins masqués), il y a quelque chose de profondément rassurant dans l'idée de voir des franchises telles que Bad BoysJohn Wick remettrent un brin l'église au milieu du village, en renouant avec nostalgie à une époque pas si lointaine où l'action et les sensations jubilatoires primaient totalement sur l'intrigue - souvent prétexte.

C'est ça John Wick, du put*** de bon cinéma à l'ancienne, parfumé à la fois par la bisserie musclée qui tâche des 80s, du western spaghetti à la Leone, du revenge movie radical so 70s et de la baston homérique tout droit sorti des badasseries HK; un cocktail loin d'être original mais rafraîchissant dans sa manière de le servir avec un enthousiasme jamais feint et une propension à assumer avec un aplomb sans borne, ses contours de divertissement cartoonesque et jouissivement caricatural.

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La question restait à savoir désormais ce qui allait naître de la caméra bondissante de l'ex-kickboxer/cascadeur et désormais réalisateur Chad Stahelski, pour que la franchise - dont le cinquième opus est déjà dans les tuyaux - ne s'enterre pas elle-même dans l'une des tombes anonymes et bardés d'os d'assassins creusée autour du globe par son indomptable Baba Yaga.
Dans une Hollywood où bigger and faster ne rime plus réellement avec better, le cinéaste répond par une surenchère encore plus démesurée qu'auparavant, faisant de John Wick : Chapitre 4 l'épisode le plus incroyablement long - 2h50 minutes - tout autant que l'opus le plus spectaculairement fou et rythmé, un cran en dessous certes du second (et meilleur) film dont il reprend - comme l'épisode précédent - la même formule scénaristique tout en la simplifiant encore un petit peu plus, pour privilégier avant tout et surtout l'action, plus atmosphérique et chargée en adrénaline que jamais.

Si tout avait commencé comme un simple et burné revenge movie (Wick quittait sa retraite pour venger la mort de son chien, unique cadeau de son épouse décédée, et du vol de sa Ford Mustang en liquidant le rejeton puis son paternel seigneur du crime russe - badigeonné avec une bonne cinquantaine de meurtres autour), la franchise a vite su se démarquer du carcan limité du genre en développant intelligemment sa mythologie foisonnante (et source apparemment inépuisable d'assassins), où John Wick incarnait in fine une épine dans le pied en costume trois pièces, que la fameuse Grande Table aimerait retirer du jeu tant il est la seule entité inébranlable au monde qui puisse réellement avoir un impact néfaste sur cette société criminelle à la lisière de la confrérie religieuse (avec un doigt de valeurs issues du Japon féodal avec ses notions d'éthique, de loyauté et d'honneur).

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Alimenté par une juste colère, John est conscient dans ce nouvel opus qu'il ne peut certes pas renverser la (quoique), mais qu'il peut au moins sensiblement en modifier sa composition pour mieux définitivement s'en extirper, se trouvant une nouvelle cible de choix : le vicieux et impitoyable marquis Vincent de Gramont (un Bill Skarsgård ont le statut de vilain Bondesque n'est malheureusement jamais réellement exploité), bien décidé à faire la peau à l'invincible tueur à gages ainsi qu'à tous ceux l'ayant aidé, envoyant à ses trousses des vagues - littéralement - d'assassins tout en poussant un vieil ami de Wick, l'aveugle Caine (un Donnie Yen génial dans un rôle qui cite à la fois Zatoichi mais également dès son nom, le Kwai Chang Caine de David Carradine dans la cultissime série Kung Fu), contraint d'accepter ce contrat lorsque la vie de sa fille est menacée.

Avec un enjeu pivot ne se démarquant absolument pas de ses deux derniers aînés (à tel point que les trois derniers opus peuvent intimement se voir comme une trilogie à part entière, vissée autour de la quête de liberté d'un Wick excommunié voulant ardemment s'extirper d'un univers qui ne le laissera jamais en paix), John Wick : Chapitre 4 ne se fait pas seppuku et roule tranquillement sa bosse tout en se laissant plus de temps que de raison pour prodiguer aux fans de la saga exactement ce qu'ils veulent, et de manière férocement spectaculaire et brutale.
Et les potards sont poussés au maximum tant d'Osaka à Paris en passant par Berlin, les scènes mémorables sont légion (une scène de poursuite à cheval dans le désert, un bain de sang dans un hôtel d'Osaka et dans une discothèque Berlinoise avec un Scott Adkins en fat-suit, mais surtout un sommet de castagne allant du rond-point de l'Étoile aux marches du funiculaire de Montmartre et jusqu'au Sacré-Cœur) et l'implication athlétique de Keanu Reeves est clairement montée d'un (gros) cran.

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Accumulant les bastons homériques et jubilatoires, fruit d'une chorégraphie incroyablement dense et aux petits oignons, autant que d'un montage fluide et constamment lisible de Nathan Orloff, et d'une mise en scène inventive et sans le moindre bout de gras de Stahelski (à laquelle on peut ajouter la photographie dynamique et léchée de Dan Laustsen); John Wick : Chapitre 4 n'est pas qu'une simple cacophonie de coups de feu et de coups de poing, c'est un pur balet qui fleure bon le sang et la poudre, un tourbillon vertigineux de cinétisme hors des sentiers battus qui n'a jamais peur d'assumer son aspect parfois irréel, ni de faire preuve d'un humour - souvent - référentiel et accrocheur (notamment cet hommage sincère au légendaire The Warriors de Walter Hill, avec ses assassins tenus au courant de l'épopée de Wick grâce à un DJ sans visage et diffusé en direct sur une station nommée... WUXIA).

Étonnamment même, là où tout n'aurait pu être qu'un opéra baroque faisant l'apologie du bottage de cul mignon sur près de trois heures, le film se pare de quelques effets mélodramatiques improbables (et le rapprochant du premier film), avec son ange de la destruction conscient qu'il fait plus de mal que de bien dans sa quête furieuse de liberté et de rédemption.
C'est fin comme du papier toilette Lotus certes, mais c'est la petite goutte de nitroglycérine sur le gâteau Kaboom d'un quatrième film qui se déguste sans faim même dans ses légères longueurs et son aspect parfois éreintant.
Mais que dire d'autre finalement que... vivement la suite ?


Jonathan Chevrier