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[CRITIQUE] : Wonder Woman 1984

Réalisatrice : Patty Jenkins
Acteurs : Gal Gadot, Chris Pine, Kristen Wiig, Pedro Pascal,...
Distributeur : Warner Bros. France
Budget : -
Genre : Action, Aventure, Fantastique.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h31min.

Synopsis :
Suite des aventures de Diana Prince, alias Wonder Woman, Amazone devenue une super-héroïne dans notre monde. Après la Première guerre mondiale, direction les années 80 ! Cette fois, Wonder Woman doit affronter deux nouveaux ennemis, particulièrement redoutables : Max Lord et Cheetah.




Critique :


À une heure ou quasiment tout le monde - ou presque - a déjà pu le voir de manière illégale dans l'hexagone, autant le fruit de la politique de distribution intelligente sur ses terres - mais catastrophique à l'international - de la Warner, que d'une impatience qui ne justifie pas tout (aucun jugement, les salles sont fermées, chacun reste libre de décider ce qu'il veut voir et comment il veut le voir); Wonder Woman 1984 de Patty Jenkins débarque en VOD et d'ici quelques jours dans les bacs, avec la réputation injuste de grosse catastrophe industrielle qui lui colle à la pellicule.
Alors, évidemment, comme quasiment tout blockbuster du Worlds of DC/DCEU - tout comme ceux du MCU, ne faisons pas d'amalgame stupide -, rien n'est résolument parfait d'autant plus que le parti pris défini par sa réalisatrice, à savoir catapulté Diana Prince au coeur des 80s, impliquait presque implicitement que cette suite se prenne plus d'une fois les pieds dans le tapis, d'autant plus que la nostalgie que convoque cette décennie commence gentiment à s'essoufler (mais pas sur nous hein) à force d'être constamment usée.

Copyright 2020 Warner Bros. Entertainment Inc. All Rights Reserved. / Clay Enos/ ™ & © DC Comics

Pire, son odyssée un poil trop étirée et confuse au climax bordélique et facile (voire même presque pas assumé, avec son fight nocturne boursouflé aux CGI foireux), véhicule un message de gentillesse, de bienveillance et d'empathie si sincèrement porté qu'il ne peut qu'être pris en grippe par les spectateurs cyniques - mais pas que -, qui n'ont pas fondamentalement envie d'y voir non seulement quelque chose de logique (tous les divertissements familiaux des 80s ont justement en eux, ces bons sentiments là), mais surtout de vital : un peu de douceur dans ce monde de brute et en pleine pandémie, ça fait vraiment du mal à qui ?
Plutôt donc d'envoyer Diana boutter du nazi pendant la Seconde Guerre mondiale, ou l'envoyer au Vietnam avec John Rambo (quelle idée de spin-off cela dit), cette suite l'envoie donc, après une ouverture/flashback plutôt fun (une exposition du " Themysciran Ninja Warrior " annuel qui montre sa détermination autant qu'elle sert de gros indicateur thématique pour le final - la vérité est plus forte que tout), au beau milieu des années 80 au sein d'une intrigue judicieusement dénuée d'événements mondiaux - excepté les tensions de la toujours présente Guerre Froide -, et infiniment plus personnelle.
Incapable de retourner dans son royaume idyllique de Themyscira, obligée de régulièrement changer de location pour garder son identité secrète (elle travaille maintenant comme experte en archéologie et antiquités à la Smithsonian Institution de Washington, DC), elle est incroyablement seule et est toujours autant tiraillée, même près de soixante-dix ans plus tard, par la mort de Steve.
Se penchant justement sur son isolement forcé (comme une semi-immortelle qui doit cacher son immortalité et ses pouvoirs, peut-elle nouer des amitiés durables ?), le film vrille pourtant vite et devient presque inutilement alambiquée avec un élément kitsch semblant presque tout droit venue du show : une pierre qui exauce des souhaits avec des conséquences à la clé, une simili " Patte du singe " en gros.

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Un macguffin qui sert de justificatif facile pour ramener Steve Trevor dans l'équation (via un souhait compréhensible de Diana), mais aussi introduire Barbara Minerva en tant qu'antagoniste (enfin vraiment dans le dernier tiers), et le magnat du pétrole/potentiel cousin latino des Ewing de Dallas Max Lord; tous usant de la pierre pour différentes raisons (elle veut la confiance en elle et le respect dont elle a toujours rêvé, lui incarne la pierre en voulant un temps être hyper riche, avant de devenir président des États-Unis puis maître du monde...), pour mieux permettre au métrage de dérouler une intrigue élémentaire au lourd cahier des charges, entre le film d'aventure " Indy-esque " - comme Aquaman - et le pastiche Bondien avec son vilain grand-guignolesque (ridicule, désespéré et pourtant étrangement sympathique), victime d’une culture des promesses creuses de l'American Dream, qui devient l’auteur même de ces dites fausses promesses (qui demande plus qu'elle ne donne) dans le climax.
Alors certes, on pourra décemment lui reprocher ses scènes d'action limitées - voire illisibles -, son envie d'un peu trop pointer du bout de la pellicule, le fait que Wonder Woman - à l'identité publique encore mystérieuse - est l'héroïne des enfants/petites filles (ce que Zack Snyder démontrait furtivement et avec plus de subtilité, dans son cut de Justice League), d'apporter un traitement random au personnage de Barbara Minerva/Cheetah (avec une transformation/passage obligé maladroite dans le final, là où il aurait été bien mieux de se focaliser sur leur amitié pour mieux construire leur affrontement), de faire voler Diana (ce qui apporte une cohérence majeure pour le personnage au présent, même si BvS et Justice League ne sont plus vraiment dans l'équation), de jouer la carte du WTF en conclusion (une troisième guerre mondiale nucléaire balayée en quelques secondes, le fait que tout le monde annule son souhait pour le bien de l'humanité,...) ou même plus simplement, la réincarnation de Steve, sujet à autant de réjouissance et de logique (Steve est mort dans l'explosion donc il ne peut pas reprendre son corps, le fait qu'il incarne quelqu'un d'autre aux yeux du monde - so Le Ciel peut Attendre de Warren Beatty et Buck Henry - protège aussi son identité, lui qui est historiquement important) que de questions dérangeantes (la notion de consentement dans sa possession d'un autre, ou même dans son rapport sexuel avec Diana, mais aussi que devient-il d'ailleurs à ce moment-là ? Pourquoi personne ne s'inquiète de son absence à son travail, ou encore même ses proches ?).

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Mais Wonder Woman 1984 est aussi et surtout pétri d'un enthousiasme et d'une satisfaction bien réels malgré le fait qu'il n'assume pas totalement son statut de blockbuster burlesque, que ce soit dans sa manière bouillonnante de filmer la romance entre Diana et Steve (avec une inversion des rôles en comparaison du premier opus, cette fois-ci c'est elle qui lui fait connaître le monde d'aujourd'hui), ou son désir d'incarner une évasion cotonneuse et sans prise de tête pour un auditoire qui en a cruellement besoin - surtout aujourd'hui.
Ce qu'il perd en enjeux et en profondeur thématiques/dramatiques (même si la vision sombre qu'à Lord d'un monde fait de réalisation de souhaits débridée et égocentrique, révèle les valeurs matérialistes et égoïstes sous-jacentes de la société contemporaine), il le gagne en naïveté touchante (superbe scène du 4 juillet dans le jet invisible - même si la manière de le rendre invisible est risible à souhait -, la seconde perte de Steve pour Diana,...) voire en déconstruction du mythe superhéroïque (Diana est prête à tout pour Steve, même à renoncer à ses pouvoirs mais elle seule en est réellement digne, la preuve lorsqu'ils arrivent entre de mauvaises mains - celles de Barbara), démontrant avec tendresse que même dans un blockbuster fait d'explosions, de CGI et de chaos, la compassion peut tout dénouer.
Et c'est sans doute ce qui fait pourquoi la Diana de Gal Gadot (plus attachante et à tomber que jamais), est merveilleuse et imprime si durablement nos rétines et nos coeurs (sans doute le casting le plus juste de tout le DC-verse récent, même si elle range son penchant badass au placard ici), mais surtout pourquoi Wonder Woman 1984 n'est pas tant le ratage annoncé, mais plus un vrai divertissement familial kitsch (quitte à être gênant, comme la scène du centre commercial), un brin mélancolique et réconfortant dans ses élans de liberté; une fable contemporaine à la candeur assumée et aux vraies idées de mise en scènes (malgré un aspect général assez mitigé) comme toute bonne production des 80s.


Jonathan Chevrier


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En 2017, Patty Jenkins offrait la preuve ultime qu’une femme pouvait réaliser des blockbusters efficaces. Même si perclus d’un cahier des charges bien lourd, dans un style super-héroïque très (trop) codifié par une firme désorganisée au possible (nous ne comprenons toujours pas à ce jour les volontés de la Warner pour le DCU), Wonder Woman se révélait généreux et mettait en scène une héroïne en devenir. Mais voilà, ce n'est pas tout de réaliser un honnête film, il faut réitérer l’exploit. L’histoire du septième art nous a montré que le deuxième opus d’une saga était un exercice à haut risque. Un équilibre fragile entre contenter les fans et proposer une évolution cohérente du personnage.
Wonder Woman 1984 n’a pas beaucoup de chance et tombe pendant une pandémie mondiale. Après quelques reports de date, une décision radicale a été prise, une sortie parallèle dans les salles de cinéma ouvertes et sur HBO Max, la plateforme de streaming, le 25 décembre dernier. En France, nous avons dû voir au loin les nombreux retours mitigés, voir carrément dédaigneux et attendre patiemment une sortie légale. Disponible en VOD depuis le 31 mars et en DVD/Blu-ray dès le 7 avril, qu’en est-il vraiment de cette suite tant attendue et tant décriée ?


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On ne peut nier à Patty Jenkins d’avoir voulu voir plus grand dans ce métrage. Si on enlève toute mauvaise foi dans nos regards, on peut y voir de très bonnes intentions de la part de la réalisatrice. Une intention de faire de Diana Prince une femme réelle, tout autant qu’une héroïne. De lui donner des faiblesses pour renforcer sa puissance en tant que Wonder Woman, qui arrive à les dépasser et à faire preuve de résilience. Des volontés, il en existe dans WW84. Le problème réside dans sa réalisation pure. Comment prendre à bras le corps un personnage aussi exigeant que Diana tout en cochant les nombreuses cases du cahier des charges de la production, qui apparaît ici comme une épée de Damoclès plus lourde que jamais ? Nous avons devant nous un film malade d’un virus qu’il a lui-même inventé. Chaque idée avancée entre en contradiction avec la suite, comme si WW84 se désavouait au fil des péripéties. Le personnage Barbara Minerva/ Cheetah (Kristen Wiig) en est l’exemple le plus concret. Comment peut-on ressentir l’impression de trahison qu’essaye d’instaurer la séquence dans la Maison Blanche, si le film ne prend pas le temps d’explorer l’amitié entre Barbara et Diana ? Cette transformation finale en Cheetah nous semble comme greffée dans un climax désastreux, pour ajouter une dose de baston en CGI dont nous n’avions nullement besoin. L’ensemble des effets-spéciaux du film est d’une grossièreté déconcertante. Entre une ouverture à Themyscira avec un fond vert que l’on peut voir à des kilomètres à la ronde, ou des erreurs faites directement sur le tournage (une perruque mal mise par exemple), nous sommes en droit de se demander dans quoi est parti le budget du film. On peut essayer de justifier le tout par une envie d’avoir un aspect année 80’s. Il est vrai que le film joue beaucoup avec ce style, dans ses couleurs, costumes et décors. Wonder Woman 1984 semble se fondre jusqu’au moindre détail dans cette décennie. Hélas, les effets spéciaux ne peuvent vraiment se justifier, car le film se veut sérieux et très premier degré. Une erreur supplémentaire qui lui est fatale. Pourtant, le film aurait pu être sauvé par son côté drôle et bienveillant, si seulement on lui avait donné l’occasion de l’exploiter correctement. Mais WW84 n’a pas le temps, malgré ses deux heures trente. Un peu ironique pour un film qui veut dénoncer les vices du capitalisme.
 
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Le style années 80 n’est pas présent seulement pour l’aspect visuel, il est aussi intégré directement dans le récit. Toutes les péripéties reposent sur un objet magique, dont les pouvoirs sont très vite expliqués et qui permettent le retour de Steve Trevor. Sa présence dans le métrage est l’élément qui a été le plus décrié, mais pas pour les bonnes raisons. On s’est posé la question du pourquoi. Pourquoi Diana, un personnage qui se veut féministe, est toujours autant attachée à un homme, après toute ces années ? Cette question n’est peut-être pas la bonne. Pourquoi pas, après tout. Steve Trevor est un personnage important dans l’histoire de Wonder Woman. Il est le personnage qui l’a fait quitter son cocon natal, qui lui a fait découvrir un nouveau monde. Leur lien est fort et peut être montré comme éternel si les scénaristes le veulent. La question qu’il faudrait poser est plutôt : comment ? C’est ici que réside la source du plus gros problème dans le récit. Pour faire revenir Steve, on lui prête un nouveau corps. Par magie évidemment, il ne faut pas poser trop de question sur cet aspect, même le personnage l’exprime à l’écran “je ne sais pas”. D’où vient ce corps cependant ? D’un homme lambda, qui lui prête sans son consentement. Vous voyez venir le problème, n’est-ce pas ? Puis, les scénaristes ont la brillante idée d’inclure une scène d’amour. Alors oui, pour parler d’une histoire d’amour aussi forte que celle de Diana et Steve, il fallait inclure un aspect charnel. C’est là où le bât blesse. Diana fait l’amour à un homme qui ne se souviendra de rien par la suite, qui n’a pas donné son consentement et qui n’a aucune conscience de ce qui se passe avec l’esprit de Steve. L’aspect le plus grave réside dans le nombre de personnes impliquées dans l’équipe du film (acteur‧trice‧s compris), qui n’ont pas eu l’air de voir le problème. Pour un personnage aussi féministe que Wonder Woman, c’est ironique non ? On pourrait en rire, si ce n’était pas aussi grave de filmer une scène de viol sans aucune explication, ni réelle implication de cet acte, tout ça parce que c’est “magique”.
 
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Pourtant, on peut voir quelques aspects positifs à Wonder Woman 1984 (il faut par contre les chercher, il est vrai !). Son envie de se détourner d’un style sombre pour épouser la lumière et apporter une certaine bienveillance. Son envie également de nous offrir un film grand spectacle, “bigger than life”, derrière un scénario manichéen, parfois mielleux mais qui donne du baume au cœur. Patty Jenkins a voulu s’éloigner d’un film super-héroïque vide de sens, qui ne sauve aucun humain. Elle essaye, vainement certes, de ramener ses personnages à un aspect plus concret pour donner une émotion forte, de l’empathie, même à son antagoniste Maxwell Lord (Pedro Pascal) qui se perd lui-même dans son envie de toujours plus. On peut également voir dans le film un sens du cadre qui se veut au plus proche de son héroïne. La séquence la plus flagrante serait celle du renoncement de Diana, qui portant son costume de Wonder Woman, ne peut plus se voiler la face. Le mouvement de caméra ne lui laisse pas d’autre choix que d'avancer, quand bien même elle voudrait rester figée. Ce déchirement se sent dans la mise en scène et montre qu’il existe toujours un certain savoir-faire chez Patty Jenkins, dissimulé sous une couche de mauvais choix et d’une direction artistique parfois désastreuse.

Laura Enjolvy