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[CRITIQUE] : Écoliers

Réalisateur : Bruno Romy
Acteurs : -
Distributeur : La Vingt-Cinquième Heure
Budget : -
Genre : Documentaire
Nationalité : Français
Durée : 1h10min

Synopsis :
Que se passe-t-il dans une classe une fois que la porte s’est refermée ? Ce documentaire raconte la vie secrète des écoliers. Tout ce qu’on ne voit jamais, tout ce qu’ils ne nous racontent pas : les apartés et les rêveries, les bisbilles et l’entraide, les petites peurs et les grands doutes... Apprendre à vivre et faire société, autant qu’à lire ou à compter. Une chronique à l’esprit buissonnier pour filmer 24 écoliers à hauteur d’enfants.


 
Critique :



Bruno Romy a filmé pendant un an une classe de CM2 de la banlieue de Caen en 2016. Le résultat est imprimé dans Écoliers, son deuxième long-métrage documentaire, qui bénéficie d’une sortie en e-cinéma le 28 avril. Avec ce film, il propose un condensé de l’expérience de la classe à hauteur d’enfant. Il répond à la question que tous les parents se posent un jour : que fait réellement mon enfant en classe ?
En 2016, le cinéaste sortait Quand j’avais 6 ans, j’ai tué un dragon, un documentaire très intime où Bruno Romy raconte d’une façon singulière le combat de sa fille contre la leucémie. Malgré la peur, les lourds traitements, une chose lui manquait pourtant, l’école, au grand étonnement de son père. C’est en voulant comprendre pourquoi son absence au sein de l’école lui importait tant qu’il a décidé de poser sa caméra dans la classe de Bruno Franc, instituteur à l’école Victor-Lesage. Alors que le projet de départ était centré autour du retour de sa fille dans sa classe, Écoliers devient vite une histoire de groupe. Le film nous propose un voyage inédit dans une salle de classe. Parsemé de moments infimes et intimes qui font partie intégrantes de la vie quotidienne d’un‧e écolier‧ère, le film fourmille de vie et dévoile l’ambivalence des enfants, à la fois rêveur‧se et travailleur‧se, têtu‧e et de bon cœur, généreux‧se mais autoritaire.

Copyright La Vingt-Cinquième Heure


L’énergie que dégage les enfants s’échappe dès les premières minutes. Monsieur Franc, comme l’appelle les élèves, est installé à l’arrière de la classe et les laisse travailler en autonomie, seul‧e, à deux ou à trois sur des exercices divers. Les élèves vont et viennent, de leur bureau au sien, posant des questions, attendant impatiemment le résultat de leur travail. L’instituteur leur répond à tous et toutes, prend le temps d’expliquer ou de réexpliquer au besoin, chacun.e son tour. Ce plan-séquence témoigne tout autant de la bienveillance du professeur, que l’envie d’apprendre des élèves. Il devient le symbole de cette salle de classe, une première approche pour appréhender les enfants, tout d’abord comme une micro-société, un ensemble, pour ensuite s’approcher de leur individualité. Écoliers se rythme comme une valse, en trois temps. D’abord le groupe, l’aventure collective que constitue une salle de classe, avec ses règles et ses devoirs. Puis les duos ou les trios, les groupes dans le groupe. Les amitiés, les conflits, les messes-basses. Enfin, l’enfant seul, devant la caméra, répondant à des questions qui lui sont directement posées par Bruno Romy. Des questions existentielles ou farfelues pour creuser les différences, les aspirations singulières et les personnalités. Ces trois chapitres étudient comment leur monde intérieur se conjugue avec le monde extérieur. Comment l’école peut construire les êtres et accompagner l’apprentissage scolaire et social.

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Le chapitre du groupe apprend les rudiments du vivre-ensemble. Un conseil de classe mené par les enfants met les choses à plat. Les plaintes sur les camarades sont lues, entendues, exprimées. Tout le monde peut écrire sur le cahier et les quelques punitions (pour insultes surtout) sont données avec l’aval de l’élève en question. Le but est de leur apprendre les conséquences de leurs actions envers les autres, l’esprit critique envers ses camarades, mais aussi envers soi-même. Ils et elles apprennent l’indépendance et l’autonomie, des qualités qui seront demandées dès l’année prochaine, pour leur rentrée au collège. Le groupe doit fonctionner ensemble pour harmoniser l’apprentissage. Une chorale formée dans le but d’apprendre l’alphabet anglais devient métaphore de la classe entière. Leur voix disparates balbutient un nouveau vocabulaire. L’unisson s’obtient avec difficulté et beaucoup de travail. Chacun‧e doit y mettre du sien pour avancer. Le groupe se fragmente en morceau, suivant les différents exercices et les jours. Par la magie du montage, Écoliers capture et livre quelques passages de ces liens tissés pendant toute une année. On s’aide sur un devoir de mathématique en échange de bonbons. Des amitiés se fritent et se réconcilient autour d’un exercice de vocabulaire. Les voisin‧e‧s de table ont plusieurs aspects : une aide précieuse, un confident. Ces duos ou trios sont pluriels, prennent une forme erratique selon le besoin du jour. Ces petits groupes mènent à l’individualité et nous aident à voir dans le cadre quelle est la place qu’entretient chaque élève dans cette micro-société. Leur personnalité s’affirme, leurs rêves leur appartiennent. Chaque enfant devient un personnage unique devant la caméra, quittant le confort du groupe pour affronter leur propre existence, conscient de l’avenir qui les attend.

Copyright La Vingt-Cinquième Heure


Jouant sur les différentes strates que comportent l’existence d’un groupe uniforme au sein d’une salle de classe, Écoliers filme avec une douce radicalité des enfants à leur hauteur, l’occasion rêvée d’encapsuler leur point de vue et leur quotidien à l’école, lieu aussi complexe qu’enrichissant.


Laura Enjolvy


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