[CRITIQUE] : Tout l'Argent du Monde
Réalisateur : Ridley Scott
Acteurs : Michelle Williams, Christopher Plummer, Mark Wahlberg, Romain Duris, Charlie Plummer,...
Distributeur : Metropolitan FilmExport
Budget : -
Genre : Thriller, Drame.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h15min.
Synopsis :
Rome, 1973. Des hommes masqués kidnappent Paul, le petit-fils de J. Paul Getty, un magnat du pétrole connu pour son avarice, mais aussi l'homme le plus riche du monde. Pour le milliardaire, l'enlèvement de son petit-fils préféré n'est pas une raison suffisante pour qu’il se sépare d’une partie de sa fortune.
Gail, la mère de Paul, femme forte et dévouée, va tout faire pour obtenir la libération de son fils. Elle s’allie à Fletcher Chace, le mystérieux chef de la sécurité du milliardaire et tous deux se lancent dans une course contre la montre face à des ravisseurs déterminés, instables et brutaux.
Critique :
Coincé le cul entre les chaises du drame psychologique et du thriller haletant, #ToutLargentDuMonde botte en touche et incarne un film à oscars classique, prenant et sombre mais point marquant ni radical, magnifié par une esthétique renversante et un Christopher Plummer impérial. pic.twitter.com/N192f0WGOa— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) December 27, 2017
Après un Alien : Covenant férocement décevant, inutile de dire que l'on attendait avec une impatience toute particulière le second long-métrage de l'année signé par un papy Ridley Scott qui, à l'aube de sa huitième décennie, suit les pas boulimiques de son comparse Woody Allen en produisant - au moins - une péloche par an.
Plus bandant sur le papier que son énième exploration de sa franchise chérie malgré une production plus que houleuse (coucou le " Kevin Spacey Gate "), Tout l'Argent du Monde s'attache à retranscrire, quelques mois avant que Danny Boyle n'en fasse de même su le petit écran, l'histoire véridique du kidnapping dans l'Italie des 90's du petit-fils du milliardaire roi du pétrole John Paul Getty.
Un fait divers aussi terrible qu'il est fait pour le cinéma, tourné comme une fresque romancée en deux parties - entre passé et présent - par Scott, à la fois focalisées autant sur l'amour d'une mère (Michelle Williams, convaincante) prête à tout pour sauver son fils face à l'inertie d'une figure (plus ou moins) paternelle avare, sorte d'oncle Picsou bigger than life et totalement retranché sur lui-même et sa fortune; que sur le triste sort John Paul Getty III, rejeton kidnappé par des ravisseurs liés à la mafia calabraise (dont Romain Duris, plutôt solide malgré un cabotinage certain), et réclamant une très forte rançon pour sa libération - 17 millions de dollars.
Et, presque logiquement, c'est la partie véritablement au coeur du récit, celle concernant la figure mythique de Getty (Christopher Plummer, impérial), qui intéresse bien plus aussi bien le spectateur que Sir Ridley, qui en fait une figure mythologique abjecte mais fascinante comme c'est si bien les croquer le cinéaste, véritable maître du monde vaniteux enfermé dans sa tour d'ivoire.
Captivante et menée d'une main de maître (autant d'un point de vue esthétique que de mise en scène, même le score de Daniel Pemberton en impose), cette partie glaciale sur un être profondément pervers et rongé par son avidité (encore une belle image de l'humanité à ajouter à l'actif du papa de Gladiator), sauve du naufrage le métrage.
Rythmé au Lexotanil et constamment coincé le cul entre deux chaises, celle du thriller haletant (qui accumule les rebondissements sans arriver à être réellement palpitant) et le drame psychologique (trop rarement) tragique ni poignant sur une mère désemparée, prise en étau entre un beau-père monstrueusement antipathique et des kidnappeurs qui le sont tout autant.
Péloche à oscars classique, tronquée par quelques longueurs et une caractérisation des personnages limitée (l'espion campé par Wahlberg ne sert pas du tout l'intrigue), tout en étant étrangement prenant quand il s'en donne les moyens (tout le film aurait même pu tourner autour de Getty); Tout l'Argent du Monde ne va jamais vraiment au bout ni de ses ambitions, ni de la richesse de son propos, et peine à incarner le moment de cinéma radical qu'il aurait du être, sur le pouvoir écrasant de l'argent et la déshumanisation croissante du monde contemporain.
Une petite déception donc, mais plus digérable que celle incarnée par Covenant...
Jonathan Chevrier