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[CRITIQUE] : 5 Septembre


Réalisateur : Tim Fehlbaum
Acteurs : Peter Sarsgaard, Ben Chaplin, Leonie Benesch, John Magaro, Zinedine Soualem,...
Distributeur : Paramount Pictures France
Genre : Drame.
Nationalité : Allemand, Américain.
Durée : 1h35min

Synopsis :
5 septembre nous replonge dans l’événement qui a changé le monde des médias à jamais et qui continue de résonner à l’heure où l’information, le direct et la maîtrise de l’antenne reste l’objet de nombreux débats. Le film se déroule lors des Jeux Olympiques de Munich de 1972 où l’équipe de télévision américaine se voit contrainte d’interrompre subitement la diffusion des compétitions, pour couvrir la prise d’otage en direct d’athlètes israéliens. Un évènement suivi à l'époque par environ un milliard de personnes dans le monde entier. Au cœur de l'histoire, l’ambitieux jeune producteur Geoff veut faire ses preuves auprès de Roone Arledge, son patron et légendaire directeur de télévision. Avec sa collègue et interprète allemande Marianne, son mentor Marvin Bader, Geoff va se retrouver confronté aux dilemmes de l’information en continu et de la moralité.



Critique :



À une heure, aussi profondément cynique que désespérante - voire, n'ayons pas peur des mots, totalement terrifiante - où la morale médiatique (sous toutes ses formes journalistiques) comme l'éthique et la responsabilité face à l'information (ne parlons plus de vérité), sont de plus en plus discutées et discutables, Tim Fehlbaum tente de remettre l'église au milieu du village par la force d'un regard un poil inhabituel, sur des événements dont l'écho contemporain est loin d'être anodin - mais également gênant -, avec 5 Septembre, qui revient au plus près de l'attentat des J.O. de 1972 à Munich, portés à l'époque par la volonté logique de redorer le blason de toute la nation allemande (les précédents J.O. en Allemagne, en 1936, étaient marquées par le sceau du national-socialisme et de son antisémitisme décomplexé).

Copyright Constantin Film

Des événements qui ont conduit à la mort de onze membres de la délégation israélienne et de cinq preneurs d'otages palestiniens, et que le cinéaste choisit d'aborder par le prisme, exclusif, de l'éthique médiatique au plus près journalistes de télévision bossant au département des sports de la chaîne de télévision américaine ABC (situé alors juste en face de la scène du crime dans le village olympique), dans une sorte de pièce de théâtre intimiste et minimaliste où chaque artisan, même infime, de l'information est confronté de plein fouet à la responsabilité et aux conséquences de son travail et à son hypothétique statut d'acteur - même involontaire - au cœur d'une situation qui, évidemment, ne peut que dépasser qui que ce soit (toute erreur comme toute ambition mal placée, peut mener au désastre).

Tout autant docu-fiction que thriller d'investigation dans l'ombre de références plus où moins bien digérées, 5 Septembre a pour lui cette jolie intention d'inscrire sa narration dans un sentiment d'immédiateté (de la photographie granuleuse de Markus Förderer, au travail sonore incroyable de Frank Kruse) et ce, même s'il peine sensiblement à retranscrire l'explosivité psychologique et politique de l'événement (zéro profondeur politico-historique, ce qui est un vrai aveu d'échec quand bien même le contexte actuel renforce l'idée d'éviter toute controverse).

Copyright Constantin Film

Plus un film de processus donc, complexe dans sa forme et, paradoxalement, dénué de complexité dans une bonne frange de son fond, plutôt palpitant et solidement interprété (mention au trio John Magaro, Leonie Benesch et Ben Chaplin), mais tellement obnubilé par sa volonté d’être apolitique par rapport à ce moment crucial de l’histoire du journalisme médiatique (et de l'humanité, ce qui se perd aujourd'hui), qu'il en perd, peut-être, un brin de sa pertinence.


Jonathan Chevrier