[CRITIQUE] : Heretic
Réalisateurs : Scott Beck et Bryan Woods
Acteurs : Hugh Grant, Chloe East, Sophie Thatcher,...
Distributeur : Le Pacte
Budget :
Genre : Épouvante-horreur, Thriller.
Nationalité : Canadien.
Durée : 1h50min.
Synopsis :
Deux jeunes missionnaires de l'église mormone d'une petite ville du Colorado font du porte à porte dans l'espoir de convertir les habitants. Le soir venu, après une journée infructueuse, elles décident de frapper à la porte d'une maison isolée. C'est le charmant Mr Reed qui les y accueille. Mais très vite, les jeunes femmes réalisent qu’elles sont tombées dans un piège. La maison est un véritable labyrinthe où elles ne pourront compter que sur leur ingéniosité et leur intelligence pour rester en vie...
Critique :
Jadis pape de la comédie romantique, Hugh Grant a, comme le commun des mortels, pris de la bouteille et d'une manière assez improbable, bien aidé par sa prestation (où plutôt ses) méchamment creapy dans le chef-d'œuvre Cloud Atlas des sœurs Wachowski, sa carrière a entamé un virage à 180° où le bonhomme a quitté - en partie - son costume de gendre idéal, pour embrasser assez souvent celui plein de possibilités du vilain à la fois drôle (Paddington 2, Donjons et Dragons), pathétique (The Undoing) voire même parfois réellement angoissant.
Comme avec Heretic, des pas forcément futés Scott Beck et Bryan Woods (le pas fifou Night Light, l'immonde 65 - la Terre d'avant), dont le plus haut fait résidait jusqu'ici à avoir signé le script catho-guindé de Sans un Bruit premier du nom.
Mais parce qu'il ne faut jamais enterrer trop tôt des cinéastes, même lorsque leur filmographie nous supplie de le faire, difficile de ne pas admettre que le tandem s'en sort cette fois plutôt bien avec leur troisième effort, au high concept certes passablement éventé par une campagne promotionnelle pataude (well done A24), mais dont les réminiscences religieuses forment un tout assez cohérent avec la franchise aux extraterrestres à la misophinie profondément exacerbée.
Car oui, spoilers qui n'en est pas un (well done A24 bis), Heretic n'aborde pas avec des gros sabots la notion de croyance religieuse, puisqu'il en vient à intelligemment remettre en question les fondements de sa foi et de sa pensée - sans voguer vers la voie " Friedkinienne " du blasphème contrôlé -, à travers un modeste bout d'horreur psychologico-comique certes perfectible mais aux dialogues aussi carnassiers que le sourire d'un Hugh Grant merveilleusement charmant et ignoble à la fois (il s'éclate et cela transpire à l'écran).
Il est le mauvais berger qui croisera la route de deux jeunes missionnaires mormones (la débrouillarde Sister Barnes, et la définitivement plus naïve Sister Paxton) chargées de propager la (bonne ?) parole de l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours dans un petit patelin du Colorado, et qui auront la mauvaise idée de faire du porte-à-porte jusqu'à sa galerie des horreurs qui lui sert de maison, alors qu'un orage - symbolique - gronde.
Un diable cultivé qui cache très (trop) bien son jeu, lui qui est un temps totalement ouvert à l'idée d'écouter le discours des deux adolescentes - foutu odeur de myrtilles -, avant de leur faire lentement comprendre qu'elles ont frappé à la mauvaise porte : celle d'une demeure labyrinthique (et qui vient mettre une cla-claque à celle déjà bien tordue de Barbare), un " sanctuaire " où elles pensaient le convertir à leur croyance, alors que lui, théologien gentiment sadique, n'a que pour but d'annihiler toutes les leurs...
Et que le long-métrage n'est rien de plus croustillant à proposer est au fond loin d'être grave (certains films n'arrivent même pas à tenir leur propre concept), tant la propension qu'à le duo Beck/Woods a solidement charpenté sa tension horrifique à travers une narration volubile (on a rarement été autant sous tension à l'écoute de discours autour de la religion judéo-chrétienne et de leur nature insatisfaisante, sur les vertus de la croyance face au scepticisme et à l'incrédulité), sans trop bifurquer vers le terrain de la physicalité artificielle, suffit presque à justifier sa vision, façonné que le film est par la thématique de l’annihilation spirituelle par la rationalisation extrême, où l’incrédulité se fait fondamentalisme.
Difficile en revanche de ne pas tiquer un brin devant le manque cruel de profondeur de ses personnages (au nombre suffisamment réduit, pourtant), devant le manque d'assise psychologique qui rendrait d'autant plus viscéral un dernier acte un poil plus sensationnaliste, où tout est justement noué autour des convictions intimes de chacun; même s'il est louable de voir les deux cinéastes donner du corps à ses deux jeunes héroïnes, jamais réduites à leur religion, à leur sexe ou à leur jeunesse même si ce sont ses trois composantes, qui en font les victimes du simili-mansplaining de leur bourreau.
Imparfait, Heretic n'en reste pas moins un excellent midnight movie sur les notions de foi et d'inconnue, une sorte de pièce de théâtre macabre et philosophique porté par une leçon magistrale de perversité donnée par un Hugh Grant des grands jours.
Jonathan Chevrier
Acteurs : Hugh Grant, Chloe East, Sophie Thatcher,...
Distributeur : Le Pacte
Budget :
Genre : Épouvante-horreur, Thriller.
Nationalité : Canadien.
Durée : 1h50min.
Synopsis :
Deux jeunes missionnaires de l'église mormone d'une petite ville du Colorado font du porte à porte dans l'espoir de convertir les habitants. Le soir venu, après une journée infructueuse, elles décident de frapper à la porte d'une maison isolée. C'est le charmant Mr Reed qui les y accueille. Mais très vite, les jeunes femmes réalisent qu’elles sont tombées dans un piège. La maison est un véritable labyrinthe où elles ne pourront compter que sur leur ingéniosité et leur intelligence pour rester en vie...
Critique :
#Heretic où un solide midnight movie, un thriller psychologique façon pièce de théâtre macabre et philosophique porté autant par la leçon magistrale de perversité donnée par Hugh Grant, que par la fascinante thématique de l’annihilation spirituelle par la rationalisation extrême. pic.twitter.com/dv8XazRCsR
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) November 1, 2024
Jadis pape de la comédie romantique, Hugh Grant a, comme le commun des mortels, pris de la bouteille et d'une manière assez improbable, bien aidé par sa prestation (où plutôt ses) méchamment creapy dans le chef-d'œuvre Cloud Atlas des sœurs Wachowski, sa carrière a entamé un virage à 180° où le bonhomme a quitté - en partie - son costume de gendre idéal, pour embrasser assez souvent celui plein de possibilités du vilain à la fois drôle (Paddington 2, Donjons et Dragons), pathétique (The Undoing) voire même parfois réellement angoissant.
Comme avec Heretic, des pas forcément futés Scott Beck et Bryan Woods (le pas fifou Night Light, l'immonde 65 - la Terre d'avant), dont le plus haut fait résidait jusqu'ici à avoir signé le script catho-guindé de Sans un Bruit premier du nom.
Mais parce qu'il ne faut jamais enterrer trop tôt des cinéastes, même lorsque leur filmographie nous supplie de le faire, difficile de ne pas admettre que le tandem s'en sort cette fois plutôt bien avec leur troisième effort, au high concept certes passablement éventé par une campagne promotionnelle pataude (well done A24), mais dont les réminiscences religieuses forment un tout assez cohérent avec la franchise aux extraterrestres à la misophinie profondément exacerbée.
Photo : A24 |
Car oui, spoilers qui n'en est pas un (well done A24 bis), Heretic n'aborde pas avec des gros sabots la notion de croyance religieuse, puisqu'il en vient à intelligemment remettre en question les fondements de sa foi et de sa pensée - sans voguer vers la voie " Friedkinienne " du blasphème contrôlé -, à travers un modeste bout d'horreur psychologico-comique certes perfectible mais aux dialogues aussi carnassiers que le sourire d'un Hugh Grant merveilleusement charmant et ignoble à la fois (il s'éclate et cela transpire à l'écran).
Il est le mauvais berger qui croisera la route de deux jeunes missionnaires mormones (la débrouillarde Sister Barnes, et la définitivement plus naïve Sister Paxton) chargées de propager la (bonne ?) parole de l'Église de Jésus-Christ des Saints des Derniers Jours dans un petit patelin du Colorado, et qui auront la mauvaise idée de faire du porte-à-porte jusqu'à sa galerie des horreurs qui lui sert de maison, alors qu'un orage - symbolique - gronde.
Un diable cultivé qui cache très (trop) bien son jeu, lui qui est un temps totalement ouvert à l'idée d'écouter le discours des deux adolescentes - foutu odeur de myrtilles -, avant de leur faire lentement comprendre qu'elles ont frappé à la mauvaise porte : celle d'une demeure labyrinthique (et qui vient mettre une cla-claque à celle déjà bien tordue de Barbare), un " sanctuaire " où elles pensaient le convertir à leur croyance, alors que lui, théologien gentiment sadique, n'a que pour but d'annihiler toutes les leurs...
Et que le long-métrage n'est rien de plus croustillant à proposer est au fond loin d'être grave (certains films n'arrivent même pas à tenir leur propre concept), tant la propension qu'à le duo Beck/Woods a solidement charpenté sa tension horrifique à travers une narration volubile (on a rarement été autant sous tension à l'écoute de discours autour de la religion judéo-chrétienne et de leur nature insatisfaisante, sur les vertus de la croyance face au scepticisme et à l'incrédulité), sans trop bifurquer vers le terrain de la physicalité artificielle, suffit presque à justifier sa vision, façonné que le film est par la thématique de l’annihilation spirituelle par la rationalisation extrême, où l’incrédulité se fait fondamentalisme.
Photo : A24 |
Difficile en revanche de ne pas tiquer un brin devant le manque cruel de profondeur de ses personnages (au nombre suffisamment réduit, pourtant), devant le manque d'assise psychologique qui rendrait d'autant plus viscéral un dernier acte un poil plus sensationnaliste, où tout est justement noué autour des convictions intimes de chacun; même s'il est louable de voir les deux cinéastes donner du corps à ses deux jeunes héroïnes, jamais réduites à leur religion, à leur sexe ou à leur jeunesse même si ce sont ses trois composantes, qui en font les victimes du simili-mansplaining de leur bourreau.
Imparfait, Heretic n'en reste pas moins un excellent midnight movie sur les notions de foi et d'inconnue, une sorte de pièce de théâtre macabre et philosophique porté par une leçon magistrale de perversité donnée par un Hugh Grant des grands jours.
Jonathan Chevrier