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[CRITIQUE] : Venom : The Last Dance


Réalisatrice : Kelly Marcel
Acteurs : Tom Hardy, Alanna Ubach, Chiwetel Ejiofor, Juno Temple, Stephen Graham, Rhys Ifans,...
Distributeur : Sony Pictures Releasing France
Budget : -
Genre : Action, Comédie, Fantastique.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h50min

Synopsis :
Eddie et Venom sont en cavale. Chacun est traqué par ses semblables et alors que l'étau se resserre, le duo doit prendre une décision dévastatrice qui annonce la conclusion des aventures d'Eddie et de Venom.



Critique :



Chercher à analyser en profondeur (où même juste en surface, ne nous violons pas la face Sue nos mauvaises intentions) la trilogie Venom, reviendrait assez vulgairement à vouloir capturer puis décortiquer les racines d'un de nos propres pets : ça peut être drôle cinq minutes, mais la vacuité de l'exercice se ferait beaucoup trop vite sentir (sentir, prout... tu l'as), pour que l'on se laisser aller à parcourir sans réserve l'autoroute du bonheur.

Mais on accepte les missions supposées impossibles par chez nous, même quand elle implique de défendre un Tom Hardy lancé dans la plus humiliante des imitations de Louis de Funès, flanqué d'un symbiote corniaud qui, sur le papier ne l'oublions pas, est l'ennemi le plus redoutable d'un Spider-Man qui ne se sera jamais - où presque - pointé sur sa route, un comble tant il est censé être le pivot d'un univers partagé où il n'a strictement rien partagé avec personne.
On aime Sony, et vous ne pouvez pas imaginer à quel point...

Copyright 2024 CTMG

Exit donc la scène post-crédits de l'incroyable Let There Be Carnage, second opus qui nous offrait un tandem Woody Harrelson/Tom Hardy a un niveau de cabotinage tellement élevé qu'il en rendrait presque jaloux Jared Leto (et qui voyait Venom et Eddie Brock prendre pour cible le Peter Parker de Tom Holland), mais aussi celle de Spider-Man : No Way Home (qui voyait Eddie laisser un bout de symbiote sur, vraissemblablement, la Terre-616, entre deux shots de tequila avant de revenir dans son monde), et bonjour le gros gloubi-boulga multiversel Venom : The Last Dance, premier long-métrage de la wannabe cinéaste/productrice/co-scénariste avec Tom Hardy Kelly Marcel, preuve vivante que Sony Pictures et sa tête pensante Amy Pascal, n'en a encore plus rien à branler du personnage, que ne le laissait déjà présager son traitement abominablement ridicule jusqu'ici.

Et pourtant, en comparaison des cinéastes plus chevronnés (capturez l'ironie, s'il vous plaît) Ruben Fleischer et Andy Serkis, Marcel réalise peut-être le meilleur film de cette trilogie malade, quand bien même il est frappé des mêmes maux : vouloir jongler le popotin plein de vaseline, entre les fauteuils du divertissement super-héroïque turbo-teubé et spectaculairement dégueulasse, que le public sadique du Spider-verse de Sony plébiscite avec une gourmandise qui flirte lourdement avec l'indécence; et le casse-tête proprement assourdissant de vouloir créer une aventure un tant soit peu convenable, au milieu du chaos déconcertant de la fausse à purin d'une franchise (d'un univers ? D'un studio ?) sans gouvernail.

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Et pourtant, il y a quelque chose d'admirable (oui), de presque héroïque même dans la manière qu'a Sony de savamment s'auto-saboter, de consciemment se flageller les parties intimes - et le portefeuille - avec un martinet plein de clous rouillés en refusant toute l'irritabilité d'un univers construit et cohérent, à l'image du modèle du duo MCU/Disney, pour voguer vers le grand n'importe quoi décomplexé, où les films ne seraient in fine que des buddy movie romantiques friqués, où Tom Hanks et Meg Ryan céderaient leur place à la gravité ringarde d'un journaliste dépressif et en deuil d'un amour perdu, et un extraterrestre extrêmement dangereux mais in fine tout aussi déprimé, n'arrivant même pas à faire de mal à une mouche - où plutôt à deux poulets.
De la pure connerie peut-être, mais concoctée avec audace.

The Last Dance se ferait donc, presque, le plus Marvelien des films Venom, quand bien même il a en lui la même folie déglinguée de ses illustres aînés, tant ses ambitions ne sont pas tant de canaliser cette énergie frénétique que d'offrir une fin un tant soit peu convenable à ce qui n'aurait jamais dû dépasser le simple incident créatif du premier opus.
Et comme dit plus haut, le film jongle un peu trop entre ses deux - voire trois - identités, incarnant à la fois un buddy movie sauce road movie embaumé un brin par la mort, où le duo est désormais désormais cavale après les événements de Let There Be Carnage, mais s'offre une petite escapade à Las Vegas dans sa tentative de rallier New York; et donc aussi l'actionner SF sauce film d'invasion extraterrestre (comme le genre super-héroïque en compte à la pelle) où ils se frottent à la Zone 51, une organisation gouvernementale obscure qui les chasse et une multitude d'autres symbiotes.

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Tout un (trop gros) programme donc, pour une narration incapable de digérer toutes les disgressions de ses intrigues et pistes divergentes, jusqu'à un final dantesque dans sa cacophonie la plus sourde, impliquant beaucoup de morts, de sacrifices, la fin prévisible (The Last Dance quoi...) des aventures de l'amitié dysfonctionnels entre les deux anti-héros qui n'auraient jamais du l'être, et la présence ô combien alléchante - mais excessivement courte et périphérique - de Knull (en cherche du Codex qui le libérera de sa " prison ", et qui est intimement lié à Venom et donc aussi, à Eddie, une expression symbolique et métaphysique du lien fort qui les lie), dont l'ombre imposante s'exprime notamment à travers le Xénophage.

Mais pourtant, dans ce gros bordel tout plein d'encre et de testostérone, il y a un cœur tout cracra qui bat et qui fait, étrangement, un peu mouche dans sa nostalgie plutôt chouette, dans sa tentative même affreusement maladroite de donner de la maturité à une trilogie qui a tout de l'ado attardé bête, méchant mais quand-même assez attachant.
Et ça en dit long, au fond, sur la volonté qu'a pu avoir Tom Hardy, à une époque où il pouvait tout se permettre, de profiter de la marge de manœuvre assez folle offerte par Sony (à la fois incroyablement cynique et inconsciente) pour voguer à l'opposé de la voie vicieuse, destructice et violente du Venom sur papier glacé, pour lui donner une sorte de réhabilitation plus tendre et tolérante (avec un accent sur sok improbable humanité et les personnages - jetables - qui l'entoure), pour lui façonner un blockbuster totalement à part, sans la moindre équivalence - pas même les pires errances du Worlds of DC.

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Il a fait du Lethal Protector une grosse patate de l'espace sans estime de soi venue faire la fête sur Terre et, même inconsciemment, c'est ce qu'incarne joyeusement la trilogie : un sacré gros délire foutraque et potache porté par un comédien - et scénariste - grassement payé mais courageux, qui a réussit à nous faire rire même dans l'embarras le plus complet.
Alors oui, Venom : The Last Dance est moche et pas bon - et le mot est faible -, et toute la gravité de sa dramaturgie est désespérément au ras des pâquerettes, mais comment totalement savater un film capable d'enchaîner une séquence intime et douloureuse, à un interlude dansé et ABBA-esque, quasiment dans le même mouvement ?

Comme Eddie avec Venom, on aime un peu partager notre cinéphilie avec des parasites " blockbuster-esques " (le terme est validé, ne chipote pas) stupides et deraisonnés car, parfois, il y a du panache même dans les séances les moins défendables...


Jonathan Chevrier