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[CRITIQUE] : Junk Head


Réalisateur : Takahide Hori
Acteurs : avec les voix de Takahide Hori, Yuji Sugiyama, Atsuko Miyake,...
Distributeur : UFO Distribution
Budget : -
Genre : Animation, Science-fiction.
Nationalité : Japonais.
Durée : 1h41min.

Synopsis :
L’humanité a réussi à atteindre une quasi-immortalité. Mais à force de manipulations génétiques, elle a perdu la faculté de procréer, et décline inexorablement. En mission pour percer les secrets de la reproduction, Parton est envoyé dans la ville souterraine, où vivent des clones mutants prêts à se rebeller contre leurs créateurs…



Critique :


Aujourd'hui, un peu comme le terme " chef-d'oeuvre " qui est asséné à toutes les sauces par n'importe qui au point d'être totalement galvaudé et dépossédé de son importance (la fameuse " culture de l'instant " qui fait dire tout et son contraire), le terme de réalisateur " visionnaire " est bien trop facilement utilisé dès qu'un cinéaste sort un brin des clous pour proposer une expérience si ce n'est révolutionnaire, au moins un tant soit peu atypique.
Pourtant, difficile de ne pas coller cette expression sur le cuir de Takahide Hori, lui dont l'étonnant petit bout de cinéma en stop-motion Junk Head (prolongation de son court-métrage éponyme croqué en 2014), pour lequel il couvre quasiment tous les postes possibles où presque, justifierait justement d'être considéré comme tel, porté par une vision créative certes pas bardé de quelques scories, mais avant tout et surtout vraie et pure.

Copyright UFO Distribution

Son effort se réclame dans un univers post-apocalyptique, un avenir dans lequel si l'humanité aurait quasiment atteint l'immortalité grâce à la cybernétique, elle a également perdu en échange sa capacité à pouvoir se reproduire et à procréer.
Parton se porte alors volontaire pour porter une mission complexe - déceler les secrets de la reproduction - dans une ville souterraine sous notre surface brillante mais creuse, où vivent des clones mutants prêts à se rebeller contre leurs créateurs.
Mais lorsque que cet Alice robotisée tombe dans le terrier du lapin, il n'y trouvera qu'une nouvelle vie de danger en tant que robot bosselé et courageux...
Fable futuriste et dystopique usant d'une pluie de références SF familières (Dune, Matrix, Silent Hill, Chappie, Alien,...) autant que de tous les tropes du folklore et de la fantaisie du conte de fées, Junk Head épouse tout du long une maturité sombre pour narrer le récit initiatique et la quête de sens cauchemardesque d'un robot humanoïde confronté à la lente déchéance et déliquescence de l'humanité, et qui en apprend finalement plus sur lui-même au coeur du chaos.
Mais si la forme en impose férocement, fruit d'un travail titanesque et d'une inventivité redoutable, dommage que le fond ne parvienne lui, jamais à la hauteur de la forme, dans une narration peu élaborée et instinctive où tout n'est que cause et effet, pour le meilleur et (surtout) pour le pire, où tout ne ressemble qu'à une succession d'épisodes bricolés et répétitifs (où le robot héros ne fait qu'affronter un danger après l'autre dans un cadre labyrinthique).

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En ne donnant pas suffisamment de corps à sa dystopie (à la différence, par exemple, d'un studio Laïka qui aurait justement mis le paquet sur la description méticuleuse des petits détails de la construction de son univers, pour en accentuer son impact sur la rétine) alors qu'il privilégie ici l'aspect immersif de son expérience punk et sensorielle, Hori semble un brin surpassé par son hermétisme forcé et pourtant, impossible de ne pas saluer la puissance ludique et captivante de son oeuvre atypique, radicale et personnelle, fruit d'un investissement dingue et sans nul pareil.
Le plus important est finalement là.


Jonathan Chevrier