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[CRITIQUE] : Moonfall


Réalisateur : Roland Emmerich
Acteurs : Halle Berry, Patrick Wilson, John Bradley, Michael Peña, Charlie Plummer, Wenwen Yu, Donald Sutherland,
Distributeur : Metropolitan FilmExport
Budget : -
Genre : Science-fiction, Action.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h00min.

Synopsis :
Une mystérieuse force a propulsé la Lune hors de son orbite et la précipite vers la Terre. L’impact aura lieu dans quelques semaines, impliquant l’anéantissement de toute vie sur notre planète. Jo Fowler, ancienne astronaute qui travaille pour la NASA, est convaincue de détenir la solution pour tous nous sauver, mais seules deux personnes la croient : un astronaute qu’elle a connu autrefois, Brian Harper, et un théoricien du complot, K.C. Houseman. Ces trois improbables héros vont tenter une mission impossible dans l’espace… et découvrir que notre Lune n’est pas ce que nous croyons.



Critique :


On n'a pas fondamentalement besoin de trop forcer le trait pour se dire que la création du pitch de Moonfall, n'a pas du faire chauffer plus que de raison les trois cerveaux de Spenser Cohen, Roland Emmerich et Harald Kloser, tant on voit de là leur réunion de départ se terminer en deux secondes chronos, avec un Emmerich dégainant dans une subtile inspiration divine " et si on faisait péter la lune ? ", avant que tout le monde ne se lance des High-fives et ne prenne quelques jours pour décompresser.
Évidemment que cela a dû prendre un peu plus de temps (une pause déjeuner, plus ou moins), mais le résultat est que le Roland est sans doute l'un des seuls réals Hollywoodiens aujourd'hui (et il a été l'un des premiers à le faire), à composer un divertissement kaboom à partir de pas grand chose - ici un mix entre Armageddon de tonton Bay et Don't Look Up d'Adam McKay -, un blockbuster avec des moyens colossaux basé sur un pitch de série B à forte tendance Z.

Copyright Metropolitan FilmExport

C'est tout un art et force est d'admettre que son dix-neuvième effort, intègre sans encombre tous les codes de son cinéma pour mieux incarner un fier représentant du Emmerich-verse, dans ses (maigres) qualités comme dans ses (nombreux) défauts.
Sur le papier, la péloche avec décemment tout pour plaire et envoyer du pâté : un concept apocalyptique fou et furieusement tripant (la lune s'écrase sur Terre et menace l'avenir de la planète avec, en prime, ses satanés extraterrestres), du patriotisme dégoulinant, des plans de destruction porn intégralement générés par ordinateur (des images d'inondations et autres tremblements de terre extrêmes, qui auraient pu facilement être reprises directement à partir des propres films d'Emmerich, 2012 et Independance Day : Resurgence) et même des dialogues limites et même férocement ridicules, prononcés par des personnages qui le sont tout autant ou presque (la bande annonce annonce justement, la couleur).
Le tout porté par des comédiens totalement conscient de la facilité/fragilité du projet, qui ne sont là que pour gratter un petit billet tout en s'amusant en même temps - comme au sein du MCU/DCEU quoi -, à l'instar du tandem Halle Berry (charismatique et crédible de bout en bout) et Patrick Wilson (qui sait exactement ou il met les pieds, presque résigné à enchaîner les blockbusters au lieu de projets digne de son talent).
Comme sur du velours donc... ou presque.

Copyright Metropolitan FilmExport

Sans la moindre inspiration et peinant franchement à démarrer, la narration se vide un chargeur de M-16 dans le pied dès sa première demie heure, entre un développement confus (une invitation dans la banalité de l'intimité des protagonistes principaux - divorces, liens familiaux -, qui semblent profondément hors de propos tant ces éléments ne donne jamais de corps au moment ou la lune tombe littéralement au-dessus d'eux) et une caractérisation des personnages boiteuse, si ce n'est même problématique (le perso barré du si sympathique John Bradley, un astronome amateur/nerd lunaire/théoricien du complot dépeint comme un héros qui truste l'intégralité de l'exposition scientifique du film, à une époque où ces personnes sont au mieux des diffuseurs de désinformation, au pire des êtres dangereusement radicalisés).
Pire, quand la fête dédaigne enfin vouloir commencer, Emmerich se lance dans une surmultiplication destructrice de la planète qui certes va de soi (même dans sa manière de jeter allègrement les lois de la physique par la fenêtre) et surtout ne provoque pas la moindre empathie pour les victimes (avec l'habitude, nous sommes tous immunisé avec cet extinction humaine sous CGI), mais qui manque cruellement d'âme et d’intérêt à une époque ou (presque) une super-production sur deux, fait déjà l'apologie du destruction porn.
Quant aux moments de bravoure, ils sont littéralement désarçonnés par un déficit de tension psychologique évident.

Copyright Metropolitan FilmExport

Pataugeant difficilement dans le territoire de la SF, notamment dans un dernier acte qui commet un seppuku avant même que l'on ne s'en rende compte, Moonfall est précisément ce que vous attendez d'un film titré pareil : un blockbuster familièrement spectaculaire, bruyant et illogique - voire ridicule -, mais qui est frustrant tant il appelle à épouser sa bêtise, sans qu'il n'atteigne jamais vraiment le niveau acceptable du plaisir coupable et pop-corn purement américain.
Un Roland Emmerich sans mojo et en pilote automatique apocalyptico-exaspérant (comme pour 2012 et Independance Day : Resurgence), dont les récents discours sur le fait que les films de super-héros ruinent littéralement Hollywood, se voient totalement décrédibiliser par son propre dernier effort, qui comme la franchisation à outrance du business, ne fait ici que recycler les succès passés - dont les siens - avec une paresse abyssale.
Certes, se plaindre qu'un film comme celui-ci est complètement risible et faiblard reviendrait à se plaindre que la malbouffe donne des indigestions et des gaz, mais il fut un temps où péter c'était chouette, et on ne rechignait pas à donner notre argent pour ça...


Jonathan Chevrier