[CRITIQUE] : Knock Knock
Réalisateur : Eli Roth
Acteurs : Keanu Reeves, Ana de Armas, Lorenza Izzo,...
Distributeur : Synergy Cinéma
Budget : -
Genre : Thriller.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h39min.
Synopsis :
Un soir d'orage, un architecte, marié et bon père de famille, resté seul pour le weekend, ouvre sa porte à 2 superbes jeunes femmes mal intentionnées…
Critique :
#KnockKnock ou une série B machiavélique sous fond de piège fatal jouissif mais trop indécis et bancal pour convaincre.Reeves lui, en impose
— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) 23 Septembre 2015
Jusqu'à l'an dernier encore, le monolithique mais génial Keanu Reeves s'était fait méchamment absent de nos salles obscures avant d'opérer un comeback des plus retentissant avec trois péloches en moins de six mois.
Et pourtant, malgré une exposition plus importante qu'à l’accoutumée on ne peut pas réellement dire que ce retour au septième art ne se soit pas fait dans la douleur.
Entre le boycottage pur et simple de sa première réalisation totalement passé inaperçue dans nos salles hexagonales - le pourtant très bon Man of Tai Chi - et le flop retentissant du bancal mais fun 47 Ronin, (officiellement gros accident industriel pour Universal), on pourrait même presque dire que le public ne voulait déjà plus de lui si il n'y avait pas eu le jouissif John Wick, première réalisation des anciens cascadeurs David Leitch et Chad Stahelski, pour corriger le tir.
Mal aimé, le Keanu ?
Force est d'admettre que la question se pose bien là vu son impopularité constante auprès du public (et plus directement au box-office international) depuis le dernier opus - lui aussi mal aimé - de la trilogie Matrix datant, déjà, de 2003.
Avouons donc qu'il y a quelque chose de franchement intriguant à voir le bonhomme squatter la vedette du nouveau long métrage d'Eli Roth, autre talent " boycotté " dont la dernière péloche a avoir foulée une salle obscure hexagonale date de 2008, à savoir son excellent Hostel 2...
Deux revenants ou presque, à la tête d'un thriller home invasion féminin façon série B barrée, gore et cul à la fois, bourrée jusqu'à la gueule de références au cinéma de genre (la valeur ajoutée chère à Roth) et incarnant un remake officieux du méconnu mais sulfureux Death Game de Peter S. Traynor; s'il en fallait moins que ça pour susciter l'intérêt des cinéphiles, la présence des deux bombes Ana de Armas et Lorenza Izzo au casting avait définitivement fait de Knock Knock l'un des événements majeurs de cette rentrée ciné 2015.
Porté par un pitch aussi léger que follement aguichant (un soir d’orage, un architecte marié et père aimant resté seul pour le weekend, ouvre sa porte à deux superbes jeunes femmes mal intentionnées), le film place Keanu Reeves dans le rôle du mâle dominée par deux angéliques Alex Forrest à peine sortie de l'adolescence et shooté aux clips MTV, au sein d'un copieux mélange des genre (comédie satirique et noire, thriller dramatique, huit-clos psychologique) citant directement le Funny Games de Michael Haneke et Les Chiens de Pailles de Peckinpah.
Copieux et jouissif mais pas pour autant totalement maitrisé puisque Roth, peu porté sur le gore (alors que le sujet légitimait pleinement un basculement vers le torture porn) mais au savoir-faire toujours aussi habile pour faire monter graduellement la tension, semble tout du long coincé le cul entre deux chaises en ne sachant pas réellement quoi choisir entre la comédie sarcastique un brin potache et le thriller oppressant et contemporain.
Pire, le cinéaste ressort la carte de la fable moralisatrice/culpabilisatrice (outre le thème évident de l'adultère qui saccage le self made man américain, ça charcute également la jeunesse actuelle à la cuisse facile et aux mœurs rompues ou même la dangerosité de notre dépendance aux réseaux sociaux) avec un traitement nettement moins percutant que chez la concurrence (Hard Candy de David Slade en tête) ou même que pour ses précédents essais - les deux premiers Hostel surtout.
En résulte un divertissement prévisible et à l'identité trouble.
Fun, drôle et anxiogène à la fois, porté par de vrais bons moments de cinéma (l'acte sexuelle du trio absolument psychédélique) mais qui survole beaucoup trop ses interrogations et manque cruellement d'impact dans sa caractérisation du démon de midi - ou plutôt minuit ici - pour ne pas laisser cruellement sur sa faim un spectateur certes amusé par ce gros délire communicatif mais jamais vraiment conquis.
Reste qu'en père de famille détruit pour son adultère fatal, Keanu Reeves en impose et convainc sous les traits d'un agneau tranquillement dévoré par deux louves démentes et manipulatrices (excellentes Ana de Armas et Lorenza Izzo).
Bancal, déstabilisant (mais pas toujours dans le bon sens du terme), mené tambour battant et finalement plaisant à suivre, Knock Knock est une série B machiavélique sous fond de piège fatal jouissif mais souffrant beaucoup trop de l'indécision de son metteur en scène pour pleinement faire mouche.
Il n'empêche que des sucreries brouillonnes et sexys comme celles-là, on aimerait en mater plus souvent dans les salles obscures...
Jonathan Chevrier